Economie

Ramadan 2012 : les pays musulmans en quête de denrées alimentaires

Rédigé par Maria Magassa-Konaté | Samedi 9 Juin 2012 à 00:00

Pas question de manquer de nourriture. A l’approche du mois du Ramadan, qui devrait débuter vers le 20 juillet, les pays musulmans s’organisent en conséquence. On commence à stocker les denrées alimentaires car, durant ce mois, la consommation des musulmans connaît une forte hausse. Et les prix flambent.



Durant le mois du Ramadan, les croyants s’abstiennent de manger et de boire de l’aube au coucher du soleil. On pourrait penser que les dépenses alimentaires diminuent durant cette période, mais c’est bien le contraire. Beaucoup de jeûneurs se rattrapent. Les festins gargantuesques sont légion. A l’heure de l’iftar (rupture du jeûne), on ne se prive plus. Pour faire face à ces demandes, les gouvernements s’organisent. Les aliments de première nécessité sont stockés.

En Tunisie, le ministre du Commerce et de l’Artisanat, Béchir Zaâfouri, a annoncé, le 24 mai dernier, que la constitution des stocks régulateurs des produits alimentaires en vue de garantir l’approvisionnement pour le ramadan 2012 avait démarré. 40 000 tonnes de pomme de terre et 56 tonnes d’escalope de dinde ont été entreposés et 50 millions de litres de lait d'ici la fin du mois de septembre 2012 sont prévus.

Gare à la surconsommation

En 2011, au Mali, malgré la production de 36 millions de tonnes de sucre sur son territoire, l’Etat avait commandé 10 800 tonnes de sucre supplémentaire pour faire face au Ramadan, rapporte Les Echos-mali.com, un journal malien en ligne. Dans ce pays d’Afrique de l’Ouest, l’huile, le riz, le lait et la farine boulangère sont aussi d’autres denrées que l’Etat stocke avec attention avant le mois sacré du jeûne.

Et quand Ramadan vient, les musulmans n’hésitent pas à acheter les produits qui leur sont proposés à la vente. Même les plus pauvres font des excès durant ce mois spécial. Un constat que déplore le journaliste égyptien Abdel-Moneim Said dans Al-Ahram Weekly.

En 2009, il dénonçait déjà la surconsommation des musulmans durant le Ramadan, en mentionnant une étude du National Center for Social and Criminal Research (NCSCR) qui montrait que 83 % des ménages égyptiens augmentaient leurs dépenses alimentaires de 50 % à 100 %. Avec une consommation annuelle de près de 24,5 milliards d’euros par an, ils consacraient jusqu'à environ 3,6 milliards d’euros pour le seul mois du Ramadan. Les achats en viandes et volailles connaissaient la plus forte augmentation avec 66,5 % de hausse, suivis des friandises (+63 %), des noix et amuse-gueules (+ 25 %).

L’enquête démontrait par ailleurs que 60 % de la nourriture d’un dîner finissait à la poubelle et que plus de 75 % de la nourriture des banquets étaient jetés. Ces excès paraissent inappropriés quand on sait que le Ramadan est un mois de modération.

Cette surconsommation ne se limite pas aux pays musulmans. En France aussi, les jeûneurs s’attachent à festoyer comme des rois. L’an dernier, une enquête de l’agence Ecofin révélait que les dépenses de consommation des musulmans atteignaient environ 400 millions d’euros durant ce mois. Les achats des musulmans qui observent le jeûne se sont multipliés par deux par rapport aux autres mois, avait précisé l’agence.

Des prix qui s’envolent

Lors du Ramadan, les musulmans consomment donc plus. Ce qui n’est pas sans conséquence sur leur budget, car les prix augmentent durant ce mois. L’inflation est visible sur le cours de la Bourse. Dernièrement, le cours du sucre a ainsi connu une hausse considérable. Il s’établissait à 448 € par tonne le 18 mai dernier alors qu’il était de 430 € avant le 10 mai. Cette hausse s’explique en grande partie par l’approvisionnement massif des pays musulmans en sucre juste avant le Ramadan. Début juillet 2011, il avait atteint son cours maximal avec 575 € par tonne sur l’année.

A cette occasion, beaucoup de denrées alimentaires voient leur prix doubler. Les spéculateurs profitent de ce mois où la demande est forte pour augmenter les prix, à une période où les familles, même très pauvres, ne veulent pas se priver. Les abus sont réguliers dans les pays d’Afrique et du Moyen-Orient. Ainsi, il y a deux ans, le prix de la pomme de terre était passé de 20 à 50 dinars (21 à 52 centimes d’euro) le kilo en Algérie, révèle Afrique Magazine. L’an dernier, au Niger, on constatait aussi une hausse considérable des prix avec des prix qui triplaient parfois.

Baisser les prix : une nécessité

Face à cette inflation, de nombreux gouvernements ont décidé d’agir. Le gouvernement guinéen envisage de baisser les prix des denrées de première nécessité. Le riz, le pain, le sucre, l’huile et le lait sont les principaux aliments concernés par cette mesure. Pour ce faire, le pays a prévu une coopération étroite avec les commerçants.

Du côté de la Tunisie, le Premier ministre Hamadi Jebali a déclaré, mercredi 30 mai, faire des efforts fournis pour baisser les prix des produits alimentaires, surtout pour la période de Ramadan 2012.

Aux Emirats Arabes Unis, le département de la protection des consommateurs du ministère de l’Économie a décidé de créer des comités. Leur mission : surveiller les marchés dans la région orientale dans le but d’empêcher les hausses de prix durant le ramadan. Des prix bas ont également été fixés sur 15 articles correspondant au panier d’alimentation Ramadan pour permettre au plus démunis de s’acheter des denrées de première nécessité. Le prix des légumes et des fruits a également été fixé.

Ces initiatives sont impératives. N’oublions pas que le mois du Ramadan est un mois de partage.