Points de vue

Loi « anti-nounous voilées » : trois candidats à la présidentielle répondent à Mamans Toutes Egales

Rédigé par Mamans Toutes Egales (MTE) | Jeudi 12 Avril 2012 à 12:08



Le 9 février 2012, le collectif Mamans Toutes Égales a commencé une campagne d’interpellation des candidats à la présidence de la république. Nous avons demandé aux candidats de se positionner sur les discriminations que subissent les femmes portant le foulard.

Seuls Eva Joly, François Bayrou, et Nicolas Dupont-Aignan ont répondu. Où sont donc passés LO, le Front de gauche, le PS, l’UMP et le FN ? Nous attendons toujours une réponse de Philippe Poutou alors que des militants du NPA font partie du collectif et que le NPA est signataire de notre pétition.

Parmi les réponses, celle d’Eva Joly [1] est la plus fidèle aux lois : « les écologistes restent fidèles au contenu de la loi de 1905 qui appelle au respect de toutes les religions, de l'islam inclus ». Elle précise que « refuser aux mères (le droit d’accompagner leurs enfants aux sorties scolaires et d’être élues représentantes des parents d'élèves) au prétexte qu’elles portent un foulard est une discrimination évidente ».

Mais elle ne condamne pas les deux premiers articles du projet de “loi anti-nounous” visant à interdire aux femmes voilées les emplois du secteur privé de la petite enfance, se contentant de rappeler que « l'article 3 de cette loi (...) est contraire au code du travail en France ».

Nicolas Dupont-Aignan [2] a quant à lui sérieusement besoin d’un cours sur la laïcité : « Pour ma part, je considère que, dès l’instant qu’une sortie est organisée dans le cadre scolaire et à l’initiative de l’institution publique, les accompagnateurs, enseignants ou parents, doivent respecter les dispositions de la loi de 2004 et conserver une apparence de neutralité », écrit-il. Sa position manifeste une ignorance de cette loi de 2004, ainsi que de la Constitution. Il affirme : « La Constitution de la Vème République est formelle : la République respecte toutes les croyances, mais celles-ci doivent s’exercer exclusivement dans la sphère privée » – une stipulation qu’il a purement et simplement inventée.

Enfin, François Bayrou [3], le premier à avoir souhaité exclure les élèves portant le foulard de l’école [4], adopte aujourd’hui une position plus nuancée : « Non, je n’interdirais pas à une mère qui porte le foulard d’accompagner des enfants lors d’activités périscolaires ou d’être élue représentante des parents d’élèves. »

Il reconnaît aussi que légiférer pour i[« interdire le port du voile dans les structures privées d'accueil de la petite enfance [...] revient, en fait, à montrer du doigt certaines femmes musulmanes dans notre pays »]i. Mais il se contredit et contredit les textes sur la liberté d’expression en disant plus loin : « ce n’est pas parce que vous croyez en quelque chose de tout votre être que vous avez le droit de l’imposer aux autres dans les lieux publics », tendant donc à interdire la manifestation des opinions en public, au moment même où il manifeste les siennes sur toutes les chaînes de télévision.

Nous rappelons aux candidats que dans aucun texte de loi – national ou international – la liberté d’expression n’est restreinte au “privé”. Dans tous, la liberté d’expression de toute opinion est garantie de façon expresse en public comme en privé. L'article 9 de la Convention européenne des droits humains, un des textes majeurs qui garantissent les droits fondamentaux et qui a force de loi chez nous depuis que la France l’a ratifiée, définit la liberté de pensée, de conscience et de religion qui comprend « la liberté de manifester sa religion ou ses convictions, individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites ». Ce texte, comme la Déclaration universelle de 1948, ne fait aucune différence entre les convictions et les religions : celles-ci ne doivent pas être traitées différemment des autres convictions.

Nous demandons donc aux candidats de lire ces textes et de changer leurs déclarations en conséquence.