Monde

La liberté de la presse recule dans le monde sauf en Tunisie, en tête du monde arabe

Rédigé par | Mardi 3 Mai 2016 à 13:00

La journée internationale de la liberté de la presse est célébrée le 3 mai. Dans un contexte international marqué par la guerre contre le terrorisme, cette liberté est malmenée. Le classement 2016 de Reporters sans frontières, qui a lancé une opération contre les grands censeurs du monde, laisse cependant place à quelques zones d’optimisme, comme en Tunisie.



Reporters sans frontières (RSF) a rendu public fin avril son classement mondial de la liberté de la presse. Le constat général décrit est plutôt sombre.

La France est classée 45e et perd sept rangs par rapport à l’année précédente. L’organisation internationale reproche à l’Hexagone la constitution d’énormes pôles médiatiques détenu par des milliardaires, à l’image des rachats fracassants de Patrick Drahi, propriétaire de BFM TV et de RMC, qui a acquis Libération et L’Express en 2015, même année à laquelle le groupe Le Monde, propriété du trio Bergé-Niel-Pigasse, a racheté totalement le groupe Nouvel Observateur. L'attentat qui a coûté la vie aux journalistes de Charlie Hebdo est évidemment mentionné dans les analyses de l'ONG.

RSF s’inquiète d’autres situations en Europe, notamment dans les pays de l’Est. La Pologne observe une chute spectaculaire en perdant 29 places pour atterrir à la 47e position. Le gouvernement polonais avait en effet décidé en 2015 de reprendre en main la radio et la télévision publique en virant leurs principaux responsables.

Libérée du régime de Ben Ali, la presse tunisienne émerge

La Tunisie opère le changement le plus notable avec un bond de 30 places au classement de la liberté de la presse pour occuper la 96e position. Elle prend ainsi la tête du monde arabe en la matière. En 2010, sous la présidence de Zine Abidine Ben Ali, le pays se positionnait à la dramatique 180e place. La presse libre et indépendante était quasi inexistante tant le régime contrôlait les publications. Depuis la chute du dictateur en 2011, une génération de blogueurs et de journalistes a permis de voir émerger une nouvelle presse.

En 2012, la terre de la révolution du Jasmin est montée à la 133e place puis la 126e en 2015. RSF souligne que « la fragilisation de la situation de la situation sécuritaire dans le pays n’a pas impacté directement le processus de consolidation de la liberté d’information et de presse en Tunisie ». L’ONG constate aussi « une diminution du nombre de procès contre les professionnels des médias bien que la persistance d’interrogatoires policiers au prétexte fallacieux de la lutte contre le terrorisme reste inquiétante ».

Début avril, Mohsen Marzouk a décidé de poursuivre pour diffamation le site Inkyfada. Le directeur de campagne de Béji Caïd Essebsi, élu président en 2014, est cité dans l’affaire des Panama Papers par le site tunisien. Parmi les 109 médias associés à l’enquête coordonnée par le Consortium international des journalistes d’investigation, Inkyfada est le seul média à avoir fait l’objet d’une plainte.

Une année exceptionnelle de la censure

Pour la cinquième année consécutive, RSF lance mardi 3 mai une campagne pour dénoncer les grands censeurs du monde. Avec ironie, l'agence BETC a créé des visuels avec les chefs d'États qui célèbrent, un verre à la main, leur bilan exceptionnel en matière de censure. Vladimir Poutine (Russie), Recep Tayyip Erdogan (Turquie), Xi Jinping (Chine), Pierre Nkurunziza (Burundi) et Abdel Fatah al-Sissi (Egypte) font partie des douze personnages récompensés. Les affiches sont visibles dans les rues de Paris et sur les réseaux sociaux.