Finance éthique

La finance islamique en 2016 sera au service du développement des économies africaines

Rédigé par | Lundi 15 Février 2016 à 09:00

Sénégal, Afrique du Sud, Côte d’Ivoire, Nigeria, Niger, Tunisie, Maroc, Kenya, Ouganda... Sous l’impulsion de la Banque Islamique de développement, on a assisté à une accélération de la finance islamique en Afrique en 2015, qui doit se confirmer en 2016.



La Banque islamique de développement souhaite consacrer 7 milliards de dollars dans les cinq prochaines années en Afrique.
La Société islamique pour le développement du secteur privé (SID) estime dans un rapport mettant en exergue les opportunités et le potentiel de développement de la finance islamique en Afrique que la finance islamique est en mesure de mobiliser les ressources financières permettant d’apporter au continent une croissance durable. Alors que les déficits budgétaires ne cessent de croitre, la région a besoin de 93 milliards de dollars pour financer son développement. Il est important de rappeler ici que l’Afrique subsaharienne compte 17 % des personnes non bancarisées de la planète, le développement de la microfinance islamique pourrait dès lors offrir la possibilité d’encourager l’inclusion financière.

Aujourd’hui, avec l’usage de la finance islamique, les États africains souhaitent sortir de la spirale de la dette et opter pour une finance plus équitable leur assurant un développement durable. Le sociologue suisse Jean Ziegler rappelait que l’aide publique au développement fournie par les pays industriels du Nord aux 122 pays du tiers-monde s’est élevée à 88 milliards de dollars en 2012. Durant la même année, ces derniers ont cependant transféré aux banques du Nord une somme supérieure au service de la dette.

L'impulsion de la Banque islamique de développement

C’est dans le but d’éviter ces effets pervers et d’assurer un développement économique et social vertueux dans les 56 États membres de l’OCI que la Banque Islamique de Développement (BID) joue un rôle moteur sur le continent africain.

La BID souhaite en effet consacrer au financement d’infrastructures 7 milliards de dollars dans les cinq prochaines années en Afrique, ce qui représente près d’un tiers de son budget. Cet engagement s'est matérialisé par la signature d’un accord avec l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) qui a identifié dans son plan stratégique 2014-2021 le développement de la finance islamique comme étant un axe prioritaire.

Selon le Premier ministre ivoirien, Daniel Kablan Duncan, « la finance islamique est une opportunité pour les pays africains qui éprouvent des besoins de financement de leurs économies en marche vers l’émergence ». Le 20 novembre dernier, la Côte d’Ivoire émettait son premier sak souverain. L’opération a porté sur la collecte de près de 230 millions d’euros (150 milliards de FCFA), il s’agit d’une première tranche puisque la Côte d’Ivoire a l’intention de lever à nouveau la même somme par voie de sukuk d’ici à 2020.

Après le Sénégal, l’Afrique du Sud et la Côte d’Ivoire ; le Nigeria, le Niger, le Kenya et la Tunisie comptent en faire autant. A noter que, en Tunisie, une nouvelle banque islamique est prête à voir le jour : El Wifack Leasing a obtenu un accord de la banque centrale pour devenir une banque islamique à part entière, dotée d’un capital de 150 millions de dinars tunisiens, la Wifack Islamic Bank (WIB) deviendra après El Baraka et Zitouna la 3e banque islamique tunisienne.

En Ouganda, le Parlement a approuvé le projet de réforme de ses institutions financières et donné son accord pour l’introduction des services bancaires islamiques, un Conseil consultatif de la charia sera créé au sein de la banque centrale.

Au Kenya, le ministre des Finances Henry Rotich a déclaré que le Kenya allait émettre en 2017 son premier sak souverain dans le but de financer des projets d'infrastructures.

Le dynamisme marocain

Le journal L’Economiste rapporte qu’Abdellatif Jouahri, gouverneur de la Banque centrale du Maroc, a indiqué qu’une quinzaine d’institutions financières ont déposé des demandes d’agrément pour l’obtention de licences bancaires participatives. Parmi elles, on retrouve l’alliance BMCI et BNP Paribas Nejmah ainsi que BCP qui envisage un partenariat stratégique avec Guidance Group, groupe américain spécialisé dans l’investissement immobilier.

On peut également citer Al Baraka Bank, qui sera détenue par parts égales par le groupe Baraka et BMCE. Tout récemment Reuters a rapporté que le Crédit Immobilier et hôtelier (CIH Bank) a déposé une demande d’agrément dans le but de lancer une filiale dédiée à la finance islamique. Cette filiale doit être créée en partenariat avec la banque qatarie Qatar International Islamic Bank (QIIB), qui ambitionnait de s’implanter au Maroc depuis déjà plusieurs années et qui détiendra 40 % des parts de la future banque. Le lancement est attendu courant 2016, une fois les autorisations nécessaires obtenues.

Quant au développement du takaful, un projet de loi a été approuvé le 14 mai 2015 par le Conseil de gouvernement en vue de sa transmission au parlement.

Rappelons que le Maroc s’est doté d’un comité de conformité à la charia central destiné à encadrer le développement et à assurer la conformité du secteur participatif. Ce comité est composé de quinze membres : dix jurisconsultes et cinq experts financiers.



Ezzedine GHLAMALLAH est consultant, fondateur de SAAFI, cabinet de conseil en finance islamique et… En savoir plus sur cet auteur