Points de vue

Coupe du monde de football : au Qatar, un Maroc conquérant

Rédigé par Gianguglielmo Lozato | Lundi 5 Décembre 2022 à 17:25



© Facebook/Fédération marocaine de football
En tête des non-alignés du football international, on se bouscule pour occuper le trône des contestataires d’un ordre établi depuis tellement longtemps qu’il en apparaît figé. L’Arabie Saoudite a montré l’exemple en tout début de l’actuelle Coupe du monde au Qatar en battant héroïquement l’Argentine de sa majesté Lionel Messi après avoir été menée (score final 2-1).

La Tunisie a fait bonne figure en faisant mieux que résister face au Danemark, en triomphant de la France championne du monde en titre. Le Sénégal a renoué avec un passé glorieux en franchissant le premier tour malgré l’arrêt de sa présence en huitièmes de finale. Le Maroc, quant à lui, mérite qu’on s’attarde davantage dessus. C’est le plus régulier des trouble-fêtes, le plus fiable sur qui se concentrent tous les espoirs d’un peuple. Mais aussi des peuples arabes de façon générale.

Le rugissement des Lions de l’Atlas aux portes du désert arabique effraie des concurrents. Pour qui a suivi la campagne éliminatoire – ou, du moins, a pris la peine de le faire – les joueurs du royaume chérifien ont prouvé qu’ils n’étaient pas arrivés par hasard chez les Qataris. Seule nuance à apporter : une campagne de matchs de préparation positive atténuée sur la fin par une cinglante défaite face aux États-Unis (3-0) en juin dernier. Quand l’humilité rattrape l’orgueil excessif et le transforme en simple fierté. Car c’est ce qui est en train de se produire.

Un excellent premier tour

Le Maroc a fini premier de son groupe. Les Lions de l’Atlas ont effectué un quasi sans faute lors de la première phase du tournoi. Sans perdre un match, en encaissant un seul but au terme d’une rencontre extrêmement physique face à des Canadiens déchaînés. Les hommes du sélectionneur Walid Regragui sont donc les meilleurs premiers des huit groupes.

En accord avec les aspects comptables favorables, la manière revient à être signalée pour cette formation très technique proposant petits ponts et feintes de corps, buts esthétiques à l’image du travail accompli par Hakim Ziyech, passes longues et efficaces par l’intermédiaire du patron Achraf Hakimi, malice ou puissance avec Zakaria Aboukhlal, Sofiane Boufal ou Youssef En-Nesyri. Pour un jeu aussi dynamique que les prochains adversaires, les Espagnols.

Une confirmation pour une montée en puissance ?

En Russie, il y a quatre ans, les deux équipes s’étaient livrées à un superbe 2-2. Cette fois le score pourrait revenir à l’identique. L’Espagne n’est pas n’importe qui. Le Maroc non plus. Les deux nations possèdent des garçons qui prennent plaisir à jouer. La circulation de balle sera la carte maîtresse d’une partie où les Ibériques comme les Maghrébins auront à se méfier à tout instant. La clef du problème ? Côté marocain, continuer à miser sur l’investissement de Sofyan Amrabat, et chercher à bloquer les inspirations de Jordi Alba dans son couloir, finalement plus incisif dans la construction même si moins décisif qu’une star comme le vétéran Alvaro Morata.

Côté espagnol, l’issue reposerait sur des gens comme Pedro González López, dit Pedri, ou Sergio Busquets, ce qui concentrerait le centre des débats dans l’axe où les Marocains excellent aussi. Tant mieux pour les deux, pour le suspense, pour le beau jeu. L’équipe qui sortira vainqueur d’une telle opposition montera irrésistiblement en puissance.

La rencontre promet de susciter la passion. Le spectaculaire a de fortes chances de se présenter au rendez-vous. Une séance de tirs aux buts n’est pas à exclure. Ce qui serait plus en faveur du Maroc et de leur impressionnant réservoir de gardiens. Cette opposition entre les Rouges de l’Atlas et la Roja détient le secret d’une motivation conduisant à battre n’importe quel adversaire par la suite. Certes, la France voudra et aura les moyens de défendre son titre. L’Angleterre aimerait une deuxième couronne. Mais les deux équipes se reposent en fait prioritairement sur le talent des entraîneurs Didier Deschamps et Gareth Southgate à gérer dans les deux cas une formation où le milieu du terrain se présente comme un parent pauvre, un trou entre une défense centrale compétente et des attaquants redoutables. Ce qui contraste avec l’harmonie marocaine.

Qu’en est-il des autres formations ? Le Japon ? C’est une grande surprise qui a pour alliée la rapidité. Les compagnons du capitaine Hakimi ont l’habitude de ce rythme avec la CAN. A moins que la Croatie passent face aux Nippons ? Les compagnons de Hakim Ziyech connaissent déjà. Le Brésil et l’Argentine ? Bien placées pour le dernier carré, comme la France. Ce serait très dur mais plus irréalisable. Le Portugal ? C’est l’énigme imposée par son beau style de jeu efficace pour compenser les buts encaissés qui instaure un brouillard épaississant sur les pronostics. Un point commun avec les hommes du coach Regragui. Ces deux équipes ont du rouge et du vert sur leurs drapeaux respectifs. Mais le Maroc a une étoile qui se veut prémonitoire !

Mise à jour : Le Maroc a battu l'Espagne aux tirs aux buts. Les Lions de l'Atlas accèdent ainsi aux quarts de finale pour la première fois de leur histoire. Ils devront affronter le Portugal, qui a battu la Suisse (5-1).

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Gianguglielmo Lozato est professeur d'italien et auteur de recherches universitaires sur le football italien en tant que phénomène de société.

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