Points de vue

Chems-Eddine Hafiz : La fraternité doit être notre mot d’ordre, soyons à la hauteur !

#1AnAprès

Rédigé par Chems-Eddine Hafiz | Vendredi 15 Janvier 2016 à 19:00

Un an après les premiers attentats qui ont bouleversé la société française, que faut-il retenir de ces funestes événements et de leurs conséquences ? Quels messages promouvoir et que préconiser pour construire une société meilleure ? Le point sur Saphirnews avec Chems-Eddine Hafiz, avocat et vice-président du Conseil français du culte musulman (CFCM), représentant au sein de cette institution de la Grande Mosquée de Paris.



Chems-Eddine Hafiz est avocat et vice-président du Conseil français du culte musulman (CFCM). Il est l'auteur de « De quoi Zemmour est devenu le nom » (Éd. du Moment, 2010).
Les musulmans de France se trouvent à la croisée des chemins. Notre religion est mise à mal. Les autres composantes de la société française sont dubitatives sur les fondements de l’islam. Il leur a été inculqué à tort, depuis le 11 septembre 2001, qu’il s’agit d’une religion de sang, de désolation et de violences.

Est-ce que le Coran sécrète des violences ? Question lancinante qui va trouver malheureusement une réponse affirmative dans l’esprit de bon nombre, si un nouvel acte criminel se produit dans un avenir proche. Les spécialistes de la sécurité sont pessimistes et considèrent qu’une telle probabilité est envisageable.

Tournons-nous vers nos concitoyens non musulmans

Face à ces macabres prévisions, les musulmans doivent affirmer haut et fort leur désapprobation en dénonçant les agissements criminels perpétrés au nom de leur religion.

Au-delà de ces condamnations, il est impératif, dans un élan salvateur, qu’ils se tournent vers leurs concitoyens non musulmans, croyants ou non, athées, agnostiques, libres-penseurs, pour mettre à leur disposition, objectivement, les éléments de compréhension de notre religion.

Pour combattre les murs d’incompréhension et de rejet, voire de haine, qui s’élèvent inexorablement depuis les sanglants événements de janvier et de novembre derniers, les musulmans, confortés dans leur foi, doivent aller vers l’autre, lui tendre la main et dire que chacun-e, qui que nous soyons, appartient à la même communauté nationale.

Faire aimer l’excellence

Mais, auparavant, nous devons nous-mêmes prendre le temps de mieux connaître notre pratique religieuse pour la léguer à nos enfants et à nos proches, sans scories, dans son authenticité.

Est-ce que notre religion se limite aux actes rituels obligatoires ? Doit-on les effectuer avec ostentation au risque de mettre mal à l’aise notre voisin ? À ces deux questions, j’affirme que non !

Nous autres musulmans devons à chaque instant faire l’effort nécessaire pour parfaire au sein de la société française nos agissements les plus anodins. Dans nos rapports aux autres, nos actes doivent être guidés par l’intérêt général : servir autrui et être disponibles, désintéressés et sincères. Notre âme ne doit en aucune façon être noircie par des idées nocives, c’est ainsi que nous nous rapprocherons de notre Créateur. Purifier son âme est l’essence même du musulman.

Rejetons l’ignorance, faisons reposer l’éducation de nos enfants sur la connaissance, l’instruction et la bienveillance : faisons leur aimer l’excellence. Redoublons d’efforts pour que la composante musulmane de France devienne le modèle, l’exemple à suivre.

S’impliquer dans la vie de la cité

Mais en plus de leur pratique cultuelle, les musulmans doivent s’intégrer dans la société. Participer à la vie de la cité, s’impliquer et agir dans tous les domaines est également une obligation pour les musulmans. Il faut que nous nous réveillons, que nous agissions dans tous les secteurs ¬(professionnel, universitaire, artistique, social, politique…) pour montrer qu’effectivement les citoyens de confession musulmane ne sont pas ceux qu’on imagine ou ceux qu’on veut nous faire croire.

Soyons optimistes, la France des droits de l’homme, celle de la devise « Liberté, Égalité, Fraternité », saura reconnaître ses enfants musulmans, les protégera sans exclusive.

La solution est en partie entre les mains des musulmans

Ne tombons pas dans le piège grossier des extrémistes, ne répondons pas aux provocations des racistes et des islamophobes de tout poil. Bien au contraire. Ne rasons pas les murs et ne cédons en rien notre pratique religieuse. Mais pratiquons sans ostentation, discrètement pour éviter de gêner celles et ceux qui ne partagent pas notre religion.

Dans ces moments de grand trouble, la solution est en partie entre les mains des musulmans. Ils doivent relever le défi en modifiant coûte que coûte l’image détestable qui leur est injustement octroyée. Sans les musulmans, je crois que la France a une partie d’elle-même qui est amputée. La fraternité doit être notre mot d’ordre. Nous vivons dans un beau pays, généreux et hospitalier, alors soyons à la hauteur !