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Points de vue

Il n'y a plus de jasmin à Sousse...!

Rédigé par Youssef Chems | Vendredi 3 Juillet 2015 à 17:23

           


Il n'y a plus de jasmin à Sousse...!
Comment ne pas être transpercés par les coups terribles portés à cette Tunisie de jasmin et de douceur de vivre ? Aussi, faisons tout pour que la prochaine récolte soit aussi abondante que les précédentes et sauvons avec courage et ténacité ce que tous les pays de l’Orient à l’Occident envient à ce petit bout de terre baignée de soleil et de mer turquoise.

Stoppons net les angélismes, les compassions gémissantes et les sensibleries des défilés blancs ou rouges du sang de nos frères. Que nos dirigeants sèchent leurs larmes saugrenues et commencent par offrir d’eux et de leurs services une image déterminée, volontaire et décidée une fois pour toute à « terroriser les terroristes ». Devenez hommes d’Etat, chefs de guerre, pas des analystes ou des consultants sans ossature, ni même des géopoliticiens à l’encre pâle et aux décisions toujours en retard d’une kalach. Soyez les Churchill ou les De gaulle du XXI siècle, qui eux n’ont pas hésité. Redressez vos mentons, gonflez vos poitrines et insufflez à votre peuple les forces nécessaires et, sans délai, trouvez donc les moyens militaires, policiers ou politiques d’éradiquer ce venin sans âme ni religion qui nous arrive des suds désertiques. Vous êtes là pour ça, non ? Ou alors laissez donc vos sièges à ceux qui savent, à ceux qui veulent, à ceux qui peuvent…

A quand une coalition contre Daesh ?

« Quand je veux, où je veux, comme je veux »... cela ne vous rappelle rien ? Les Algériens, eux, s’en souviennent parfaitement. L’OAS utilisait en 1962 les mêmes méthodes : attentats individuels et marquants, avec des dates bien choisies et des cibles symboles des pouvoirs politiques, civils ou économiques, pas d’affrontement armé mais des militants incontrôlables noyés dans une population apeurée et soumise sinon complice. Le FLN, de son côté, en faisait tout autant et pourtant le général Massu l’a effacé de la kasbah en quelques semaines.

En Tunisie ou demain en Algérie ou au Maroc, Daesh cible ce qui lui semble être les croisés occidentaux et les apostats maghrébins avec une autorité centrale au Moyen-Orient qui coordonne les actions et veut terroriser les populations, les asservir par leurs foudres spectaculaires, sanguinaires et barbares. Il va, avec un machiavélisme pervers et efficace, prendre la main, imposer sa force et provoquer des représailles qui obligeront les forces occidentales à s’engager.

En excitant les réactions antimusulmanes, ils vont installer un contre-pouvoir, une « cinquième colonne » sur laquelle ils pourront s’adosser. La France est particulièrement bien choisie car elle loge la plus conséquente communauté musulmane de tous les pays occidentaux, avec une armée et des présidents qui se sont laissés prendre au piège en devenant les instruments de cette pieuvre de sables. En Tunisie, il lui sera encore plus facile de mettre à genoux une économie déjà bien mal en point. Ce Printemps arabe haï parce que démocratique est devenu leur cible récurrente alors que les responsables locaux en sont encore à croire que les jihadistes viennent de Syrie ou de Libye alors qu’ils sont tout simplement de Kairouan ou de Djerba. Seules une coalition arabe, sunnite-chiite pourra ébranler Daesh. Et ce n’est pas pour demain.

Des acquis démocratiques fragiles

Daesh ne prendra jamais les villes tunisiennes comme en Libye ou en Syrie, mais l’opinion pourrait basculer sous les attentats et ressusciter les pratiques policières benalistes. Les anciens dignitaires de Nidaa Tounes sont déjà là avec quelques convoitises. C’en serait bien fini des acquis démocratiques et des libertés issues de la révolution. La peur de l’Etat Islamique peut faire revivre les anciens démons qui pour le moment se terrent en observant tout ce chaos avec quelques envies refoulées.

Après le Bardo, tous ces dirigeants trop tendres auraient pu anticiper. Un attentat réussi en aimante d’autres, on le sait parfaitement et le danger réel n’a pas été estimé à sa juste mesure. Une bombe, une rafale et on retourne à la plage, ce n’est pas pour nous. Daesh veut punir le pays et ses ententes d’un jour et a très bien compris qu’il fallait toucher directement les intérêts occidentaux, si possible sur le sol même de la mère patrie. Des combats ont lieu chaque jour dans le sud, et les forces tunisiennes font ce qu’elles peuvent. Le monstre est partout, peut-être votre voisin ou le jeune étudiant bien rangé qui ouvre votre porte, passe muraille prêt à mordre.

Ils veulent mettre l’Europe à genoux, avec un shahid par ci, un désespéré par là. Les candidats ne manquent pas et les houris aux yeux d’almée attendent là-bas, en haut près d’Allah. Ces attaques ne sont pas le fait du hasard, et un homme seul parvient à jeter dans les rues une cohorte de chefs d’Etat en larmes devant les paparazzi convoqués par les services de presse. Ils ont ainsi fêté leur première année d’existence en tant qu’Etat Islamique, proclamé le 29 juin 2014.

Il n'y a plus de jasmin à Sousse...!
La Tunisie est la terre qui a fait naître le plus de jihadistes et de groupes islamistes entraînés et performants. Près de 4 000, c’est énorme. Et ils sont tous prêts a mourir. Sousse répond sans aucun doute aux différentes représailles réussies par les forces tunisiennes. Désormais, Daesh tente de déplacer ses actions des montagnes du sud aux centres des villes et des hauts lieux du tourisme. Ils profitent avec intelligence d’une situation de déséquilibre social suscité par une économie exsangue que le Ramadan exacerbe. Les lois antiterroristes existent depuis 2003 après Djerba et le pouvoir n’a pas pris avec assez d’autorité la dimension de la situation.

Incompétence ou laxisme coupable. Les métastases de l’islamo-terrorisme courent partout et gangrènent le tissu social avec, parfois, un romantisme sinistre qui en séduit plus d’un. Des homme capables doivent se lever pour mettre à terre ces jihadistes plus mafieux et voyous que combattants d’Allah, mais quel Allah ? Il faudrait encore connaître leur lecture du Saint Coran, à mille lieux des écritures saintes de respectables musulmans. J’ai encore en mémoire les paroles de la ministre du Tourisme après-Bardo : « Nous allons tout faire et nous en avons les moyens. La Tunisie est un pays sûr et beau, comptez sur nos engagements, soyez sans crainte. » Nous voyons le résultat. Elle était en larmes quelques heures après l’attentat de l’hôtel Marhaba. Non Madame, vous n’êtes pas digne de votre fonction, vous saviez les risques latents, et pleurer devant le monde entier ne confirme que votre faiblesse et une compassion qui n’a d’égale que votre incompétence. Nous acceptons votre démission, faites vite. Le pays a besoin d’hommes et de femmes sérieux et volontaires, pas de larmes de circonstances. Gardez-les pour vous, nous n’en voulons pas.

L'unité pour Tuer Daesh

Daesh, une stratégie géopolitique sanglante et réfléchie. Ils veulent avant tout tester les capacités des Etats à s’opposer à eux et mesurer les impacts de sympathie dans des populations souvent déçues par des printemps trompeurs qui n’ont rien changé à leur quotidien, faits de pauvreté et de souffrances héritées de passés écrasants. Ils trouvent des alliés involontaires mais quotidiens parmi les dirigeants de leur propre pays qui entretiennent, dans une ignorance coupable, leurs propres citoyens. Une éducation peu ciblée qui fabrique à la chaîne des diplômés-chômeurs, médias laxistes, échecs économiques à répétition, incapacité de lutter contre le terrorisme, aucune perspective d’avenir. Les rentes touristiques sont laminées par un seul de leurs hommes avec des retombées médiatiques universelles. Ils veulent prouver qu’ils sont intouchables et qu’ils peuvent nous terroriser à leur guise tout en détruisant les mailles économiques des pays sur lesquels ils jettent leurs troupes.

IL faut « tuer » Daesh ! Les efforts d’un pays seul ne suffiront pas, une coalition est nécessaire avec des moyens lourds et sérieux et cela prendra des années. Il ne s’agit surtout pas d’une simple affaire de police locale, les déclarations relayées par des médias aux ordres des pouvoirs vont devoir ajuster leurs tirs et tenir enfin compte des situations économiques et géopolitiques gravissimes actuelles, prétextes et ouvertures confortables pour les « hashishin » bourrés d’amphétamine ou de coke pure dont ils ne manquent pas. Il faut surtout ne pas banaliser le malheur, jusqu’à s’y habituer.

Cette situation n’est pas éternelle, elle aura un terme sanglant ou politique. Ne pas oublier mais résister et obliger nos dirigeants à tremper leur quotidien dans les sangs de nos « assassinés » pour qu’ils se décident enfin à donner la leçon définitive à cette bande de voyous trop soutenus par ceux que l’on se refuse à nommer ouvertement. Offrons nos poitrines dans une résistance ferme et sans faille. Mobilisons toute la société civile en un bouclier de courage et de fermeté. Préparons des politiques de rassemblement national et de consensus patriote. Efforçons nous de redresser et d’inventer des économies qui fassent vivre avec décence nos peuples appauvris qui travail aidant ne se jetteront plus dans les bras des chimères jihadistes faute de mieux. Redonnons à nos élites politiques une crédibilité qui nous fasse croire en un avenir plus doux. Que leur image écornée se redresse et donne le courage d’entreprendre et de résister avec une dureté et une fermeté exemplaire. Sans oublier que lutter contre le terrorisme n’est pas qu’une affaire de répression et de basse police, mais davantage de restauration des valeurs essentielles de morale, de religion et d’économie bien maîtrisée.

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Youssef Chems est écrivain.





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