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Voyages : sans visa, la moitié du monde est interdite à la majorité des citoyens des pays musulmans

Rédigé par Lionel Lemonier | Lundi 31 Janvier 2022 à 13:45

Les inégalités en matière de liberté de circulation pour les personnes détenant un passeport se font croissantes. Elles sont particulièrement visibles pour les ressortissants des pays du Sud dont un nombre important font partie de l'Organisation de la coopération islamique (OCI).



Les derniers résultats du Henley Passport Index 2022, qui classe chaque année les passeports les plus « puissants », indiquent une inégalité croissante en matière de liberté de circulation pour les personnes bénéficiant d'un passeport. Alors que les citoyens français peuvent voyager dans 188 pays dans le monde sans visa, 91 % des ressortissants des pays membres de l’Organisation de la coopération islamique (OCI) se voient refuser cette possibilité pour la moitié des pays du monde et plus.

Seuls les habitants de cinq pays de l’OCI, qui compte 57 Etats membres avec la Palestine, peuvent voyager sans visa dans plus de 110 des 197 pays reconnus officiellement par l’Organisation des Nations Unies : la Malaisie (179), les Emirats Arabes Unis (175), le sultanat de Brunei (166), l’Albanie (114) et la Turquie (110), rapporte Salaam Getaway. En parallèle, les citoyens des pays les mieux placés dans l'index, le Japon et Singapour, peuvent partir à destination de 192 pays sans visa.

Le fossé plus grand entre les pays du Nord et du Sud

Les possibilités de voyager sans visa se sont accrues pour les ressortissants des pays les plus riches, atteignant des records en 2021, élargissant le gouffre avec les pays les plus pauvres, « alors même que les niveaux de liberté de voyage ont considérablement augmenté au cours des deux dernières décennies », note Henley & Partners. C’est particulièrement visible pour la plupart des 57 pays membres de l’OCI.

Après le Japon et Singapour, les ressortissants des pays comme l'Allemagne et la Corée du Sud, peuvent entrer sans visa dans 190 pays autour du monde ; 164 de plus que pour les Afghans dont le pays se retrouve dans les tréfonds du classement, au 111e rang, avec 26 destinations possibles sans visa.

Les pays de l’OCI sont majoritaires dans le bas du classement puisque l’on en compte 13 sur les 18, classés respectivement du 101e au 111ee et dernier rang. Les Iraniens et les Libanais peuvent voyager sans visa respectivement dans 42 et 41 pays, alors que les citoyens des pays situés aux derniers rangs comme le Yémen, le Pakistan, la Syrie, l’Iraq et l’Afghanistan n'ont la possibilité de rendre sans visa que dans 33 pays ou moins.

Le passeport, un instrument à fort impact sur les inégalités sociales

L'indice Henley Passport répertorie toutes les destinations vers lesquelles les détenteurs d’un passeport peuvent se rendre sans visa. Il est construit à partir des données de l’Association du transport aérien international (IATA) et mis à jour par les experts de Henley & Partners, une entreprise de conseil en investissement immobilier. Les inégalités ont été « mises en évidence à la fin de l'année dernière par la série de restrictions punitives liées au variant Omicron imposées à des pays principalement africains », au point où le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a parlé de mesure s'apparentant à un « apartheid des voyages ».

« Les passeports et les visas comptent parmi les instruments les plus importants ayant un impact sur les inégalités sociales dans le monde, car ils déterminent les possibilités de mobilité internationale », signifie Christian H. Kaelin, président de Henley & Partners. « Les frontières à l'intérieur desquelles nous sommes nés, et les documents que nous avons le droit de détenir, ne sont pas moins arbitraires que la couleur de notre peau. Les États les plus riches doivent encourager une migration intérieure positive afin de contribuer à la redistribution et au rééquilibrage des ressources humaines et matérielles dans le monde. »

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