Société

Viol, harcèlement de rue, outrage sexiste... Que stipule la nouvelle loi contre les violences sexistes et sexuelles ?

Rédigé par Lina Farelli | Jeudi 2 Aout 2018 à 18:50



Après plusieurs mois de débat, le Parlement a définitivement adopté, dans la soirée du mercredi 1er août, le projet de loi contre les violences sexistes et sexuelles porté par la secrétaire d’État à l’Egalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa. Celle-ci a accueilli cette victoire comme une concrétisation « des engagements de campagne très forts du président de la République, dans le cadre de la grande cause de son quinquennat ».

La nouvelle loi entend faciliter les condamnations et réprimer plus fermement les viols, abus et harcèlements sexuels sur les mineurs, avec une peine pouvant aller jusqu’à 10 ans de prison pour acte sexuel sur mineur de moins de 15 ans assorti d'une amende de 150 000 euros. Elle établit également le délai de prescription de 20 à 30 ans à partir de la majorité des victimes de violences sexuelles.

Si les faits sont commis sur un mineur de moins de 15 ans, « la contrainte morale ou la surprise sont caractérisées par l’abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes ». Cette contrainte morale peut résulter « de la différence d’âge existant entre la victime et l’auteur des faits et de l’autorité de droit ou de fait que celui-ci exerce sur la victime, cette autorité de fait pouvant être caractérisée par une différence d’âge significative entre la victime mineure et l’auteur majeur ».

L'outrage sexiste punie, pas le « regard appuyé »

La loi sanctionne également les harcèlements de rue avec l’infraction d'« outrage sexiste » punissable d’une amende allant de 90 à 750 euros, 3 000 euros si le juge établit une circonstance aggravante comme l'atteinte commise en réunion, sur des personnes vulnérables ou dans les transports en commun. Cette infraction est définie comme suit : « imposer à une personne tout propos ou comportement à connotation sexuelle ou sexiste qui soit porte atteinte à sa dignité en raison de son caractère dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. »

Contrairement aux nombreux commentaires relayés sur les réseaux sociaux, la loi ne stipule pas qu’un « regard appuyé » puisse valoir à son auteur une amende d’au moins 90 euros. « Le projet de loi ne vise pas à sanctionner la drague, les regards ou les compliments. Il sanctionne les remarques à connotation sexiste et sexuelle, l’intimidation, se faire suivre, se voir demander vingt fois son numéro de téléphone », a rappelé Marlène Schiappa mercredi 1er août, dénonçant une « fake news » sur le sujet.

Pas de présomption de non-consentement inscrite dans la loi

Le seuil d’âge de non-consentement, qui aurait dû criminaliser les rapports sexuels entre adultes et mineurs de moins de 15 ans, ne figure en revanche pas dans le texte. Le non-consentement devra toujours être prouvé sans quoi l’auteur ne sera jugé que pour délit sexuel et non pour viol. La « présomption de non-consentement », très attendue par les associations de défense des droits des femmes et des enfants, risquait d'être rejetée par le Conseil constitutionnel, a fait savoir le gouvernement.

Déçue de l’issue de la nouvelle loi, Michèle Creoff, vice-présidente du Conseil national de la protection de l’enfance, prévoit déjà une « cacophonie judiciaire » au moment où le juge devra établir s’il y a eu consentement ou non, qui aurait pu être évitée si le gouvernement n’avait pas reculé sur la « présomption de non-consentement » et l’« atteinte sexuelle avec pénétration ».

Les premières amendes seront données aux contrevenants dès l'automne.

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