Société

Mardi gras : et si on sortait en niqab ?

Rédigé par | Mardi 12 Février 2013 à 00:37



« Le visage se vit à visage découvert dans tous les lieux publics. » C’est le message fort de la loi du 11 octobre 2010, entrée en vigueur le 12 avril 2011 qui, dans son article premier, rappelle que « nul ne peut, dans l’espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ». Même pour Mardi gras ?

Cette fête de tradition chrétienne, qui marque le début du Carême, est fixée au mardi 12 février en cette année 2013. Durant ce jour, il était de coutume, pour le dernier des jours gras, de consommer de la viande (manger « gras »), avant de s’en abstenir pendant la période de jeûne de 40 jours qui précède Pâques.

Avec le temps, Mardi gras a perdu de son sens religieux et est désormais surtout associé au carnaval pendant lequel petits et grands sortent dans les rues déguisés ou masqués.

Mardi gras, une exception à une loi d'exception

La loi du 11 avril 2011 menace-t-elle alors cette fête ? Non, comme stipule l’article 2 : « L’interdiction édictée à l’article premier ne s’applique pas (…) si elle s’inscrit dans le cadre de fêtes ou de manifestations artistiques ou traditionnelles. » Dans le cas contraire, les contrevenants peuvent faire l’objet d’une contravention d’un montant maximal de 150 €.

Dans les faits, ce ne sont pas les Batman, Dark Vador et autres personnages déguisés qui sont menacés par la police dans les rues mais bien les femmes portant le voile intégral (niqab) dans l’espace public, faisant dire à de nombreux musulmans que la loi porte atteinte à la liberté de culte.

Cependant, si l'on tient compte de l’article 2 de la loi, il semble que rien n’empêche une femme – ni même un homme ! – de porter le niqab en invoquant Mardi gras comme raison pour continuer son chemin et ne pas se voir dresser une amende. Pour celles qui le portent par conviction religieuse, considérer leur voile comme un déguisement n’est qu’affront. Mais si Mardi gras, mais également Halloween, peut les aider à économiser 150 € et leur éviter un éventuel « stage de citoyenneté », ce serait toujours un bon plan de pris ! A moins de vouloir compter sur l'homme d'affaires Rachid Nekkaz pour payer les prunes.

Rappelons que la législation ne concerne en effet qu’une poignée de femmes en France, considérée par la plupart des musulmans comme liberticide et disproportionnée. Le Conseil de l'Europe avait critiqué, en juillet 2012, une mesure restrictive qui renforce la défiance de la société envers les musulmans et à laquelle « les gouvernements devraient renoncer ».

Que l'on soit pour ou contre le niqab, et si on sortait tous voilés pour manifester contre la loi ? L'idée de sortir tous et toutes paré(e)s d'un voile intégral en ce jour de Mardi gras en fait déjà sourire plus d'un, nettement moins pour les partisans farouches de la loi, mais pourrait bien germer dans quelques esprits convaincus que la liberté d'expression, de conviction et de conscience ne saurait être bafouée par une loi d'exception...



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur