Société

Malgré les excuses de Michel Houellebecq, l’Union des mosquées de France ne recule pas, voici pourquoi

Rédigé par Lina Farelli | Lundi 5 Juin 2023 à 07:45

Après les excuses présentées aux musulmans de France par Michel Houellebecq dans son dernier livre, l’Union des mosquées de France (UMF) avait émis des conditions à l’écrivain en vue d’un éventuel retrait de sa plainte. Il n’en est finalement rien. Explications.



© Mariusz Kubik
Quelques mois dans ma vie a reçu un accueil des plus mitigés en France. Le dernier livre de Michel Houellebecq paru en mai n’est pas prêt d’obtenir le même succès que ses précédents ouvrages. Il fait néanmoins parler de lui en raison, entre autres, des excuses formulées par l’écrivain aux musulmans de France pour ses propos tenus à leur encontre au cours d’un entretien paru dans la revue Front Populaire en novembre 2022. Excuses sincères ou pas, l’Union des mosquées de France (UMF), qui avait porté plainte contre Michel Houellebecq, avait salué, dans une récente lettre ouverte, une démarche « honorable mais incomplète vu la gravité de la menace ».

La fédération musulmane pouvait tout de même envisager la possibilité d’abandonner la plainte si l’écrivain clarifiait davantage sa position sur la théorie du « grand remplacement » ou encore s’il entamait « une procédure formelle et plus offensive pour faire cesser la diffusion du numéro du Front Populaire ». A l’issue de son assemblée générale qui s’est tenue dimanche 4 juin, l’UMF estime finalement que ce n’est « pas rendre service à la collectivité » que d’abandonner une procédure « qui vise à faire condamner non pas les personnes mais les faits qui leur sont reprochés ».

Des questions graves « passées sous silence »

« Certes, notre foi nous enjoint d’être bienveillants avec celui qui reconnaît ses torts et exprime ses remords. Cependant, sans préjuger de l’appréciation par la justice des faits que nous lui reprochons, nous avons aussi le devoir de protéger notre collectivité par le recours à la justice pour dénoncer des propos que nous estimons dangereux », a-t-elle fait savoir.

« Autant pour le passage dans lequel il fait le lien entre islam et délinquance, il a fini par le juger "faux et stupide" avant de le rectifier et "de présenter ses excuses à tous les musulmans qu’il a pu offenser" », indique l’UMF. Mais s’agissant du passage dans lequel l’écrivain parle de « Bataclan à l’envers », « il n’est pas sûr que l’explication ainsi que la rectification qu’il en donne soient de nature à rassurer les musulmans de France ».

« Selon lui, ceux qui ont interprété ce passage comme "un appel à des attentats dirigés contre les musulmans" seraient des individus particulièrement "venimeux et faux". Sur ce point qui est au cœur de la plainte de l’UMF, nous pensons qu’il se trompe lourdement ou qu’il tente d’en minimiser la portée », affirme une fédération déçue d’un livre où sa démarche d’explication tient sur « à peine une dizaine de pages noyées dans un amas de récits pornographiques ». « Nous estimons que de nombreuses questions graves ont été passées sous silence. Parmi elles, son soutien à la dangereuse et nauséabonde théorie du grand remplacement qui nous rappelle des périodes sombres de l’histoire de notre pays », affirme-t-elle.

Se référant aux attentats de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, que personne ne souhaite voir se reproduire, l’UMF réaffirme donc le maintien de sa plainte contre Michel Houellebecq mais aussi Michel Onfray et la direction de Front populaire : « Il ne faut pas sous-estimer la dangerosité et la menace que représentent certaines déclarations. Ceux qui les tiennent ou continuent à les diffuser doivent prendre la mesure de la lourde responsabilité qui est la leur. »

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