Sur le vif

La police de Toulouse accusée de faire un ciblage discriminant envers les élèves absents pour l’Aïd

Rédigé par Lionel Lemonier | Vendredi 19 Mai 2023 à 15:00



Cette année, l’Aïd el-Fitr intervenait le 21 avril. Quelques jours plus tard, le 26 avril, une centaine d’établissements scolaires de Toulouse et de ses environs, en Haute-Garonne, ont reçu un mail émanant des renseignements territoriaux – les services locaux du SCRT, le service de renseignement de la Direction centrale de la sécurité publique (DCSP) du ministère de l’Intérieur. Il s’agissait, selon La Dépêche, de renseigner le taux d’absentéisme des élèves le jour actant fin du Ramadan.

« A la demande des services de renseignement et pour effectuer un bilan sur cette journée, nous vous sollicitons pour connaître le pourcentage d’absentéisme le vendredi 21 avril, lors de la fête de l’Aïd. Merci de nous faire un retour rapidement », précisait le courriel envoyé par deux correspondants sécurité-école du commissariat situé à Bagatelle, un quartier populaire de Toulouse. La demande a fait réagir du côté des syndicats d’enseignants et des associations de défense des droits humains.

Peu de directeurs ont répondu à la requête, dénoncée comme du « fichage religieux ». « Beaucoup de collègues se sont émus de cette enquête. C’est très inquiétant que les renseignements territoriaux assimilent une pratique religieuse, une fête musulmane très populaire, à une question de sécurité intérieure. En quoi cela concerne les renseignements territoriaux ? », a indiqué Marie-Cécile Perillat, co-secrétaire générale du syndicat départemental de la Fédération syndicale unitaire (FSU). Et de préciser à France 3 que le syndicat vérifie s’il s’agit d’une directive nationale ou d’une initiative locale.

Le recteur de l’académie de Toulouse dément, de son côté, toute implication de la part de l’Éducation nationale. « En aucun cas, nous ne menons des enquêtes de la sorte, a déclaré Mostafa Fourar. Si quelqu’un a pris cette initiative, l’Éducation nationale n’y est absolument pas associée. Dès que les chefs d’établissement et directeurs d’école nous ont informés de cette requête, consigne a été évidemment donnée de ne pas y répondre. »

À la Ligue des droits de l’homme (LDH) de Haute-Garonne, on s’insurge. « Ces personnes ont tout faux en termes de respect des droits fondamentaux, explique Jean-François Mignard, son président. Faut-il rappeler aux fonctionnaires que la liberté de conscience et la liberté de culte sont garanties par l’État ? Ce n’est pas quelque chose que l’on demande aux personnes de confession chrétienne ou juive par exemple. Il s’agit d’un ciblage discriminant. S’il s’avère qu’il y a bien objet à poursuivre, il n’est pas du tout exclu qu’on ne le fera pas ». Pour la LDH en effet, ces requêtes pourraient bien tomber sous le coup de la loi.

Mise à jour lundi 22 mai 2023 : Le ministère de l’Intérieur dément tout fichage des élèves, sa réaction.