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Australie : après l'attaque à Sydney, les réactions fermes des imams et figures musulmanes face à l'horreur

Rédigé par Lina Farelli | Lundi 15 Décembre 2025

Les organisations musulmanes d'Australie ont unanimement et fermement condamné l'attaque terroriste visant la communauté juive à Sydney dimanche 14 décembre. Des responsables musulmans de la ville ont même annoncé leur refus d'accomplir tout rite funéraire sur un des assaillants abattu.



L'Australie a vécu, dimanche 14 décembre, la pire tuerie de masse depuis 1996. Une attaque visant la communauté juive s'est produite dimanche 14 décembre sur la plage de Bondi, à Sydney, où était organisé un rassemblement festif à l’occasion des célébrations de Hanoukka. Le bilan fait état d'au moins 16 morts et de 42 blessés, selon les autorités. Le caractère terroriste ne fait pas l’ombre d’un doute pour les autorités, qui ont décidé de mettre les drapeaux en berne.

L’attaque a été unanimement condamnée en Australie et à l’étranger. « La France exprime ses pensées pour les victimes, les blessés et leurs proches. Elle partage la douleur du peuple australien et continuera de lutter sans faiblesse contre la haine antisémite qui nous meurtrit tous, partout où elle frappe », a notamment réagi le président français Emmanuel Macron. Un Français installé en Australie se trouve aussi parmi les victimes, a informé le Quai d'Orsay. Le Parquet national antiterroriste (PNAT) a ouvert une enquête pour « assassinat en relation avec une entreprise terroriste » et « tentative d’assassinats en relation avec une entreprise terroriste ».

L’attaque a été perpétrée par un père et son fils, âgés respectivement de 50 et de 24 ans. Le premier, qui vit en Australie depuis 1998 et titulaire d’un permis de port d’armes, a été abattu tandis que le second, citoyen australien, a été grièvement blessé. Leurs motivations exactes restent encore connues. Selon la chaîne australienne ABC, les deux hommes sont soupçonnés d’avoir prêté allégeance à l’organisation Etat islamique (Daesh). L’épouse et la mère des deux assaillants, qui lui ont dit qu'ils étaient partis pêcher dans la région, s’est déclarée sous le choc en apprenant l’affaire.

Des Australiens musulmans choqués

Le bilan aurait pu être plus lourd sans l’intervention d’Ahmed Al-Ahmed, 43 ans. Ce vendeur de fruits de confession musulmane, aujourd’hui salué en « héros », a désarmé seul un des tireurs. Selon des images prises par un témoin, il a surpris un assaillant par derrière et s’est emparé de son fusil avant de mettre en joue, le forçant à se replier. Ahmed Al-Ahmed, blessé par balles dans l’attaque sans que ses jours ne soient en danger, est félicité de tous pour son geste, y compris par le Premier ministre Anthony Albanese. Une cagnotte en ligne ouverte en sa faveur affiche d’ores et déjà plus de 1,3 millions de dollars australiens (près de 750 000 euros).

« Le Conseil national des imams australiens (ANIC), le Conseil des imams de Nouvelle-Galles du Sud et la communauté musulmane australienne condamnent sans équivoque les fusillades odieuses de Bondi. Ces actes de violence et ces crimes n'ont pas leur place dans notre société. Les responsables doivent être tenus pleinement responsables et punis avec toute la sévérité de la loi », a fait savoir l’ANIC dans un communiqué.

« Nous reconnaissons la douleur, la peur et la détresse ressenties au sein de la communauté et nous exprimons notre profonde compassion et notre soutien à toutes les personnes endeuillées. Nous encourageons la communauté à rester vigilante, à faire preuve de prudence et à s'entraider durant cette période difficile », a ajouté l’organisation. « C’est le moment pour tous les Australiens, y compris la communauté musulmane australienne, de s’unir dans la compassion et la solidarité, de rejeter la violence sous toutes ses formes et d’affirmer notre engagement commun envers l’harmonie sociale et la sécurité de tous les Australiens. »

Plusieurs responsables musulmans de Sydney ont indiqué à la presse leur refus d’accomplir les rites funéraires pour l’assaillant, estimant que lui comme son fils ont commis un acte bien trop grave que l’islam réprouve. « Nous ne les considérons pas comme faisant partie de l'islam ou comme des musulmans », a ainsi réagi une des figures musulmanes de Sydney, Jamal Rifi. Cette décision n’est pas inédite : le médecin a rappelé auprès du site d’information News.com.au avoir fait ce même choix en 2014 après la prise d’otages au Lindt Cafe, à Sydney, qui avait conduit à la mort de deux personnes et de l’assaillant. « Nous avions refusé de recevoir sa dépouille et nous nous étions abstenus d'accomplir les rites funéraires. Nous avions également refusé de l'accepter dans la section musulmane du cimetière de Rookwood. Et nous agirons exactement de même avec ces personnes », a-t-il précisé.

Au lendemain de l'attaque, des milliers de personnes se sont rendues sur les lieux du drame pour rendre hommage aux victimes. L’attaque à Sydney est la pire tuerie de masse depuis le massacre de Port Arthur, en Tasmanie, pour lequel l’assaillant, Martin Bryant, a été condamné pour meurtres à la prison à perpétuité. La fusillade avait alors fait 35 morts, conduisant alors l’Australie à durcir sa législation sur les armes à feu. Le gouvernement actuel a d’ores et déjà approuvé la révision de la législation, bien qu’elle soit déjà l’une des plus strictes du monde.

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