Société

Au cinéma, le jeu à trois des juifs, des musulmans et de la République

Rédigé par Margot Le Calvez | Mercredi 20 Décembre 2017 à 08:30

Le 11 octobre dernier sortait en salles le film Coexister, la nouvelle comédie de Fabrice Éboué, mettant en scène un groupe musical et choral composé d’un prêtre, d’un imam et d’un rabbin. Comment parle-t-on des relations judéo-musulmanes dans les films français ? Explications avec Frédéric Abecassis, maître de conférence en histoire contemporaine à l’ENS Lyon.



Dans « Coexister », la comédie de Fabrice Éboué sortie en salles en octobre 2017, les rôles principaux sont tenus par Jonathan Cohen, Guillaume de Tonquédec et Ramzy Bédia, qui incarnent respectivement un rabbin, un imam et un prêtre. (photo © Europacorp)

Saphirnews : Comment traite-t-on les relations judéo-musulmanes au cinéma ?

Frédéric Abecassis : Il y a eu beaucoup de films de truands, comme Le Grand Pardon, avec Roger Hanin, ou encore, L’Union sacrée, qui met en scène un tandem de flics juif et musulman. Ces films montrent que ceux qui continuent à avoir des idées communautaires sont des mafieux. Ils veulent inciter à s’intégrer. Le fléau, ce sont les racistes et pour les contrecarrer on illustre une vraie entente entre les juifs et les musulmans.

Mais le cinéma a aussi une volonté de montrer que la porosité entre les religions n’est pas systématique. Ce thème a également été traité dans des films de guerre, comme Indigènes, avec Roshdy Zem et Jamel Debbouze, qui rend hommage aux militaires de l’Afrique du Nord pendant la guerre d’Algérie. Dans ce film, un sous-officier français d’Algérie est visiblement dans le déni de ses origines, puisqu’on comprend que sa mère est juive berbère. Les musulmans sont de la chair à canon et les juifs sont officiers.


On rit aussi beaucoup de ces relations…

Frédéric Abecassis : L’humour a toujours été présent dans ces films. Qu’est-ce qu’on a fait au Bon Dieu ? est très inspiré des films de Louis de Funès. Le danger avec l’humour est que au lieu de jouer sur les stéréotypes, il ne fait que les entretenir. Par exemple, le premier La Vérité si je mens est rempli de stéréotypes. C’est d’ailleurs comme cela qu’a été créé Le Chat du rabbin, de Joann Sfar qui en avait assez que les juifs soient représentés comme dans La Vérité si je mens.


Quel est le message commun dans tous ces films ?

Frédéric Abecassis : On croit que ces films renvoient dos à dos les juifs et les musulmans. Mais c’est un jeu qui se joue à trois : il y a toujours un rapport à la République. Le juif reste juif et le musulman reste musulman, mais ils sont tous des « bons Français », bien que marqués par leur communauté religieuse.