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Monde

Vers un nouveau Rwanda en Birmanie, Hollande interpellé

#Rohingyas

Rédigé par | Mercredi 17 Juillet 2013 à 06:00

           

Le candidat Hollande s’était engagé à refonder les relations extérieures de la France sur les droits de l’Homme. Rien de tel n’est envisagé sérieusement pour la Birmanie. La visite officielle du président Thein Sein en France les 17 et 18 juillet représente, pour les militants des droits de l’Homme, une opportunité pour interpeller le chef de l’Etat et sensibiliser les médias et, à travers eux, l’opinion publique sur le sort des minorités, particulièrement musulmanes, en Birmanie.



Vers un nouveau Rwanda en Birmanie, Hollande interpellé
La Birmanie est sur la voie de la normalisation complète depuis plusieurs mois au grand dam des organisations internationales de défense des droits de l’Homme. Après le Premier ministre britannique, c'est au tour de François Hollande d'accueillir à bras ouverts son homologue birman, Thein Sein, lors de sa visite officielle en France mercredi 17 et jeudi 18 juillet en dépit des violations quotidiennes des droits humains constatées dans le pays d'Asie du sud-est à l'égard des minorités ethniques.

C'est dans ce contexte que plusieurs organisations (Info Birmanie, Reporters sans frontières, Avaaz et la Fédération internationale des droits de l’Homme - FIDH) ont convoqué une conférence de presse, mardi, au Comptoir Général à Paris, dans la continuité de la pétition lancée fin juin pour dénoncer le silence des dirigeants occidentaux. Le président français devrait s’illustrer dans cet exercice : selon des sources, il ne s’exprimera pas sur la situation des Rohingyas.*

Une « euphorie déplacée » de la communauté internationale

« Le processus démocratique (en Birmanie) n’a pas mis fin aux exactions » et la réalité du terrain tranche avec « l’euphorie déplacée et démesurée » de la communauté internationale, a déclaré Célestine Foucher, pour Info Birmanie.

« Le fanatisme religieux (bouddhiste, ndlr) est au cœur de la tragédie » qui secoue les Rohingyas, souligne Sophie Ansel, journaliste auteur de « Nous les innommables : un tabou birman ». « On ne peut rester de marbre devant l’apartheid » birman à l’heure où on célèbre l’œuvre de Nelson Mandela, la figure anti-apartheid en Afrique du Sud, ajoute-t-elle.

Le président birman Thein Sein
Le président birman Thein Sein

Vers un nouveau Rwanda

Julien Bayou, chargé de campagnes Avaaz, n’hésite pas à faire un parallèle avec le Rwanda des années 1990 qui a vécu un massacre d’ampleur de Tutsis par les Hutus majoritaires. Parmi « les signes avant-coureurs d’un génocide » en Birmanie, il cite ainsi la discrimination institutionnalisé envers les Rohingyas, les messages d’incitation à la haine relayés par les médias ainsi que la tolérance, la passivité et la participation des autorités aux violences contre les minorités.

Tous appellent les autorités birmanes à engager la réforme de la citoyenneté, les Rohingyas étant privés de la nationalité depuis 1982, et réclament l’autorisation par le régime d’une commission d’enquête internationale. « On ne peut pas construire une démocratie sur le massacre des minorités », nous indique Sophie Ansel en marge de la conférence.

Les droits de l’Homme doivent être au cœur de l’engagement de la France en Birmanie et ailleurs. Mais les intérêts économiques l'emportent à nouveau. La première visite de Thein Sein en France est d'ailleurs réservée au Mouvement des entreprises de France (Medef). La ministre du Commerce extérieur, Nicole Bricq, a prévu pour sa part un voyage en Birmanie fin juillet avec des PME. Un développement dont les Rohingyas et les populations persécutées ne vont surement pas en bénéficier. Les opinions publiques française et internationale sont leur dernier rempart de défense contre l'oubli.

*Mise à jour mercredi à 18h30: Dans un communiqué, la présidence fait savoir que François Hollande a souligné, lors de son entretien avec Thein Sein, « la nécessité de voir libérés rapidement tous les prisonniers d’opinion sans condition et que toute la lumière soit faite sur les violences intercommunautaires récentes, afin que les responsables de celles-ci soient présentés à la justice ». Il a aussi exprimé « la préoccupation de la France face à la persistance de conflits armés notamment dans l’Etat Kachin et la situation de la communauté Rohingya dans l’Arakan ainsi que par les violences de nature confessionnelle ». Une nouvelle bien accueillie par les organisations de défense des Rohingyas. Cependant, aucune prise de parole publique n'a été prévue par l'Elysée pour appuyer ce discours.

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Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur



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