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Société

Paris 8 : l’interdiction du colloque sur Israël maintenue, Eva Joly prend parti, la justice s'en mêle

Une procédure en référé lancée

Rédigé par | Mardi 21 Février 2012 à 21:40

           

La présidence de la faculté de Paris 8-Saint-Denis a fait savoir, mardi 21 février, qu’elle ne reviendra pas sur sa décision d’interdire le colloque universitaire « Israël : un Etat d’apartheid ? ». Le Collectif Palestine Paris 8, à l’initiative de cet événement, a annoncé son intention de lancer une procédure en référé pour faire annuler cette décision rapidement. En parallèle, plus de 500 universitaires se sont mobilisés pour appeler le président de l’université à revenir sur sa décision, Eva Joly également.



Paris 8 : l’interdiction du colloque sur Israël maintenue, Eva Joly prend parti, la justice s'en mêle
« La réunion de la dernière chance », comme l’avait nommée le Collectif Palestine Paris 8, s’est tenue mardi 21 février entre les représentants de l’association et le président de l’université de Saint-Denis. Mais celle-ci a tourné court. Pascal Binczak a déclaré le maintien de sa décision, prise le 17 février, d’interdire le colloque « Israël : un Etat d’apartheid ? », qui devait se tenir les 27 et 28 février dans l’enceinte de la faculté, sur motif de « risque de troubles à l’ordre public ». Au grand dam des organisateurs, scandalisés par l’atteinte manifeste à la liberté d’expression.

Pourtant, ces derniers ne sont pas venus les mains vides à l’entretien avec la présidence. En quatre jours, ce sont plus de 500 universitaires et chercheurs français et étrangers qui ont signé la lettre ouverte adressée au président de la faculté pour contester sa décision « particulièrement grave puisqu’elle met en péril la liberté d’expression et les libertés académiques. »

« Nous ne partageons pas nécessairement les vues et les objectifs du colloque des 27 et 28 février. Mais l’essentiel n’est pas là. Ce qui est en jeu est, en effet, le droit de mettre en débat dans l’espace public, en l’occurrence dans ce lieu symbolique qu’est l’Université, des travaux et des opinions qui méritent d’être entendus et qui ne sont en aucun cas répréhensibles d’un point de vue légal », ajoutent-ils.

Une campagne d’intimidation du CRIF en cause

Si le président dément l’existence de pressions externes comme motif pour l’annulation du colloque, les faits parlent contre lui. La direction avait en effet pris connaissance du programme et avait donné au préalable son accord pour l’organisation du colloque, fait valoir le Collectif Palestine Paris 8. Le Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes (FSDIE) avait également attribué en janvier une subvention de 2 500 € à l’association à cet effet.

« C’est donc bien suite à des pressions, voire des menaces venues de l’extérieur que vous avez décidé de faire machine arrière. Cela nous semble particulièrement préoccupant : l’Université doit-elle se soumettre aux pressions politiques, de quelque ordre qu’elles soient ? N’est-ce pas précisément sa fonction que de permettre que les libertés académiques puissent s’exercer dans les meilleures conditions ? », s’interroge-t-on dans la lettre ouverte.

La justice devra trancher

Pascal Binzcak a bien proposé au Collectif d’organiser les deux journées d’études dans un lieu extérieur à la faculté aux mêmes dates, mais il a essuyé un refus de la part des initiateurs du projet, faisant valoir qu’en leur qualité de membres d'un collectif universitaire les débats doivent se tenir à Paris 8. « Il nous semble en effet préoccupant que des universitaires et des chercheurs ne puissent pas présenter leurs travaux dans une université, au motif que ceux-ci seraient trop "sensibles" », précise un nouveau communiqué.

En réponse à cette interdiction, l'association a annoncé son intention de lancer mercredi une procédure en référé-liberté devant le tribunal administratif, qui permet dans un délai très bref d’obtenir une mesure de suspension ou d'injonction dès lors que l'administration, dans l'exercice de l'un de ses pouvoirs, a porté « une atteinte grave et manifestement illégale » à l'une des libertés fondamentales, en l’occurrence ici la liberté d’expression. Une fois la procédure lancée, la décision intervient dans les 48 heures. Elle devrait ainsi tomber vendredi 24 février.

Eva Joly prend position

Mise au courant de cette affaire lors de son meeting à Paris 8 mardi, Eva Joly, candidate à la présidence au nom d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV), a décidé de prendre position en faveur du Collectif Palestine Paris 8 et a signé leur pétition - complémentaire à celle des universitaires - pour appeler le président à revenir sur sa décision. En une journée, ce sont également quelque 600 étudiants qui ont signé la pétition.

« Comme l’an passé à l’ENS, la direction d’un établissement public d’enseignement supérieur a cédé aux injonctions et aux menaces d’un organe (le CRIF, ndlr) qui prétend représenter la communauté juive de France mais qui n’est en réalité qu’une représentation diplomatique bis de l’État d’Israël. La direction de l’université Paris 8 n’en sort pas grandie », ont fait savoir pour leur part une cinquantaine d’organisations dans un communiqué unitaire. « La liberté d'expression et les libertés académiques sont des biens trop précieux pour être foulés aux pieds par des campagnes d'intimidation », concluent-elles.





Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur


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