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Société

La mosquée d'Istres et une boucherie halal du nord de Marseille mitraillées

Violence carabinée de l'islamophobie

Rédigé par Leïla Belghiti | Lundi 26 Avril 2010 à 14:43

           

Un pas de plus dans l'escalade de la violence vient d'être franchi, ce week-end, dans le sud de la France. Une trentaine d'impacts de balles a été retrouvée sur les façades de la mosquée d'Istres (Bouches-du-Rhône), et une vingtaine sur une boucherie halal du nord de Marseille.



La mosquée Ar-Rahma d'Istres (à gauche sur la photo) a été sciemment visée par les tirs, dans la nuit du 24 au 25 avril 2010. L'église protestante évangélique, à proximité (au fond sur la photo), n'a pas été touchée.
La mosquée Ar-Rahma d'Istres (à gauche sur la photo) a été sciemment visée par les tirs, dans la nuit du 24 au 25 avril 2010. L'église protestante évangélique, à proximité (au fond sur la photo), n'a pas été touchée.
Ce ne sont plus des tags et des inscriptions racistes que l'on retrouve désormais sur les lieux de culte musulman. La nouvelle des coups de feu sur la mosquée Ar-Rahma (« La Miséricorde ») s'est répandue, à Istres (Bouches-du-Rhône), provoquant la colère des uns, l'indignation des autres. Un lieu de culte mitraillé, ça n'est pas chose courante.

Les façades de la mosquée d'Istres ont en effet été la cible d'un mitraillage d'une trentaine de balles dans la nuit du samedi 24 au dimanche 25 avril, vers 2 heures ou 3 heures du matin, selon les sources policières.
Trois calibres différents ont été recensés : du petit plomb, du gros calibre, qui pourrait être du 9 mm, et une balle de type Brenneke, utilisée pour la chasse au sanglier, précise le journal La Provence. Toutes les douilles et les étuis ont été récupérés par les tireurs avant qu'ils prennent la fuite.

« C'est une mosquée qui a été inaugurée en juillet 2009, il n'y a jamais eu de problème tout au long de sa construction (en 2003, ndlr) ni depuis », a affirmé à l'AFP le procureur de la République adjoint d'Aix-en-Provence, Denis Vanbremeersch.

Dimanche soir, vers 22 heures, c'est au tour d'une boucherie halal du 15e arrondissement de Marseille de recevoir 23 projectiles de calibre 7,63 tirés avec une Kalachnikov. L'enquête, confiée à la police judiciaire, est en cours pour déterminer si ces deux actes de vandalisme peuvent être liés.

Fillon exprime sa « vive émotion »

La réaction du CFCM (Conseil français du culte musulman) ne s'est pas fait attendre. Mohammed Moussaoui, son président, qualifie « cette nouvelle agression avec usage des armes à feu contre un lieu de prière et de recueillement » comme constituant « une nouvelle escalade qui ne manquerait pas de susciter une profonde inquiétude et indignation chez l’ensemble des musulmans de France et tous leurs concitoyens épris de paix et de justice ».
Il appelle « les pouvoirs publics à mobiliser tous les services concernés pour arrêter et punir les auteurs de cette agression criminelle » et leur demande « instamment de mettre en œuvre tous les moyens pour garantir et assurer la sécurité les lieux de culte musulman ».

Un appel lancé depuis plusieurs années déjà, mais peu entendu. Plus d'une dizaine de lieux de culte ont été vandalisés depuis fin 2009, et peu de suspects ont été arrêtés. Les mesures de sécurité demandées par les instances musulmanes (vidéos de surveillance, protection des lieux de culte touchés) connaissent jusqu'à aujourd'hui très peu d'échos.

Injoignable par téléphone en ce début d'après-midi, Mohammed Moussaoui était reçu par François Fillon dans le cadre de ses consultations sur le projet de loi visant à interdire le port du voile intégral. Informé de l'affaire de la mosquée d'Istres, le Premier ministre a exprimé aux membres du CFCM présents sa « vive émotion ».

Où est la faille ?

« Nous sommes aujourd'hui passés à un stade supérieur de la violence », s'indigne Ali Rahni, militant Verts de la Région Nord-Pas-de-Calais. « Devons-nous attendre qu'il y ait des morts pour que les autorités se réveillent ? », interroge-t-il. Pour lui, la cause de cette escalade de l'islamophobie est flagrante : « Qu'ils arrêtent de nous gonfler avec ces affaires de burqa et de polygamie ! ».

Dans un communiqué, le Collectif des musulmans de France (CMF) met en garde contre « une atmosphère (qui) risque de dégénérer encore davantage si rien n’est fait pour mettre un terme à cette campagne islamophobe, dont de nombreuses associations de défense des droits ont pourtant prévenu les pouvoirs publics quant à ses conséquences ravageuses sur la cohésion nationale », citant notamment la « chasse à l'homme » dont a été victime Saïd Bourarach le mois dernier.

Sur Facebook, les internautes se passent le mot : « Bloquer sur l'identité nationale : 10 minarets, 367 niqab, 1 candidate "voilée", 8 Quick halal... Mais ignorer : 2 millions de chômeurs, 3 millions de travailleurs pauvres, 800 000 SDF, 65 000 détenus pour 50 000 places en prison,13 000 suicides par an, 1 million de Français sous antidépresseurs, 1 femme violée toutes les 2 heures... C'est cela la France ?! »

Ce lundi après-midi, le maire d'Istres, François Bernardini, qui avait inauguré la mosquée Ar-Rahma en juillet dernier, a témoigné son soutien aux musulmans de la ville. « Choqué, surpris, abasourdi », il dit partager « la peine et l'incompréhension de la communauté musulmane » et rappelle que « les différentes communautés (de la ville) ont l'habitude de vivre en frères, on n'a jamais eu de souci ».








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