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Financement des lieux de culte : le casse-tête des autorités locales (1/3)

En France, baux emphytéotiques, emprunts et dons de fidèles sont la règle

Rédigé par Assmaâ Rakho Mom | Jeudi 12 Juillet 2007 à 16:37

           

Vaste sujet que celui du financement des cultes ! Et que ce soit en France ou en Europe, les réactions qu’il suscite peuvent aller de la réprobation la plus acharnée à l’approbation la plus claire, en passant par le scepticisme ou la défiance. Quoi qu’il en soit, en France, les lieux de culte musulmans décents et adaptés aux besoins en terme de volume ne sont pas légion, loin s’en faut ! Et les difficultés que rencontrent les musulmans dans l’acquisition de terrains constructibles s’illustrent bien dans les cas des villes de Marseille ou de Montreuil, où les baux établis ont été attaqués et résiliés par la justice. Opérons donc un retour sur ces affaires et éclairons nos lecteurs sur ce qui se passe chez nos voisins européens, et plus particulièrement en Belgique et en Allemagne.



Avant toute chose, savez-vous ce qu’est un bail emphytéotique ? C’est un bail dont la durée est de 18 ans au moins et de 99 ans au plus. Il peut être renouvelé et doit obligatoirement être établi par un notaire. Le bail emphytéotique ne portera que sur des immeubles, et le locataire peut à sa guise hypothéquer l'immeuble, le louer ou le sous-louer. Le locataire doit assumer les charges et réparations éventuelles, payer une redevance qui est révisable dans les mêmes conditions que le loyer des baux commerciaux; et enfin le bail peut être résilié par décision de justice si cette redevance n’est pas réglée pendant deux ans ou si le contrat n’est pas respecté.


Esquisse du projet de mosquée Marseille
Esquisse du projet de mosquée Marseille
Dans le cas de la mosquée de Marseille, un bail emphytéotique d’une durée de 99 ans pour un loyer symbolique de 300 euros par an avait été établi entre la mairie et l’association La mosquée de Marseille. Attaqué en justice par des partis d’extrême droite tels que le Mouvement national républicain (MNR), le Front national (FN) ou encore le Mouvement pour la France (MPF), le tribunal administratif a estimé que « le dit bail emphytéotique administratif litigieux doit être regardé comme accordant une subvention à l'association cultuelle » et a sommé les parties au contrat à en négocier un nouveau dans les deux mois. Et le 7 juillet dernier, le projet de grande mosquée à Marseille a été lancé, tandis qu’un nouveau bail emphytéotique, d’une durée de 50 ans avec un loyer annuel d’un montant de 24 000 euros, devrait être signé après le vote du prochain conseil municipal, qui doit se tenir le 17 juillet prochain.

Concernant le projet de mosquée de Montreuil, là encore le tribunal administratif, de Cergy-Pontoise cette fois-ci, a annulé le bail emphytéotique établi entre la commune et l’association. Et de nouveau, c’est un mouvement d’extrême droite, le MNR, qui a porté l’affaire devant la justice. La mairie a annoncé qu’elle ferait appel de cette décision.

Ces deux affaires devraient fournir l’occasion pour le législateur de mettre en place un cadre juridique clair qui permettrait aux communes de pouvoir faire face aux demandes légitimes de lieux de culte par le biais de baux emphytéotiques. Précisons tout de même que le code des propriétés des personnes publiques, révisé en 2006, permet aux collectivités locales de céder, par le biais d’un bail emphytéotique, des terrains communaux pour la construction de lieux de culte.

Pour Didier Leschi, directeur du bureau des cultes au ministère de l’Intérieur, « ces baux n'ont jamais été considérés comme une atteinte à la laïcité, car un des équilibres de la loi de 1905 est l'exercice public du culte, qui suppose l'existence de lieux de culte ouverts au public. Dans l'esprit de 1905, on a toujours aidé les cultes à ouvrir des lieux et à les pérenniser. »

Pour les associations musulmanes, qui manquent de lieux de culte et qui sont en conséquence les plus demanderesses de ces édifices, il conviendrait de pouvoir signer des baux emphytéotiques avec la possibilité au bout d’un laps de temps de pouvoir acheter les terrains loués. Par ailleurs, lorsqu’une association emprunte de l’argent afin de construire un édifice religieux, elle peut se voir garantir l’emprunt par le département ou la commune. Mais la loi ne le permet que « dans les agglomérations en voie de développement ». Les associations musulmanes souhaiteraient elles que ces garanties d’emprunt puissent être étendues à toutes les communes.





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