Le regard qui tue

takaclic

Ma copine, Steph, a invité tous ses amis à un diner. Je ne connais pas tous les convives mais je m’intègre rapidement. C’est facile !
Dans ce genre de soirée, en règle générale, je suis la seule jeune fille, un peu colorée. Comme je suscite la curiosité, je suis, alors, interrogée sur mes origines. Ca me fait toujours plaisir de parler de ce que je ne connais pas. J’invente, alors, une histoire génialissime sur mes ancêtres.
Mon nom de famille a été donné à mon arrière arrière arrière arrière grand père par l’armée française et cela signifie « courageux » et tatati et tatata. Mon arrière arrière grand père était consul, mon arrière grand père, médecin et il soignait tout le village de mes parents. Mon père, quant à lui, avait une superbe situation, au Pays. Un métier qui n’existe pas en France et c’est la raison pour laquelle, ici, il fut ouvrier. Mais j’insiste ! Au village, il avait un métier formidable.
La plupart des convives sont les fils de… Ce n’est pas que j’ai honte du métier que papa a exercé toute sa vie, mais j’adapte toujours mon discours en fonction de mes interlocuteurs. Donc, pour ce public, tous mes ancêtres devaient avoir un métier plus que merveilleux et papa aussi !

Les heures passent et Christophe me saoule à vouloir me démontrer qu’il n’est pas raciste. J’ai compris ! T’es un p’tit bourgeois, plein de pognon, qui n’a jamais voté Le Pen. T’es un citoyen du Monde et tout le monde devrait être des citoyens du Monde. Tu es un gentil qui n’aime pas les méchants. En attendant, il est quatre heures du mat et, moi, j’ai des parents qui m’attendent. Je suis pâle, c’est normal. Non, je ne suis pas malade, je suis flippée. Malheureusement, je ne peux pas t’expliquer les raisons de cette pâleur. Tu ne pourras jamais comprendre, pourquoi une jeune fille de mon âge, habite toujours chez ses parents et pourquoi elle accepte qu’on lui impose des horaires de sortie. Pour pouvoir comprendre ça, il faut être arabe !

D’accord les amis, on reparlera de, comment refaire le monde mais demain parce que ce soir, c’est plus possible, je dois partir. Je quitte la soirée, en excusant un travail à rendre impérativement pour le lendemain… Oui ! Vous avez raison, c’est vrai, mon responsable m’exploite alors que vos parents sont des patrons super cools avec leurs salariés… Peace and love…Allez on se fait la bise et je me casse…Yes ! I love you, too !!!

Je monte dans ma voiture. Je roule vite, voir même très vite car il vaut mieux arriver en retard que très très en retard. Non ! Pas ça ! Pas feu rouge ! Pas feu rouge ! Pourquoi, lorsqu’on est à la bourre, on se tape, toujours, tous les feux rouges de la ville ?
J’arrive, enfin, chez moi. Sur le palier, devant la porte, je retire mes chaussures pour éviter de faire du bruit. J’enfonce doucement la clé, ouvre discrètement la porte et rentre calmement.
Ahhhhhh ! Mes parents ! Ils sont dans la cuisine à m’attendre. Je leur avais, pourtant dit que je rentrerai tard ! Ils passent, devant moi, sans dire un mot et me jette « le regard de la mort » avant de rejoindre leur chambre.
Ouf ! Ils ne m’ont rien dit… Mais ce regard là, il me dit quelque chose… Il voulait dire quoi, ce regard ? Pourquoi, est-ce qu’ils m’ont regardé comme ça ? Pourtant, ils savent que ce regard m’empêche de dormir. C’est presque le même regard que la dernière fois à peu de choses près. Quel message veulent-ils me faire passer, avec ce regard ?...
Ffffffffff !!!! Ca m’énerve !!! En tout cas, la prochaine fois, je leur dirai « tapez moi, mais ne me regardez pas comme ça !!! »


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