Psycho

Touria : « J’ai peur de divorcer, car j’ai peur de perdre mes enfants »

Rédigé par Lalla Chams en Nour | Samedi 10 Janvier 2015 à 06:00



« Voilà, je suis mariée depuis 3 ans et demi : mariage religieux sans mairie sans fête ni même de dot (la dot, c’est pas grave).

Nous ne nous sommes pas mariés en mairie, car mon mari (homme pratiquant et très pieux pourtant) souhaitait passer devant un notaire pour un mariage avec séparation de biens.
Avant notre mariage, je travaillais et j’avais, al hamdulillah, un très bon salaire.


À la naissance de notre fils, il m’a demandé d’arrêter de travailler pour m’occuper de notre enfant et ainsi profiter de la vie à le voir grandir.
J’ai accepté, bien que ça a été dur de dépendre financièrement de lui.

Mes soucis ont commencé bien avant la naissance de notre premier garçon. Mon mari s’est mis à dormir sur le canapé et à quitter le lit et notre intimité pendant plusieurs mois.

J’ai rien dit, j’ai plutôt patienté en me disant que ça changera, insha Allah. Mais non...


Pendant la première année de notre enfant, il m’a délaissée, je me débrouillais toute seule et même quand j’étais très fatiguée je lui demandais de s’occuper du petit pour me reposer un peu, il me répondait non.

Il continuait à squatter le canapé jusqu’à pas d’heure. Moi, debout à 7 heures, je devais attendre qu’il se réveille vers les 14 heures pour pouvoir disposer du salon, sinon on restait enfermés dans la chambre avec mon fils.


Ça a duré un an avec sept-huit mois sans relations intimes. Je suis tombée enceinte de mon deuxième garçon, un an après la naissance de mon premier.
Et là, c’était reparti.

Fatiguée par la grossesse et par l’énergie d’un petit garçon de 14 mois, je lui ai demandé une grasse matinée par semaine, ce n’est pas énorme mais non il ne m’a pas ménagée une seule fois.

Il ne voulait pas non plus que je confie mon fils juste une journée aux grand-mères pour que je puisse me reposer un peu.
Pour lui, si je ne suis pas capable de gérer deux enfants et la maison, c’est que je ne suis pas une vraie femme et qu’on n’est pas chez les Français pour confier les enfants aux grand-mères.

J’en ai marre de cette situation et aujourd’hui je ne l’aime plus, au contraire je le déteste.


Il ne veut pas divorcer ou alors il accepte que si je pars ce soit sans les enfants. C’est impossible !!!
Il m’a déjà avoué qu’il avait pensé au divorce.
 Il est violent verbalement par ses insultes et ses menaces mais aussi physiquement, comme la fois où il m’a poussée violemment contre un mur et je me suis ouverte la lèvre quand ma tête a cogné le mur.


J’ai peur de divorcer, car j’ai peur de perdre mes enfants et qu’Allah me punisse. À la maison, tout est à son nom, le bail, les factures. Moi, je n’ai rien ni même de travail, alors que lui, oui. Et il est juriste de métier et a une collection d’amis avocats.


J’ai entendu que si un homme n’avait pas de relations intimes avec son épouse pendant plus de trois mois ils étaient considérés divorcés. Merci pour votre disponibilité et votre aide. » Touria

Lalla Chams en Nour, psychanalyste

Votre lettre me pose plusieurs questions. Un homme très pieux, dites-vous ? Cela est intrigant, est-ce là le juste comportement d’un homme pieux envers sa femme et ses enfants ?

Ce qui pose une autre question : que s’est-il passé entre vous pour qu’il délaisse le lit conjugal et aille dormir sur le canapé ?

Vous menacer, si vous demandez le divorce, de vous retirer les enfants, non seulement c’est du chantage auquel vous ne devriez pas céder, mais de plus c’est un grand mépris pour les enfants qui souffriraient immanquablement d’être privés de leur mère.

Les femmes sont confiées aux hommes dans le Coran dans un souci de respect et de protection. Là, ce n’est pas le cas. Si vous avez déjà tout tenté pour sauver votre mariage, si vous avez accepté de réfléchir aux raisons qui auraient pu vous valoir ce dédain de votre mari, si vous refusez de vous laisser battre et maltraitée de la sorte, et parce que votre mari ne se comporte pas en bon musulman, il y a des conclusions à tirer, non ?

Juriste, oui ; mais tyran, non. C’est inacceptable, si c’est le cas.

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