Connectez-vous S'inscrire

Points de vue

Qui croit faire l’unanimité est un fou

Rédigé par Mohamed Bajrafil | Vendredi 10 Septembre 2021 à 09:00

           


Qui croit faire l’unanimité est un fou
Est fou quiconque se croit compris par tout le monde. Est à lier celui ou celle qui se croit aimé de tout le monde. Est indéfiniment fou celui qui veut être devant les gens sans accepter de faire l’objet de leurs critiques.

Prenez l’exemple de Dieu. Combien ne croient pas en Lui ? Des millions. Hier comme aujourd’hui et demain. N’est-Il pas, pourtant, pour nous croyants, le Créateur ? N’a-t-Il pas en Sa possession les cœurs des gens ? Si. Pourquoi alors ne pas les avoir créés dans Son amour exclusif ? Pour deux raisons.

Pourquoi Dieu a volontairement voulu ne pas faire l’unanimité parmi Ses créatures

La première est que ce serait un amour inné. Or rien n’est plus injuste que d’être condamné pour ce qu’on est, comme rien ne devrait être aussi insipide que ce dont on hérite sans fournir le moindre effort pour l’avoir. La seconde est que, comme le dit Rabīndranāth Tagore, « l’amour exclut la tyrannie et la hiérarchie ». Dieu a créé l’Homme, le fait vivre sous Son toit, prend en charge ce sans quoi il ne vivrait pas, les rythmes biologiques, circadiens, infradiens et ultradiens, mais le laisse faire ce qu’il veut : Il est ou reconnaissant et L’aime, ou ingrat et ne croit pas en Lui. C’est en cela que Dieu est Amour. Il donne sans rien attendre en retour, qui ne vienne de notre volonté, là où l’homme a besoin qu’on lui dise merci pour tout, y compris pour ce dont il n’est pas l’auteur.

Dieu a, donc, volontairement voulu ne pas faire l’unanimité parmi Ses créatures. Imaginez-vous un vote des humains pour ou contre Dieu. Quel serait le score du scrutin ? Il serait certainement loin des scores fleuves de certains dictateurs. Peut-être 50 % seraient contre Lui. Ce sont pourtant Ses créatures.

Et moi, simple humain, criblé de défauts, je m’étonne, voire pire, je ne supporte pas que l’on me critique ou que l’on m’insulte. Qu’il est bizarre, l’humain ! Il veut vivre à l’abri des critiques et ne rien entendre qui lui déplaise. Qu’il sache que quiconque veut vivre sans être critiqué doit se mettre dans un bocal.

De tous les conseils, les meilleurs sont les plus acerbes

Alors, apprends, l’ami, à supporter la critique, l’insulte, voire la calomnie. Apprends surtout que si l’on te critique, c’est que tu es important. On ne discute pas des idées d’un simplet, parce qu’il n’en a pas. Sois heureux d’en avoir. Comme on ne débat pas des humeurs d’un mort, il n’en a plus. Donc, à défaut de considérer les critiques comme des conseils, dis-toi que c’est parce que tu es important qu’on parle autant de toi. En bien comme en mal. Et ce, quoique tu fasses. Le père de la morphologie arabe, Ibn Durayd, chanta un jour et dit :

و ما أحد من ألسن سالما
Nul n’est à l’abri des langues
و لو أنه ذاك النبي المطهر
Même le Prophète, le pur.
فإن كنت مقداما يقولون أهوج
Si tu es vaillant, ils te traiteront d’idiot
و إن كنت مفضالا يقولون مبذر
Et de dépensier si tu es généreux.
و إن كنت سكيتا يقولون أبكم
De muet, si tu parles peu
و إن كنت منطيقا يقولون مهذر
Et de bavard comme une pie si tu parles.
و إن كنت صواما و بالليل قائما
Et si tu jeûnes beaucoup et pries la nuit
يقولون زراف يرائي و يمكر
Ils diront: C’est un m’as-tu-vu, il fait dans l’ostentation et ruse
فلا تحتفل بالناس في الذم و الثنا
Ne fais, donc, pas grand cas des injures et des éloges des gens.
و لا تخش غير الله، فالله أكبر
Et ne crains personne d’autre que Dieu, Il est le plus grand.

Chers amis, soyez vous-mêmes et aimez les jaloux, car c’est à travers eux que vous apprendrez que ce que vous avez a de la valeur. Aimez aussi vos ennemis, car ils vous permettent toujours de vous corriger, en appuyant toujours là où ça fait mal. Aimez aussi et surtout vos amis car ils permettent à vos cœurs de s’évader et à vos chagrins de s’évaporer, en vous aidant, vous supportant et vous conseillant. Et de tous les conseils, les meilleurs sont les plus acerbes, car il en est des conseils comme des médicaments, les meilleurs sont les plus amers, disait Rabïndranāth

*****
Mohamed Bajrafil est linguiste et théologien. Il est auteur de l’ouvrage Islam de France, l’an I.

Du même auteur :
Et si Dieu aimait plus les pécheurs que les non-pécheurs ?
L’urgence du regard critique sur le fiqh : de l'impératif de sortir de la sacralisation de la jurisprudence islamique et de leurs savants




Réagissez ! A vous la parole.

1.Posté par Premier janvier le 11/09/2021 20:23 | Alerter
Utilisez le formulaire ci-dessous pour envoyer une alerte au responsable du site concernant ce commentaire :
Annuler
Pour pouvoir faire l'unanimité il faudrait que l'on soit tous pareils, identiques. Je ne vois que ça. S'agissant de dieu idem, il faudrait qu'il nous soit identique. Il faudrait donc les connaître. Il est impossible de connaître ni dieu ni tous les hommes.
C'est donc parce que l'on ne les connaît pas que l'on est critique et pas parce que l'on les connaît.


SOUTENEZ UNE PRESSE INDÉPENDANTE PAR UN DON DÉFISCALISÉ !