Société

Que pensent les Français de la laïcité ? Ce que révèle l’étude de l’Observatoire de la laïcité

Rédigé par Lina Farelli | Samedi 2 Février 2019 à 13:00

Comment l’opinion publique perçoit-elle la laïcité, aujourd’hui en France ? Face au retour fréquent de cette question dans les débats publics, l’Observatoire de la laïcité, en collaboration avec l’institut ViaVoice, a commandé une étude pour mesurer l’opinion des Français sur ce sujet.



L’Observatoire de la laïcité a publié, jeudi 31 janvier, une étude dressant un état des lieux du principe figurant au cœur de sa mission. Avec 73 % des sondés se disant attachés à la laïcité selon sa définition légale rappelée lors de l’enquête* et 69 % le jugeant comme un « principe républicain essentiel », il ressort des résultats de l’étude « un attachement à la laïcité très largement majoritaire dans notre pays, même si certains écarts peuvent être soulignés selon l’âge ou la catégorie sociale des répondants », fait part l’ODL.

Des écarts sont aussi observés selon la religion des répondants. Tandis que 72 % des protestants et 60 % des catholiques considèrent que la laïcité protège en théorie (selon le droit) les pratiquants des différentes religions, les musulmans ne sont que 45 % seulement à partager ce point de vue. « Un écart que l’on peut attribuer notamment aux discriminations : 50 % des musulmans citent les "discriminations que subissent des citoyens à raison de leur religion supposée" parmi les principaux enjeux liés à la laïcité, contre seulement 35 % des catholiques et 33 % des protestants », indique l’étude.

Un principe dont des Français déplorent son instrumentalisation

Malgré l’attachement général des Français porté au principe de laïcité, « une part majoritaire de l’opinion publique déplore dans le même temps des difficultés à appliquer correctement la laïcité au quotidien, voire une instrumentalisation de celle-ci, la transformant parfois en élément de conflit ou de divisions, alors qu’elle devrait être un élément de cohésion nationale essentiel », souligne l’ODL.

Ainsi, beaucoup déplorent la complexité de l’application de ce principe au quotidien. En effet, seulement 5 % des répondants jugent que la laïcité est « bien appliquée » en France, contre 30 % qui considèrent qu’elle est « mal appliquée » et 39 % jugeant que « la laïcité est plus ou moins bien appliquée selon les autorités publiques ».

L’étude révèle, d’autre part, que 44 % des répondants considèrent que la laïcité comme un principe qui rassemble « en théorie » mais seuls 18 % jugent que la laïcité rassemble au quotidien « en pratique » tandis que 37 % des sondés pensent au contraire qu’elle divise « en pratique ».

Aussi, 67 % des répondants trouvent que « la laïcité est trop souvent instrumentalisée par les personnalités politiques » qui la manient pour en faire un outil de conflit et de division alors qu’elle est supposée être « un élément de la cohésion nationale ». Par ailleurs, ils sont 60 % à déplorer qu’« on ne parle de la laïcité qu’à travers la polémique », 52 % qu’« on n’explique pas assez ce qu’elle est » et 49 % qu’« on ne parle de la laïcité qu’à travers l’islam ».

Le défi de « la montée des intolérances entre les différentes communautés religieuses »

Si 48 % des Français ont pu fournir une définition exacte de la laïcité selon le droit, 29 % ont affirmé souhaiter un principe plus restrictif comme une neutralité qui s’appliquerait aussi aux usagers des services publics ou qui interdirait des signes et vêtements religieux dans la rue. A contrario, ils sont 14 % à aspirer à un régime moins restrictif de la laïcité. Quant à la séparation Eglise-Etat, 46 % des répondants veulent maintenir le statu quo contre 22 % et 11 % souhaitant respectivement un cadre légal plus et moins strict.

Le premier des défis d’avenir liés à la laïcité exprimé par une majorité des répondants est « la montée des intolérances entre les différentes communautés religieuses » (57 %) et « les crispations engendrées par le port de signes visibles de certaines religions » (44 %).

« Autrement dit, les attentes de l’opinion publique pour l’avenir appellent en priorité à bien appliquer en pratique notre modèle de laïcité actuel, afin que s’estompe cette distinction entre une laïcité "théorique" considérée comme protectrice des libertés et gage de cohésion nationale, et une laïcité mal interprétée au quotidien, génératrice parfois de divisions au sein de la société », conclut l’ODL.

*La définition de la laïcité telle que rappelée aux sondés : « C’est le principe qui sépare l’Etat des religions, permet à chacun de croire ou de ne pas croire, garantit la neutralité des fonctionnaires et l’impartialité de l’administration vis-à-vis de tous. »

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