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Points de vue

Oui au respect de la vie : l'appel interreligieux sur la fin de vie

Rédigé par Philippe Barbarin, François Clavairoly, Mgr Emmanuel, Haïm Korsia, Mohammed Moussaoui | Mercredi 11 Mars 2015 à 06:00

           


Oui au respect de la vie : l'appel interreligieux sur la fin de vie
Nous, représentants des trois grandes traditions religieuses monothéistes, conscients des évolutions qui traversent notre société, des nouvelles situations qu’elles génèrent et de la nécessité de rechercher des adaptations, voire des améliorations de dispositifs législatifs et réglementaires pour accompagner ces évolutions, considérons qu’une telle recherche doit être le fruit d’un débat serein, démocratique et respectueux de la personne humaine et de sa dignité.

Le contexte actuel manque de lisibilité et la période que nous traversons est difficile, secouée par des crises à répétition, politique, économique, financière et morale. Un nouveau débat sur la fin de vie risque d’y ajouter de la confusion.

Il y a moins de dix ans, la République française avait tranché la question par la voix unanime de ses parlementaires, quand fut votée la loi Leonetti, le 22 avril 2005. « Rien ne pourra jamais justifier le droit de donner la mort à un homme » : ni sa santé, ni son inconscience, ni son extrême vulnérabilité, ni même son désir de mourir. Le caractère inviolable de la vie humaine avait franchi une nouvelle étape. Et c’est sur ce socle commun que s’est consolidé l’acte médical face à l’euthanasie.

Le droit français qui exclut l’acharnement thérapeutique, condamne l’euthanasie. Il en est de même du droit européen : dans une recommandation adoptée en 1999, le Conseil de l’Europe condamne l’euthanasie qui est par ailleurs interdite dans la quasi-totalité des pays du monde.

Un appel commun au respect de la vie

Alors que le débat est relancé, nous lançons un appel commun, inquiet et pressant, pour qu’une éventuelle nouvelle loi ne renonce en aucune façon à ce principe fondateur : toute vie humaine doit être respectée spécialement au moment où elle est le plus fragilisée.

Nous demandons que cette loi civile soit civilisatrice, c’est-à-dire qu’elle aide à vivre et à mourir, sans jamais écourter la vie, sans jamais décider de donner la mort. Nous voulons qu’elle s’entoure d’un large consensus autour de principes clairs, sûrs que la moindre équivoque en ce domaine génèrera, à terme, la mort d’innombrables personnes sans défense.

Dans le débat qui s’ouvre aujourd’hui surgit en effet une nouvelle tentation : celle de donner la mort, sans l’avouer, en abusant de la « sédation ». S’il peut être utile ou nécessaire d’endormir un patient, à titre exceptionnel, l’usage de cette technique est dénaturé dès qu’il s’agit, non plus de soulager le patient, mais de provoquer sa mort. Ce serait un acte d’euthanasie. Or, quand il est question de vie et de mort, la conscience humaine ne peut être en paix si l’on joue avec les mots. La démocratie elle-même ne peut que souffrir de la manipulation de concepts aussi sensibles.

Accompagner la fin de vie sans provoquer la mort

C’est pourquoi nous demandons que soit encouragé l’accompagnement des personnes en fin de vie, tout en garantissant qu’elles soient clairement protégées par l’interdit de tuer. C’est au regard porté sur ses membres les plus fragiles qu’on mesure le degré d’humanisation d’une société.

Au nom de quoi envisagerait-on de légaliser un geste de mort ? Parce que la personne concernée aurait, dit-on, perdu sa dignité humaine ? Parce qu’elle aurait fait son temps ? On lui laisserait entendre qu’elle est devenue inutile, indésirable, coûteuse… L’homme se croit-il en mesure de décerner – pour lui-même ou pour autrui – des brevets d’humanité ?

Il s’agit d’un enjeu majeur pour notre société, pour le lien entre les générations, pour la confiance entre les soignants et les soignés et, plus profondément, pour servir la grandeur de la médecine, l’esprit de la civilisation, et notre plus grande humanité.

Philippe Barbarin, cardinal et archevêque de Lyon, François Clavairoly, président de la Fédération protestante de France, Mgr Emmanuel, Métropolite de France, président de l'Assemblée des Évêques Orthodoxes de France, Haïm Korsia, Grand Rabbin de France, Mohammed Moussaoui, président de l'Union des Mosquées de France, président d’honneur du CFCM

Première parution de la tribune dans Le Monde du 9 mars.





Réagissez ! A vous la parole.

1.Posté par azerty le 12/03/2015 16:01 | Alerter
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Très bon texte.

2.Posté par Manola le 13/03/2015 00:13 | Alerter
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Une fois de plus les clercs (représentants nommés ou auto-proclamés des religions) prétendent parler au nom de tous les "juifs", "chrétiens" ou "musulmans" (alors que dans chaque culte, seule une minorité est croyante et pratiquante) mais ils ont de plus la prétention de décider pour les athées, agnostiques, indifférents et hostiles à toute transcendance (mais non pas à toute spiritualité). Ce "combat", condamné d'avance, nous fera cependant perdre des mois ou des années pour obtenir une liberté essentielle pour ses partisans (celle de décider de mourir dans la dignité), liberté qui n'enlève aucun droit à ses adversaires (comme autrefois pour le divorce, l'IVG, le PACS, le mariage pour tous, etc...). Comme le disait Victor Hugo qui était croyant : "l'église chez elle et l'Etat chez lui". Ce qui signifie concrètement que la loi n'est pas la foi, que le parlement n'est pas un temple, que les élus ne sont ni curés, ni rabbins, ni pasteurs, ni imams et que l'intérêt général ne se limite pas aux opinions de quelques croyants.


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