Religions

Mohammed Moussaoui : « Dans tous les pays du monde et dans toutes les confessions, il y a des coopérations ! »

Entretien avec Mohammed Moussaoui, vice-président du Rassemblement des Musulmans de France (RMF) et favori des élections du CFCM.

Rédigé par Propos reccueillis par Anissa Ammoura | Mardi 10 Juin 2008 à 13:48

Dimanche 8 juin, le Rassemblement des Musulmans de France (RMF) est arrivé en tête du 1er tour des élections du Conseil français du culte musulman (CFCM). Mohammed Moussaoui, son vice-président, est pressenti pour succéder à Dalil Boubakeur le 22 juin prochain. Secrétaire général du Conseil régional du culte musulman (CRCM) de la région Provences-Alpes Côtes d’Azur (PACA) depuis 2005, il est également maître de conférences en mathématiques à l'université d'Avignon et imam à la mosquée El Boukhari dans la même ville.



Saphirnews : Avec un score de 43,2%, le RMF est arrivé en tête du 1er tour des élections du CFCM, quelles sont vos impressions ?

Mohammed Moussaoui : Le résultat était prévisible. Malgré tout, il est important de dépasser les clivages d’appartenance. Le RMF travaillera avec toutes les composantes, même indépendantes.

Vous êtes favori pour devenir président du CFCM, quel sera votre programme si ce pronostic se concrétise ?

M.M. : L’une des priorités pour le président du CFCM serait la formation des cadres religieux, imams et aumôniers. Il faut également s’atteler à la construction de lieux de cultes dignes. Il y a un déficit important à ce niveau-là en France contrairement à nos voisins allemands qui disposent de 2600 lieux de cultes pour 2 millions de musulmans alors qu'en France il y en a deux fois moins pour 5 millions de musulmans. Il y a aussi le dossier du pèlerinage, notamment avec les nombreuses plaintes déposées cette année. Il faudra également améliorer les conditions de sacrifice de l’Aïd-el-Kebir mais aussi régler le problème des lieux de sépulture. Pour ce dernier, ,il faudra d’abord dresser un état des lieux de ce qui existe, évaluer les besoins des différentes communes. Objectif : créer de nouveaux carrés musulmans dans les villes qui en sont dépourvues et les étendre ailleurs. La dernière priorité concerne le dialogue interreligieux, pour mieux connaitre les autres confessions et pour un mieux vivre ensemble.

Du Grenelle de l’Animal, pourrait déboucher toute une série de mesures législatives en matière d’abattage rituel, quel est votre point de vue ?

M.M. : Personnellement, je crois qu’il faut respecter les textes religieux qui rejettent l’étourdissement préalable. D’autre part, d’un point de vue sanitaire, ce procédé [l’étourdissement en général, ndlr] ne permet pas d’avoir une meilleure viande. Le CFCM pourrait faire appel à des experts d’un point de vue théologique, pour prendre des décisions en conséquence.

Seuls 4.900 électeurs sur les 5 ou 6 millions de musulmans en France ont pu élire les représentants, le mode de scrutin ne va-t-il pas entacher une fois de plus la crédibilité de l’instance ? Changer le mode de scrutin fera t-il parti de vos priori

M.M. : Ce critère de représentation est ce qu’il est. Il a le mérite d’exister. Il a servi à assoir les instances de 2003/2005. Il appartient aux gens qui contestent ce critère d’en proposer d’autre(s). Le RMF s’engage à mettre en place un groupe de travail dont la mission est de réfléchir au mode de gouvernance et de proposer des alternatives au mode de scrutin actuel.

Il se pourrait que Dalil Boubakeur soit finalement présent au sein du CFCM, bien que lui et sa fédération aient boycotté les élections, que pensez-vous de cette cohabitation ?

M.M : Je pense que ce n’est pas la seule fédération dans cette situation. Ce n’est pas une nouveauté. Mais la Grande Mosquée de Paris (GMP) est une fédération importante, fondatrice. C’est donc légitime du point de vue statutaire. Il faut que toutes les composantes de l’Islam de France soient présentes. Concernant plus particulièrement le boycott de Dalil Boukakeur, il s’agit d’une décision regrettable. Mais maintenant, il faut regarder vers l’avenir et ne pas rester bloquer sur les évènements du passé.

A l’heure où l’ingérence étrangère est dénoncée par tous, le RMF est accusé de prendre ses décisions en étroite collaboration avec le ministère des Habous marocain… Quelles garanties apportez vous pour prouver votre indépendance ?

M.M. : Je pense que le mode de fonctionnement est connu. Il y a des règles précises qui vont régir le CFCM. Aucune règle extérieure ne sera introduite. Quant à la proximité avec les pays d’origine, il appartient à toute fédération de nouer des relations de coopération avec des organismes qu’elles jugent pouvoir lui apporter un soutien. Dans tous les cas, si je suis président du CFCM, je serai le président du CFCM « tout court » et le RMF serait une fédération parmi d’autres. Je ne conteste pas la relation qu’à le RMF avec le ministère des Habous marocain. Ni même d’ailleurs celle qu’entretient la GMP avec l’Algérie et l’UOIF avec certains pays du Golfe. Chaque fédération a des relations. Mais il faut que ces relations de coopération ne viennent pas se chevaucher avec les règles du CFCM. La coopération du RMF avec le ministère des Habous continuera mais on ne peut pas réduire le RMF à cette relation. Dans tous les pays du monde, dans toutes les confessions, il y a toujours des coopérations. La mondialisation a traversé tous les domaines. Lorsqu’une décision devra être prise au sein du CFCM, le mode de fonctionnement changera pas.

Comment voyez-vous le deuxième tour des élections, prévues le 22 juin prochain ?

M.M : Je suis confiant, et j’espère que ce sera l’occasion de redynamiser toutes les forces du CFCM, avec une liste la plus représentative possible, comprenant aussi les petites fédérations.



Voir aussi : [Mohammed Moussaoui : une force tranquille. ]url:http://www.saphirnews.com/Mohamed-Moussaoui-UNE-FORCE-TRANQUILLE_a1317.html