Religions

Luttes ordinaires au CFCM

Rédigé par Zaynab Ali | Lundi 5 Mai 2008 à 11:36

Menaces de retrait du processus électoral, démentis, confirmations. Les ingrédients d'avant échéance électorale au Conseil français du culte musulman n'ont décidément pas changé. Et tout est bon pour faire plier l'adversaire et conserver coûte que coûte sa sphère d'influence. Retour sur les événements des dernières semaines, riches en rebondissements mais aussi annonciatrices de perturbations à venir.



Il est peu de dire que les élections devant renouveler les instances du CFCM le 8 juin prochain ne déchaînent pas les passions chez les musulmans Français, et en particulier dans les lieux de cultes et les mosquées. En témoignent les reports successifs de dépôts des listes de candidats, la date limite de validation des listes de délégués-électeurs par les Comités régionaux électoraux (Corelec) et de transmission au bureau du CFCM via le Comité électoral national (Comelen), ayant été repoussée "à la date impérative du 27 avril 2008" par le Comelen réuni le 22 avril dernier, "étant donné le retard accumulé dans certains Corelec".

Et pourtant, en coulisse, se joue une bataille comme en connaît régulièrement le Conseil français du culte musulman. L'échéance électoral approchant, chacun fait en sorte de défendre sa sphère d'influence.

'N'importe qui peut écrire n'importe quoi'

C'est le président du CRCM Alsace, Benabdallah Soufari qui, le premier, diffuse l'information. Selon lui, réunie le 11 avril dernier, la Fédération nationale de la Grande mosquée de Paris (FNGMP) aurait, "à l'unanimité, décidé que la FNGMP ne participera pas aux élections du mois de juin, et, que cette dernière gèlerait dés à présent sa participation aux instances du CFCM".

Contactée par Saphirnews, la Grande mosquée de Paris estimait alors que "sur Internet, n'importe qui peut écrire n'importe quoi", et "la Mosquée de Paris n'a vraiment rien a dire là-dessus pour le moment" puisqu'elle "n'a pas à commenter les rumeurs et fantasmes des uns et des autres".

Retrait

Or, dans un communiqué publié le 30 avril, Kamel Chibout, le président de la Fédération Régionale de la Grande Mosquée de Paris du Grand est, a déclaré que "la Fédération régionale de la Grande mosquée de Paris (FRGMP) du Grand Est, annonce que les 53 lieux de cultes qui lui sont affiliés dans les régions Alsace, Lorraine, Champagne Ardennes et Franche Comté, ne participeront pas aux élections des Conseils Régionaux du Culte Musulman (CRCM) prévues le 8 juin 2008."

"Cela fait suite à la décision unanime prise par le bureau exécutif de la Fédération Nationale de la grande Mosquée de Paris (FNGMP) le samedi 12 avril 2008", précise le communiqué, selon lequel "les motifs sont les discriminations liées au mode de scrutin [...] et les habituelles fraudes aux seins des Comités Régionaux pour les Elections (Corelec)".

"Notre soucis ne repose que sur la défense des intérêts et de la dignité des musulmans de France", estime Kamel Chibout, appelant "fraternellement les autres fédérations à nous rejoindre dans notre démarche courageuse et salutaire pour les musulmans de France en quittant comme nous les CRCM et le CFCM."

'Une manière de discréditer cette instance'

Pour Franck Frégosi, spécialiste des questions liées au culte musulman et chargé de recherche au laboratoire Société, droit et religion en Europe auprès du CNRS, cette volonté de retrait de la FNGMP du processus électoral du CFCM "est une manière de discréditer cette instance".

Et ce dernier de préciser que "Dalil Boubakeur, le recteur de la Mosquée de Paris, était opposé à une représentation pluraliste du culte musulman", la Mosquée de Paris étant "à ses yeux à elle seule représentative". "Au terme d'une succession de pressions et de reculades, il a obtenu, avant même la première élection de 2003, d'être désigné président du CFCM, calife pontife de l'islam de France"

"Nous assistons à un ènième chantage", estime le chercheur. Et alors que le président du CFCM s'attaque aux "discriminations liées au mode de scrutin", Franck Frégosi souligne le fait que "cette contestation arrive après deux mandats et à la veille des élections", sans pour autant écarter l'hypothèse d'"une certaine lassitude de Dalil Boubakeur, qui doit en outre subir des pressions pour organiser sa succession".

Quoi qu'il en soit, il n'est pas certain que cette fois-ci, le chantage fonctionne, le gouvernement n'ayant pas forcément "la volonté de s'impliquer pour le soutenir".