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Le pèlerinage au féminin

Par la Présidente de 'Les Citoyennes Femmes libres'

Rédigé par Nacéra Hamouche | Jeudi 11 Janvier 2007 à 22:36

Le hadj, cinquième pilier de l’Islam est pour les Musulmans le pèlerinage aux lieux saints de la ville de la Mecque, en Arabie saoudite. Pour les Chrétiens, il s’agit également du pèlerinage vers la ville Sainte qu’est Jérusalem – El Qods en Palestine. Tandis que les Chrétiens n’ont pas l’obligation d’effectuer ce pèlerinage, c’en est une pour tout Musulman, Musulmane au moins une fois dans sa vie s’il ou elle en a les moyens financiers et physiques.



Chaque année, La Mecque attire plus trois millions de pèlerins dont la majorité sont des hommes. Dans cet océan masculin, une minorité féminine tente de se frayer un chemin, non sans cette épée de Damoclès suspendue au-dessus de la tête de chacune d’elles sur la question que l’on traîne comme un boulet, confortablement installée dans tous les esprits depuis plus 14 siècles, sans que l’on s’interroge sur ses tenants et aboutissants :

La femme musulmane peut-elle voyager seule ? ou s'il faut qu'elle soit accompagnée de son mari ou d'un mahram (proche parent avec qui elle ne peut jamais se marier) ?

Bien que les avis des savants divergent sur la distance à parcourir « à pied » (important de le préciser) l’unanimité de leurs convergences ainsi que tous les hadiths tournent autour de la question centrale, fondamentale de la  sécurité des personnes, s’agissant ici de la femme,  en matière d’infrastructures routières, uniquement : « Si les chemins d'une région sont sûrs, la musulmane peut voyager seule pour aller accomplir le pèlerinage. C'est seulement dans le cas contraire qu'elle doit impérativement être accompagnée de son mari ou d'un proche parent (mahram). Le voyage commercial est aussi concerné par cette autorisation au cas où règne une parfaite sécurité » !

Des bandits de grands chemins qui infectaient les territoires de France, de Navarre et de par le monde, il ne reste que les remakes de films dits « d’époque » que nous re-servent les chaînes de télévision à chaque Noël avec au menu : vols – viols - enlèvement de jeunes filles, des temps reculés où les brigands qui envahissaient les routes faisaient d’un voyage, une aventure périlleuse pour une femme seule !

Par une interprétation tout aussi fausse qu’erronée de tous les hadiths, avis de savants et écoles qui n’invoquent que la « sécurité des personnes en matière d’infrastructures », on maintient depuis plus de 14 siècles toute une communauté dans l’ignorance, privant de ce fait des générations de femmes seules, faute de mari ou « mahram » de leurs droits d’accomplir le pèlerinage, un devoir de tout musulman et musulmane ayant les moyens financiers et physiques !

Alors que l’âge légal requis est fixé à la majorité, et après des décennies d’atermoiements, l’on a concédé une petite fleur à la ménagère de plus de 50 ans, la « mamy Nova seule » dont le pouvoir de séduction n’est plus à craindre : « la permission d’effectuer le pèlerinage en intégrant un groupe de personnes, mais à condition d’être  sous la protection  d’un couple » ! première colo de mamy Nova, merci papa, merci maman… !

Interrogés sur ce critère de l’âge imposé, les agences de voyages « spécialisées » dans le Pèlerinage renvoient vers le Consulat d’Arabie saoudite à Paris, qui se fend d’une réponse tout aussi arbitraire qu’ambiguë, de l’employée jointe au téléphone : « Le Ministère du Pèlerinage donne des instructions à devoir respecter sans avoir à fournir quelconque explication » Circulez, ya rien à voir !

Le Prophète (paix sur lui), visionnaire en son temps répondant un jour à quelqu'un qui se plaignait de l'insécurité des chemins en Arabie, a parlé « d'une époque qui viendrait  où la musulmane voyagerait seule de Al-Hîra dans l'empire perse, actuellement en Iraq jusqu'à La Mecque en Arabie » !

Oh peuple doué de cerveau, qui réfléchit ! Li qawmin yaaqiloun, yata fakaroun, ne sommes-nous pas, les uns les autres, témoins des progrès fulgurants depuis plus d’un siècle, grâce à la révolution industrielle et technologique, dont nous usons voir abusons ! Avec des infrastructures routières sécurisées, des télécommunications fiabilisées, des moyens de transport et d’hébergement assurant le confort des voyageurs et voyageuses dans le monde entier, contre quoi voudrait-on encore protéger la «muslima» ?

Des relents machistes qui maintiendraient la femme musulmane dans son statut de « mineure » non pas à émanciper mais à surveiller contre quelconque regard qui se poserait sur elle ? Que Néni !

Les femmes musulmanes actuelles, diplômées et compétentes, telles des abeilles qui butinent, voguant entre modernité et traditions, à la pointe de la technologie nouvelle'', badawiyat bel galabiyat, Aala akher mouda, aasriyat, bien intégrées dans la société moderne, n’assument-elles pas leurs rôles en tant que femmes actives et engagées, honorant leurs devoirs pour les missions qui leurs sont confiées, conciliant vie familiale – professionnelle - spirituelle, portant et donnant la vie!

Nombreuses sont les mères au foyer, analphabètes, illettrées, indépendamment de leur volonté, victimes pour certaines de discriminations patriarcales, tribales, veuves, d’autres abandonnées par leurs « hommes  en charge de leur protection »  qui ont assuré ou assurent dignement leur rôle de chef de famille, avec des enfants à élever !

La plus belle et meilleure des protections, n’est-ce pas que le respect de leurs droits de s’assumer librement, femmes adultes et responsables ?

La plus belle et meilleure des protections, n’est-ce pas que d’encourager les jeunes filles à la recherche du Savoir et de la Connaissance, un passeport pour la vie?

La plus belle et meilleure des protections, n’est-ce pas que de leur permettre de s’épanouir socialement, culturellement, spirituellement ?

La plus belle et meilleure des protections, n’est-ce pas que d’offrir à toutes celles, jeunes ou moins jeunes, désireuses d’accomplir leur pèlerinage, les meilleures prestations de service de confort et de sécurité en matière de transport et d’hébergement, qui incombent aux agences de voyages et de le leur rendre le plus agréable !

Avec les mêmes conditions auxquelles doit se soumettre tout croyant et croyante, désirant accomplir son devoir de pèlerinage, sans distinction ni de race, ni de sexe, à savoir :

1 - Etre musulman, croire en Dieu et en l'islam.
2 - Etre sain d'esprit.
3 - Etre majeur, majeure –garçon / fille.
4 - Etre en bonne santé et avoir l'argent pour le voyage et le séjour, sans compromettre l'existence du reste de la famille.

Rappelons-le… ! simplement… ! 



Nacéra Hamouche est présidente association les « CFL ».

Pour en savoir plus sur CFL : http://www.cflma.fr.st