Cinéma, DVD

La loi de Téhéran, focus sur les ravages de la drogue en Iran

Rédigé par | Mercredi 21 Juillet 2021 à 11:00

Le 28 juillet sortira en salles « La Loi de Téhéran », le nouveau film du jeune réalisateur iranien Saeed Roustaee. Fenêtre ouverte sur un Iran ravagé par les affres de la drogue, ce long métrage dévoile les coulisses d’un système judiciaire qui peine à endiguer un fléau faisant toujours plus de victimes.



Faire parler la société qu’ils observent a toujours été l’un des objectifs de nombreux cinéastes. Il est aussi celui de Saeed Roustaee, réalisateur du long métrage La loi de Téhéran, et dont le titre international Just 6.5 fait directement référence au sujet central de son film : les ravages du crack en Iran, consommé par 6,5 millions d'Iraniens.

Avec ce thriller récompensé lors de la 38è édition du Festival du film policier, le jeune cinéaste de 31 ans dénonce les conséquences douloureuses d'une consommation en constante augmentation dans un pays qui, pourtant, condamne à la peine de mort toute personne en possession de drogues. Ce film met en scène la confrontation entre Samaad, un flic aux méthodes peu conventionnelles et Nasser K., un parrain de la drogue qu’il recherche depuis plusieurs années.

Joués respectivement par l’acteur Peyman Maadi, connu pour ses rôles dans les films A propos d’Elly sorti en 2011 et Une séparation sortie en 2009, et Navid Mohammadzadeh, lauréat en 2019 du prix du Meilleur acteur au Festival international du film de Tokyo grâce à son rôle dans Just 6.5, les deux hommes issus du même milieu social sont comme deux faces d’une même pièce.

Mais loin de céder aux clichés d’une construction caricaturale de ses personnages, opposant le « gentil » au « méchant », Saeed Roustaee, en exposant les contradictions de ses personnages, présente deux hommes imparfaits. L’un, plus vulnérable qu’il n’y paraît, traumatisé par la pauvreté qu’il aura connu enfant, et l’autre, rustre, qui, avec arrogance, fera fi des règles.

De la pauvreté à la toxicomanie

Avec ce film, Saeed Roustaee nous ouvre également les portes du système carcéral iranien. Conditions de détention, corruption et mensonges, le cinéaste pose un regard nuancé sur une législation qui se veut sans pitié contre ceux qui font prospérer le trafic de drogues dans un pays proche de l'Afghanistan, plus gros producteur de drogue au monde.

Mais à travers l'œil de sa caméra, il expose aussi l’addiction à laquelle succombe toute une partie de la population, de plus en plus visible dans les rues iraniennes. C’est d’ailleurs par une scène illustrant parfaitement cette sortie de l’ombre que s’ouvre le film. « Ces dernières années, la toxicomanie a changé de visage en Iran. Elle est sortie de la clandestinité pour se révéler au grand jour. De plus en plus de toxicomanes sont visibles dans la rue. Leur dépendance à une nouvelle substance, le crack, les a mis à la rue de façon beaucoup plus massive et plus rapide que ne le faisaient les autres drogues », explique le cinéaste.

Traiter de la toxicomanie amène presque naturellement le cinéaste à évoquer la précarité, autre fléau bien présent en Iran. Une misère qui suit les consommateurs et trafiquants jusque dans leur cellules insalubres où ils sont entassés par dizaines. Avec « Yalda, la Nuit du Pardon », Massoud Bakhshi dénonçait les inégalités de classe en Iran. Avec La loi de Téhéran, Saeed Roustaee nous en montre les conséquences.

« Pour moi, la toxicomanie et la pauvreté sont étroitement liées. L'écrasante majorité des individus qui ont recours à la drogue le font car ils y trouvent un refuge leur permettant d'oublier la situation inextricable dans laquelle ils vivent ou d'apaiser l'angoisse qu'elle suscite en eux », analyse le réalisateur. Et avec une ironie, presque triste, c’est cette misère qu’aura tenté de fuir Nasser en devenant dealer. Cependant, le réalisateur ne fait pas de la précarité une excuse. Il tient aussi à envoyer un message clair : avant d’enrichir, la drogue détruit, même ceux qui en tirent profit.