Société

L'immigration essentiellement féminine en France

Rédigé par Maria Magassa-Konaté | Mercredi 10 Juillet 2013 à 09:00

La population immigrée est majoritairement composée de femmes en France. Alors que par le passé, le pays a beaucoup fait appel à de la main-d’œuvre masculine étrangère, l’Hexagone attire aujourd’hui une population féminine de plus en plus instruite.



« Les femmes sont désormais majoritaires parmi les immigrés en France », indique l’Institut national d’études démographiques (INED) dans son dernier rapport « Les immigrés en France : en majorité des femmes ». Publié jeudi 4 juillet, il se base sur les données de l’enquête Trajectoires et Origines (TeO) établie en 2008.

Alors que les immigrés en France étaient principalement des hommes jusqu’à la fin du XXe siècle, ce sont majoritairement des femmes depuis quelques années. Elles représentaient ainsi 51 % de la population immigrée en 2008.

Un étudiant étranger sur deux est une femme

Comment expliquez ce changement ? En 1974, alors que la crise économique entraîne une « suspension de l’immigration de main-d’œuvre » et que certains travailleurs repartent, « la reconnaissance du droit au regroupement familial facilite dans le même temps l’arrivée des épouses », notent Cris Beauchemin, Catherine Borrel et Corinne Régnard, les auteurs du rapport de l’INED.

Si la part des femmes dans la population immigrée est aujourd’hui majoritaire, c’est aussi parce que de plus en plus d'entre elles n’hésitent plus à venir seule dans l’Hexagone. Cette féminisation de la population immigrée ne vient effectivement pas seulement du regroupement familial. « Les femmes migrent de plus en plus de façon autonome afin de travailler ou de faire des études », résument les chercheurs.

Alors qu’un étudiant sur quatre était une femme dans la période 1975-1983, c’est un étudiant sur deux qui est une femme depuis 1998. La scolarisation croissante de ces femmes dans leur pays d’origine joue un rôle clé. Par ailleurs, « les femmes qui arrivent en France sont de plus en plus souvent des célibataires ou des "pionnières" qui devancent leur conjoint », note le rapport.

Conséquence : les hommes sont plus nombreux à immigrer en France « pour raisons familiales ». Depuis 1998, ils représentent « le tiers des personnes regroupées et progressent également parmi les conjoints de Français ».

Les hommes immigrés majoritaires parmi les Marocains et Tunisiens

« Les hommes dominent les effectifs de seulement deux groupes : ils représentent 54 % des immigrés turcs et 52 % des immigrés marocains et tunisiens. Les groupes les plus éloignés de la parité sont dominés par les femmes : elles représentent ainsi 65 % des immigrés issus des pays de l’Union européenne (hors Espagne, Italie et Portugal) », lit-on. L’ancienneté des courants migratoires européens y est pour quelques chose, jugent les auteurs.

« La proportion de femmes dépend aussi des circonstances de la migration », ajoutent les chercheurs. Ainsi, les exilés politiques comptent autant de femmes que d’hommes, comme on le voit au tournant des années 1980 parmi les réfugiés d’Asie du Sud-Est (Vietnam, Laos, Cambodge). « Les structures sociales du pays d’origine jouent aussi un rôle important », rapporte l’étude, citant les familles du Sahel habituées à vivre dans des domiciles différents qui vont naturellement retarder leur regroupement familial en France.

Par ailleurs, les migrations les plus féminisées se signalent par un nombre plus important de départs « autonomes » de femmes célibataires ou devançant leur conjoint, comme c’est le cas des immigrés venant d’Afrique centrale ou du golfe de Guinée.

Ces profils de femmes plus instruites ont contribué à la féminisation de la population immigrée. La scolarisation des filles étant plus forte dans les pays en voie de développement, le phénomène devrait perdurer.

Pour télécharger le rapport « Les immigrés en France : en majorité des femmes », cliquez le lien ci-dessous :

ined femmes immigrées.pdf  (1.18 Mo)