Société

L'association 'Les trois A' propose accueil, accompagnement et autonomie

Quand l'ethnopsychanalyse invite sur le divan des patients de culture arabo-musulmane

Rédigé par Assmaâ Rakho Mom | Mardi 27 Novembre 2007 à 15:00

Créée en avril 2006 par Sami Abdessalem, enseignant en UPI (Unités pédagogiques d'intégration) et animateur radio, l'association professionnelle "Les trois A" s'est donnée pour mission d'organiser des séances d'ethnopsychanalyse à destination particulièrement des personnes de culture arabo-musulmane, même si des patients d'autres cultures restent les bienvenus. Basée à Paris dans le 18ème arrondissement et diposant d'un réseau de professionnels, l'association se veut pionnière en son domaine, et même si son existence est encore jeune, elle peut se targuer, selon les dires de son président et fondateur Sami Abdessalem, de résultats très encourageants après seulement une année de travail. Pour en savoir plus sur les activités de l'association, Saphirnews a choisi de demander plus de précisions à M. Abdessalem.



Tobie Nathan, professeur de psychologie clinique et pathologique à l'université Paris VIII
Définissant avec brio ce qu’est l’ethnopsychanalyse, le célèbre psychiatre Serge Hefez nous rappelle que "c'est dans un code culturel spécifique que s'expriment les maladies et que se déroulent les psychothérapies. Les migrants de première génération sont par conséquent des personnes dont les problèmes ne peuvent éventuellement pas se comprendre par les voies habituelles de la médecine et de la psychiatrie".

"Pour aider ces patients, poursuit Serge Hefez, l'ethnopsychanalyse prendra en compte aussi bien leur histoire individuelle que l'ensemble des représentations culturelles associées à leur problème. Dans leur vie ou celle de leur entourage familial, la migration a été un énorme bouleversement, un traumatisme fragilisant ayant parfois des conséquences sur leur santé physique ou mentale. Et une interrogation se pose tout particulièrement pour eux : " comment rester le même quand tout change autour de soi ?"

Précisons tout de même que si c'est Georges Devereux (1908-1985) reste le fondateur de l'ethnopsychanalyse, le représentant le plus éminent de cette discipline est aujourd'hui Tobie Nathan, qui a organisé pour la première fois en France des séances d'ethnopsychanalyse en 1979 au service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent de l'Hôpital Avicenne, à Bobigny.

Dans un ouvrage datant de 1993 intitulé "L'influence qui guérit" et publié chez Odile Jacob, Tobie Nathan prévient : "Entendons nous ! Je sais combien la pratique de la psychanalyse par un véritable professionnel et selon les règles de l'art peut être bénéfique au patient dans une relation contractuelle, librement consentie. Mais lorsqu’elle règne en idéologie maîtresse dans un service de psychiatrie ou dans une consultation médico-psychologique, elle devient, comme tant d’autres prétendues théories scientifiques, un galimatias de causalités naïves et, en dernière analyse, un outil d’auto-justification destiné à des apprentis sorciers — quelquefois, mais si rarement — inspirés."

Premier bilan

Connu pour être un homme de radio et d'enseignement, c'est dans le cadre d'un projet professionnel que Sami Abdessalem se lance dans l'ethnopsychanalyse, après le documentaire ou encore la réalisation. "Après une année d'exercice, nous pouvons être fiers de nos résultats" lance-t-il, précisant que l'association travaille en réseau avec des professionnels, mais développe aussi en parallèle un "réseau d'insertion" pour les personnes éprouvant des difficultés à trouver un emploi". Car comme tient à le souligner Sami Abdessalem, "notre accompagnement ne s'arréte pas au suivi. Nous faisons tout pour que la personne retrouve ses forces et l'envie de vivre et de réussir".

C'est dans le cadre d'une formation continue de trois ans dispensée par l'Education nationale et spécialisée dans l'aide spécifique aux personnes en grande difficulté que Sami Abdessalem a choisi de soumettre ce projet professionnel intitulé "Les trois A".

Les démarches

La première démarche à effectuer afin de rentrer en contact avec l'association consiste dans un tout premier temps, précise M. Abdessalem, à "formuler une demande, par la personne elle-même ou par un tiers à l'adresse mail suivante : les.3A@hotmail.fr".

Un premier entretien est alors organisé avec la personne demandeuse "afin d'expliquer qui nous sommes, comment nous fonctionnons, notre engagement et celui auquel devra se soumettre la personne en question". Le futur patient part alors "avec un contrat ou il est précisé notre fonction, notre engagement et celui de la personne". Les frais de dossier s'élèvent à 250 euros pour dix séances. Enfin, si le contrat est signé de part et d'autre, "nous établissons des rendez-vous à un rythme d'une fois par semaine, avec une heure par séance", souligne Sami Abdessalem.

Précisons que l'association "Les trois A" ne s'adresse pas spécifiquement aux personnes de culture arabo-musulmane. "Les personnes qui viennent vers nous sont majoritairement de culture arabo-musulmane, comme les personnes qui se dirigent vers les bouchers halal. Toutefois nous n'interdisons pas à des personnes d'autres cultures de profiter de nos services", affirme M. Abdessalem.


La culture de la personne est décisive

Pourquoi "Les trois A" ? L'intitulé de l'association se rapporte à ses activités, à savoir celles d'accueil, d'accompagnement et d'autonomie. "L'association 'Les trois A', a été créée à partir d'un constat", explique à Saphirnews son fondateur Sami Abdessalem, celui qui veut que "pour beaucoup d'institutions qui recoivent des personnes de culture arabo-musulmane, souvent l'échec est le résultat et les conséquences du rapport humain. L'exemple des soins palliatifs est frappant, puisque le corps médical accompagnant ne parvient pas à comprendre les demandes du patient en fin de vie, parce que dans ce domaine, comme dans d'autres, la culture de la personne est décisive".

S'agissant précisément de l'association "Les trois A", "tout en étant des professionnels, puisque les intervenants sont formés à la psychanalyse et sortent de différentes écoles, nos personnels ont un plus important : celui d'appartenir à la culture arabo-musulmane. C'est une condition pour que les personnes demandeuses d'aide puissent se reconnaître et s'identifier", précise Sami Abdessalem.