Ramadan

Journée de jeûne dans une famille multiconfessionnelle

Rédigé par Assmaâ Rakho Mom | Lundi 17 Septembre 2007 à 07:40

Black-Blanc-Beur, dit-on souvent en parlant du melting-pot à la française. Ajoutons-y le fait que la France reste un état figurant parmi les champions du monde du mariage mixte, et nous obtiendrons ainsi des "tablées ramadanesques" surprenantes de diversité de couleur, de culture mais aussi de confession. La famille B. qui vit en région parisienne, en est un exemple typique.



Jugez-en par vous-même. D'une première union, Valérie, "française de souche" a eu deux garçons avec Bora, Cambodgien d'origine. Puis elle a épousé Ali, Algérien d'origine, avec qui elle a eu trois enfants, avant de divorcer à nouveau quelques années plus tard. Récemment Bora a comme on dit refait sa vie et a eu une fille, mais il garde depuis toujours une relation amicale avec son ex-épouse Valérie dont les deux garçons, musulmans eux, ont successivement épousé une maghrébine et une "Black".

En ce premier samedi de Ramadan, Bora officialise son union avec sa deuxième épouse en se présentant devant Mme le Maire, et toute la famille est conviée. Mais la coutume veut que l'on arrose la noce. Aujourd'hui, les victuailles attendront la rupture du jeûne pour être dévorées, même si Bora ne résistera pas à l'envie de taquiner Valérie, de culture chrétienne mais jeûnant par solidarité avec ses enfants, en lui proposant toutes sortes de mets asiatiques aussi délicieux et appétissants les uns que les autres.

Rentrés de la mairie après quelques séances photos, c'est sur fond de musique cambodgienne que s'accomplira, dans la chambre de bébé, la prière du midi. Et si les femmes s'extasient devant la beauté de modèles de robes traditionnelles asiatiques et que certains se préoccupent de savoir comment vivent ensemble cambodgiens khmers et cambodgiens musulmans de l'ethnie Chams musulmane, c'est l'actualité franco-française qui finit par prendre le dessus quand un des fils rappelle la mort, la veille de l'animateur de télévision Jacques Martin. Et Bora de se souvenir de l'enfance de ses aînés et de déplorer le manque d'hommages rendus par le métier au célèbre présentateur de l'Ecole des fans ou encore du Petit rapporteur.

Entretemps, l'heure tourne et en cuisine, on s'affaire. Des odeurs commencent à arriver aux narines des jeûneurs auxquels Bora propose en plaisantant bières et autres apéritifs. Et si un de ses fils vient à s'offusquer de la taquinerie paternelle, ce dernier en rajoutera une couche en ponctuant chacune de ses phrases d'un inchaAllah ! retentissant. Hilare, la petite famille observe le fils qui peste et rappelle malicieusement à son père qu'à une certaine époque, lorsqu'il raillait les offrandes de son père faites à l'imposante statue de Bouddha trônant dans le salon, ce dernier s'était montré tout aussi indigné. Bref, rien que de bien normal et constructeur au sein d'une famille non seulement recomposée mais aussi multiconfessionnelle.

Néanmoins la pendule affiche 19h40, et tandis que le père éteint le téléviseur, le fils met en marche la radio. Et c'est la diffusion de passages du Coran qui réconcilie et apaise tout ce beau monde. Les relents culinaires se font plus prononcés et les couverts sont dressés. Au menu, riz délicatement parfumé au gingembre, poulet sauté et grillé et autres légumes croquants. Quand retentit l'appel à la prière, seul le bruit métallique des couverts se fait alors entendre.

Précisons qu'en France, selon l'Institut national d'études démographiques (INED), en 2005, sur un total de 276 303 mariages contractés durant l'année, 42 496 étaient des mariages mixtes.





N.B. : Les prénoms ont été changés.