Points de vue

« Israel loves Iran » : Les Iraniens et les Israéliens lancent un appel pour en finir avec le règne de la peur

Rédigé par Sahar Namazikhah | Lundi 9 Avril 2012 à 09:50



Washington – Iraniens et Israéliens devraient retenir la date du 14 mars 2012 : jour du lancement de la campagne « Israel loves Iran » [Israël aime l'Iran], du graphiste et enseignant israélien Ronny Edri, qui a permis aux Israéliens et aux Iraniens de s’unir dans la voie de la paix, malgré les menaces de guerre émises par les dirigeants politiques.

Depuis la semaine dernière, inspirés par cette campagne, des Iraniens et des ressortissants d’autres pays se sont mis, quant à eux, à parler de « love bomb » [bombe d’amour] pour remplacer les discours de guerre.

Ronny Edri a conçu des affiches disant : « Iraniens : nous ne bombarderons jamais votre pays. Nous vous aimons », auxquelles les Iraniens ont répondu de la même manière. Cet échange de messages a réussi à chasser le spectre de la guerre en faisant naître de l’espoir, l’espoir d’une solidarité entre ces deux peuples et d’un mouvement désireux de faire table rase de la peur, plutôt que de l’autre nation.

La particularité de cette campagne est que des gens ordinaires ont réussi à recadrer les discours de leurs gouvernements. La crainte d’une éventuelle guerre – crainte suscitée par les dirigeants – a fini par pousser les citoyens à s’épargner mutuellement la difficulté de vivre dans la peur et l’appréhension, et à chercher à se rassurer réciproquement.

En tant que simple observateur, on remarque ici, que ces personnes ont recouru, sans s’en rendre compte, aux méthodes les plus sophistiquées de résolution de conflits : ils ont simplement fait appel au pouvoir de la compassion, de l’empathie et de la sensibilité. Sans le savoir, en employant ces méthodes, ils ont voulu préparer leur propre avenir et avoir leur mot à dire sur la réalité de leur situation.

Un élan populaire de solidarité et d’union comme celui-ci montre clairement que les gouvernements concernés ne jouissent pas du soutien de leurs citoyens, lorsqu’ils parlent de guerre. Le mouvement réussit remarquablement bien à faire prendre conscience au public, partout dans le monde, que les citoyens des deux pays haïssent la guerre – et ne se haïssent pas.

En tant qu’Iranienne qui constate cette solidarité entre nos deux peuples, je suis fière de voir que des gens de ces deux pays, qui ont été longtemps hantés par le spectre de la guerre, se sentent désormais assez forts pour changer l’avenir de leurs nations à travers une campagne menée conjointement, avec leurs amis et alliés respectifs.

Par ailleurs, en jetant ne serait-ce qu’un rapide coup d’œil sur les sites de réseaux sociaux, on peut constater que ceux qui prennent part à cette campagne ne sont pas seulement Israéliens ou Iraniens, il y a aussi des citoyens de divers autres pays – allant de l’Italie aux Philippines. Tous veulent contrecarrer une éventuelle frappe israélienne en Iran. La portée de cette campagne est à l’échelle mondiale.

Désormais, cette campagne dispose même d’un forum sur Facebook, auquel on peut se connecter individuellement. Des internautes d’une multitude de pays y partagent leurs idées ; il est évident qu’ils éprouvent tous un profond besoin de se lier avec l’autre, pour surmonter leurs peurs. « Amis d’Israël, nous vous aimons…avant, il n’y avait pas d’endroit pour pouvoir le dire », dit un internaute iranien. « J’espère que tous les soldats de cette planète pourront voir ce qui se passe dans ce forum, entre toutes ces personnes… J’espère qu’ils pourront dire : d’accord, arrêtons la guerre », écrit quelqu’un d’autre.

La campagne « Israel loves Iran » sera plus puissante et efficace lorsqu’elle établira davantage de liens avec des Iraniens qui vivent en Iran même. Créer des liens entre les Iraniens et les Israéliens ne sert pas uniquement à éviter la guerre mais aussi à rétablir des millénaires d’histoire commune entre Iraniens et Juifs. Cette histoire commune remonte au VIe siècle av. J.-C., à l’époque où Cyrus, roi de Perse, posait les jalons de l’Iran moderne à travers ses réalisations politiques et militaires. Les sources juives, comme notamment Josephus, historien de l’Antiquité, le décrive comme étant « oint du Seigneur », pour avoir œuvré en faveur de la liberté religieuse et pour avoir aidé les juifs à retourner chez eux.

Les peuples d’Israël et d’Iran peuvent reconstruire cette confiance et ce respect – la campagne « Israel loves Iran » est un premier pas dans cette direction.


* Sahar Namazikhah a exercé le métier de journaliste pendant 15 ans en Iran. Aujourd’hui, elle est directrice de la section des projets iraniens du Center for World Religions, Diplomacy and Conflict Resolution rattaché à l’Université George Mason, où elle poursuit également un doctorat en analyse et résolution de conflits.

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