Société

Immigration: l'Assemblée autorise les tests ADN

Rédigé par Laila Elmaaddi | Jeudi 20 Septembre 2007 à 10:30

Dans la nuit de mercredi à jeudi, les députés ont adopté jeudi, par 91 voix contre 45, le controversé amendement Mariani au projet de loi Hortefeux sur l'immigration, qui autorise les candidats au regroupement familial à recourir à des tests ADN. La mesure sera expérimentée jusqu'à fin 2010. Des voix se sont élevées contre ce texte.



91 voix contre 45

L'amendement controversé de Thierry Mariani (UMP) a été adopté par 91 voix contre 45 dans une version rectifiée par le gouvernement pour désamorcer la polémique suscitée jusque dans les rangs de la majorité.

Le texte voté autorise un candidat au regroupement familial le recours aux tests ADN "afin d'apporter une preuve" de sa filiation s'il est originaire d'un pays "dans lequel l'état civil présente des carences" et "en cas d'inexistence de l'acte d'état civil" ou d'un "doute sérieux" sur son authenticité". Pour bien marquer le caractère volontaire de cette démarche, "le consentement express des personnes dont l'authentification est recherchée sera recueilli".
Conformément aux propositions du gouvernement, introduites dans le texte par des sous-amendements, le recours aux tests génétiques est assorti d'une période expérimentale, jusqu'au 31 décembre 2010.

Brice Hortefeux, ministre de l'Immigration, de l'Intégration et de l'Identité nationale, a fait une proposition de dernière minute afin de mieux encadrer le dispositif : la mise en place d'une commission indépendante pour évaluer "annuellement les conditions de sa mise en oeuvre". Un autre sous-amendement gouvernemental a été voté : il prévoit, contrairement au texte initial de M. Mariani, un remboursement des tests par l'Etat "si le visa est accordé".

Cet amendement restera comme un poids et un affront

Selon Mouloud Aounit, président du MRAP, "cet amendement, qui ne peut nous faire oublier les autres articles qui musellent le droit fondamental de vivre en famille, restera comme un poids et un affront à l'endroit de tous ceux et toutes celles pour qui l'éthique, la morale, le respect des droits fondamentaux doivent en toute circonstance prévaloir sur l'acharnement contre les immigrés et l'obsession de les désigner comme un objet jetable et corvéable, et non comme un sujet de droit et de dignité", a-t-il affirmé dans un communiqué à l'AFP.

Martin Hirsch, le Haut commissaire aux Solidarités actives contre la pauvreté, a déclaré jeudi qu'il n'était "pas favorable" à l'amendement qui autorise des tests ADN.

"Je ne suis pas favorable à cette idée", a dit sur RTL M.Hirsch, ajoutant qu'il "compt(ait) sur le Sénat (...) pour ne pas s'engager dans cette voie".

"On parle d'identité française, d'identité nationale. Or, les principes éthiques qu'on a mis en place pour l'ensemble de la population française (...) font partie de l'identité française. Cela veut dire, parfois, renoncer à des techniques nouvelles, séduisantes (...) quand il le faut", a-t-il expliqué.

Martin Hirsch a annoncé qu'il s'"emploierait (...) à essayer de convaincre les sénateurs", "parce que je pense qu'il y en a pas mal qui sont convaincus", a-t-il affirmé.

Connaissance du français et "des valeurs de la République"

Arnaud Montebourg
L'Assemblée avait adopté, auparavant, la principale mesure du texte initial qui prévoit une évaluation, dans leur pays d'origine, pour les candidats au regroupement familial de moins de 65 ans, de la connaissance du français et "des valeurs de la République". Si l'évaluation, à laquelle sont également soumis les conjoints étrangers de Français, est négative, une formation, gratuite, est obligatoire.

L'opposition a voté contre cet article.

Les députés ont abrogé une mesure de 2006, autorisant les conjoints étrangers entrés régulièrement et vivant sur le territoire depuis plus de six mois à obtenir leur visa long séjour en France.

Brice Hortefeux (Intérieur) a jugé cette mesure "inapplicable". Les intéressés devront donc retourner dans leur pays d'origine pour obtenir ce visa sauf s'ils sont déjà admis au séjour comme les étudiants.

Arnaud Montebourg (PS) a qualifié ces articles "d'humiliants", Jean-Pierre Brard de "liberticides".

Par ailleurs, l'Assemblée a entériné les nouvelles conditions de ressources exigibles pour bénéficier du regroupement familial et qui devront, "être, au moins, égales" au SMIC et, "au plus, égales à ce salaire majoré d'un cinquième". Elle a porté le niveau de ressources à 1,33 fois le SMIC pour les familles de "six personnes ou plus".

Les députés devaient encore examiner un nouvel amendement de M. Mariani qui fait débat. Il prévoit de réduire d'un mois à 15 jours le délai de recours laissé à l'étranger devant la Commission de recours des réfugiés (CRR) après le rejet de sa demande d'asile. Le député UMP Etienne Pinte s'est insurgé contre une "atteinte au droit d'asile en France".