Connectez-vous S'inscrire

Psycho

Habiba : « Je ne supporte plus mon mari »

Rédigé par Fatima Zahra | Lundi 13 Décembre 2010 à 18:17

           


Habiba : « Je ne supporte plus mon mari »
J’ai 28 ans, je suis mariée depuis 10 ans à un homme que j’ai épousé quinze jours après notre rencontre.

Musulman pratiquant, il m’a fait découvrir la religion. Maintenant, je porte le hijab mais j’ai arrêté de prier depuis trois ans… je n’y arrive plus.

Maman de quatre jeunes enfants, j’en crains un cinquième.

Je ne supporte plus ma vie, je ne supporte plus monsieur. Pourtant, il est gentil et bon père avec les enfants ; il dit qu’il m’aime mais il me rend malheureuse. Il faut toujours faire ce qu’il veut. J’ai beau parler avec lui, il ne prend rien au sérieux.

Il a réussi à me faire sortir de la religion. Je lui en veux tellement. Il m’a détruite. Je ne supporterai pas un autre enfant.

Trop de boulot : la maison, les enfants, le mari qui se plaint… Je n’ai plus de temps pour moi.

Je suis devenue boulimique car je ne peux rien dire à personne. Je n’ai pas de famille.

Je ne me reconnais plus, moi qui rigolais tout le temps je suis devenue dépressive.
Je voudrais revenir en arrière et n’avoir jamais épousé cet homme.

Merci de votre réponse car je suis à bout.

Fatima Zahra, psychothérapeute

Chère Habiba,

Oui, votre vie est difficile et vous ne la supportez plus.

Vous la vivez comme un gâchis, comme une destruction. Vous faites le calcul des années qui passent et cela vous désespère.

Vous aspirez à une autre vie où vous seriez libre et où vous rigoleriez comme avant.

Vous aimeriez que votre mari vous comprenne mais surtout qu’il vous entende. Qu’il entende combien vous êtes fatiguée, combien vous vous sentez seule.

Quatre enfants en bas âge, c’est beaucoup de travail. Cela ne laisse pas beaucoup de temps, même pas celui de prier.

Certains jours, l’envie doit être forte de tout plaquer et partir…. Mais ce n’est pas possible. Il y a justement le petit dernier qui réclame son biberon, l’autre encore qui insiste pour vous montrer le beau dessin qu’il a fait à l’école. Il y a tant à faire. Et un cinquième ? Non, c’est trop !, criez-vous.

J’ai longuement réfléchi à l’aide que je pouvais vous apporter. Alors il m’est venu l’idée de vous offrir ce conte. Il a été écrit par le cheikh Saadi, un célèbre maître soufi du XIIIe siècle. Le voici :

« Jamais je n’avais coutume de me plaindre de l’adversité ou d’être troublé par les nombreux soucis qui m’assaillaient jusqu’au jour où je me trouvai sans chaussures et sans argent pour en acheter. C’est ainsi que j’entrai dans la mosquée de Kûfa pour apaiser la douleur de mon cœur par la prière. Je vis un homme qui n’avait pas de pieds. Alors, je rendis grâce à Dieu et acceptai mon propre sort avec patience. »

Votre cri témoigne de votre prise de conscience. Et votre dépression est justement à considérer comme un précieux signal d’alarme qui vient vous prévenir que vous ne pouvez plus subir les événements sans réagir.

Le fait d’écrire cette lettre est déjà un premier mouvement pour reprendre votre vie en main. Maintenant, il est important que vous vous interrogiez sur ce qui vous a amené à cet enfermement.

– Qu’est ce qui a fait que vous vous êtes mariée si vite ?
– Que représente pour vous le fait de porter le hijab ? Le faites-vous par choix ? C’est quoi, pour vous, d’être musulmane ?
– Vous dites que votre mari a réussi à vous sortir de la religion. Par quel pouvoir y est-il parvenu ?
– Vous écrivez également qu’il vous aime… mais qu’il ne vous prend pas au sérieux et qu’il vous a détruite. Vous contraint-il ? Vous menace-t-il ?

J’imagine combien la fatigue des grossesses rapprochées vous a rendue vulnérable. Soyez bien consciente de cela et insistez auprès de votre mari pour lui dire les choses qui ne vous conviennent plus.

Aujourd’hui, il me semble urgent pour votre équilibre de sortir de votre solitude. Peut-être pouvez-vous déjà consulter votre médecin, aller à la PMI de votre quartier, vous rapprocher des autres mères à la sortie de l’école… La démarche étant de ne pas rester seule.

Peut-être pouvez-vous envisager d’aller voir un psychothérapeute. Ce serait là aussi un excellent moyen pour avoir un moment rien qu’à vous.

J’espère que ma réponse a jeté un nouvel éclairage sur votre vie et que cela vous aidera dans la suite de votre cheminement.

La rubrique « Psycho », qu’est-ce que c’est ?

Des psychologues et psychanalystes répondent à vos questions. Musulman(e)s du Maghreb ou de France, professionnel(le)s actif(ve)s exerçant en cabinet, ils réfléchissent à votre problématique et tentent de vous éclairer à travers leur expérience professionnelle et leur pratique spirituelle. Ils peuvent vous aider à y voir plus clair en vous-même ou à mieux décrypter le comportement des personnes de votre entourage.
Ils ne sont pas médecins, même si on les désigne parfois comme des « médecins de l’âme » , mais leur rôle est de vous aider à trouver en vous-même la meilleure réponse à vos interrogations sur vos relations aux autres, votre conjoint ou conjointe, vos parents, vos frères et sœurs, vos amis, vos collègues de travail, vos voisins...
Alors, n’hésitez pas, interrogez-les, ils tenteront de vous répondre en s’éclairant des plus belles pensées de l’islam.
Contactez-les (anonymat préservé) : psycho@saphirnews.com





SOUTENEZ UNE PRESSE INDÉPENDANTE PAR UN DON DÉFISCALISÉ !