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Points de vue

Chrétiens et musulmans, affrontons ensemble la réalité des migrants

Rédigé par Collectif de signataires | Mercredi 8 Mars 2023 à 15:30

           

Selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), la Méditerranée est la route migratoire la plus dangereuse au monde. Alors que les annonces de naufrages tragiques ne cessent de rythmer l'actualité des migrations, un appel à une mobilisation islamo-chrétienne autour de ces questions est lancé, « à la lumière des valeurs inscrites dans (les deux) traditions ». Parmi les signataires qui comptent quelques Français parmi une majorité d'Italiens, figurent l'archevêque émérite de Milan, Angelo Scola, le fondateur de la fondation internationale Oasis, Pierbattista Pizzaballa, Patriarche latin de Jérusalem, Cristóbal López Romero, archevêque de Rabat, Emmanuel Pisani, directeur de l'Institut dominicain d'études orientales au Caire, mais aussi Romano Prodi, l'ex-Premier ministre italien et ancien président de la Commission européenne. Du côté des musulmans, on compte Yassine Lafram, président de l'Union des communautés islamiques d'Italie (UCOII), ainsi qu'Abu Bakr Moretta, président de la Communauté religieuse islamique italienne (COREIS), et l'emblématique Yahya Pallavicini, imam de la mosquée Al-Wahid, à Milan. En soutien à cette initiative interreligieuse, Saphirnews relaye l'appel.



Le dernier tragique naufrage d’un bateau de migrants en Méditerranée appelle à la responsabilité de chacun. En raison de sa complexité, le phénomène migratoire a besoin de solutions de différentes natures, tenant compte des facteurs politiques, sociaux, économiques et environnementaux des pays concernés. Mais il s’agit avant tout d’un fait humain qui interpelle la conscience de chacun.

Les chrétiens et les musulmans devraient se sentir particulièrement concernés par cette réalité. En effet, la majorité des migrants qui tentent de rejoindre l’Europe sont des personnes de confession chrétienne ou islamique, les territoires par lesquels ils transitent ont une importante présence chrétienne ou musulmane, et les lieux d’où ils embarquent sont pour la plupart des pays à majorité musulmane.

Ces dernières années, le dialogue entre chrétiens et musulmans s’est concentré sur des questions comme la coexistence pacifique, la citoyenneté paritaire et la prévention de la violence religieuse, avec la publication de documents communs, des prises de position et l’organisation de conférences. Nous estimons que l’émigration, avec toutes les souffrances qui l’accompagnent, mérite une attention similaire. Dans ce domaine, il existe déjà de nombreuses initiatives prises par des individus ou des institutions, mais une action commune contribuerait à approfondir les raisons de l’amitié islamo-chrétienne.

Il n’appartient pas aux autorités religieuses et aux fidèles chrétiens et musulmans de proposer des solutions techniques aux défis que pose l’émigration. Ils peuvent, en revanche, intervenir sur le plan humanitaire et culturel, en contribuant au débat sur ce sujet à la lumière des valeurs inscrites dans leurs traditions. Comme l’indique le Document sur la fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence commune, signé par le pape François et le grand imam d’al-Azhar Ahmad al-Tayyeb le 4 février 2019, « la foi amène le croyant à voir dans l’autre un frère à soutenir et à aimer. De la foi en Dieu, qui a créé l’univers, les créatures et tous les êtres humains – égaux par Sa Miséricorde –, le croyant est appelé à exprimer cette fraternité humaine, en sauvegardant la création et tout l’univers et en soutenant chaque personne, spécialement celles qui sont le plus dans le besoin et les plus pauvres ».

Dans l’encyclique Fratelli Tutti, le pape François a en outre souligné que l’émigration est toujours une expérience de déracinement et a donc réaffirmé « le droit de ne pas émigrer, c’est-à-dire d’être en condition de demeurer sur sa propre terre ». En même temps, il a toutefois rappelé que « beaucoup de personnes échappent à la guerre, aux persécutions, aux catastrophes naturelles » et que « d’autres, à juste titre, sont en quête d’opportunités pour (elles) et pour leur famille. (Elles) rêvent d’un avenir meilleur et désirent créer les conditions de sa réalisation ».

Le processus migratoire se compose de plusieurs phases et implique une pluralité d’acteurs. Pour le gouverner, il faut agir à tous les niveaux, en amont et en aval à la fois : s’employer à tenter de supprimer les causes qui l’engendrent, limitant ainsi son ampleur et, en même temps, offrir des parcours sûrs et des formes adéquates d’accueil et d’intégration aux personnes qui décident de quitter leur pays.

Les chrétiens et les musulmans sont appelés à apporter leur contribution dans chacun de ces domaines, en s’engageant contre les injustices et l’oppression qui sont souvent à l’origine de la décision de partir, en s’opposant aux fermetures nationalistes et égoïstes qui empêchent l’accueil, et en condamnant les actions sans scrupules des trafiquants d’êtres humains et des passeurs, qui s’enrichissent sur la peau des migrants.

L’appel à une mobilisation islamo-chrétienne autour de ces questions ne vise nullement à exclure ou à nier l’apport des personnes d’autres traditions religieuses et d’autres convictions. Il vise plutôt à mettre au service de la vie bonne de tous un héritage spirituel et moral en partie partagé entre chrétiens et musulmans.

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Première publication sur le site de la fondation internationale Oasis en mars 2023. La liste des premiers signataires dont figure Saphirnews est ici.

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1.Posté par Joseph le 21/03/2023 07:43 | Alerter
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Les ONG ne sauvent pas des naufragés.
Un naufrage c'est un événement imprévisible. Tel n'est pas le cas. Les passeurs savent qu' ils peuvent larguer leurs passagers en pleine mer car ces derniers, sauf accident, seront récupérés par les  ONG. Ces dernières n' amèneront pas les clandestins vers un port d' Afrique du Nord pourtant à proximité mais en Europe car les clandestins ont payé pour cette destination. Les ONG complètent l' action des passeurs. Elles sont leur complice. 

Sans les ONG les passeurs seraient obligés de faire traverser la méditerranée aux clandestins pour les débarquer dans un port européen où en tant que passeurs ils seraient arrêtés. Sans les ONG plus de passeurs.


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