Psycho

Bacar : « Ma femme ne veut pas être heureuse avec moi à cause des problèmes de sa fratrie »

Rédigé par Lalla Chams En Nour | Samedi 19 Mars 2022 à 11:00



Je vous envoie ce mail car ma femme et moi vivons une situation assez compliquée. Malgré mes efforts, j'essaie constamment d'être gentil, doux et de m'adapter à ma femme, mais nous n'arrivons pas à nous épanouir sexuellement. Cela me fait énormément de mal, car la raison qu'elle indique n'est pas liée à un problème physique, elle m'a elle-même dit qu'elle se sentait bien. Il peut arriver que parfois elle ne se sente pas bien mais c'est très rare comme tout le monde.

La raison est que sa famille, notamment ses frères et sœurs, ont traversé de nombreux problèmes liés à l'alcoolisme, la drogue ou encore l'adultère et ils peinent encore aujourd'hui à se sortir de ces problèmes. Ma femme me dit qu'elle se sent en mission constante de les remettre sur le droit chemin et qu'elle ne peut apprécier ou jouir de notre couple (que ce soit dans la vie courante ou de façon intime) tant que les problèmes de ses frères et sœur la tourmentent.

Cela m'exaspère et je me sens comme pris en otage, j'essaie de lui parler et de lui dire que je suis aussi là, que je souffre mais rien n'y fait. Au niveau intime, lorsque je la touche à peine ou l'effleure, elle me demande de reculer, que les problèmes de ses frères et sœurs l'empêchent d'être heureuse avec moi. Elle me dit tout le temps : « Tu es homme merveilleux, le meilleur, un très bon mari avec d'énormes qualités. » Mais cela me fait plus de mal que de bien car, en sachant cela, elle ne fait pas d'effort pour améliorer la situation ou trouver un terrain d'entente.

Je cherche aujourd'hui de l'aide car je ne sais pas comment lui faire comprendre que je suis là pour elle et que nous aussi avons droit au bonheur et la bonne entente dans notre couple.

Lalla Chams En Nour, psychanalyste

Cher Bacar,

Je suis entièrement d’accord avec vous, je comprends votre peine. Résumons-nous : votre femme vous apprécie mais se dit envahie par les difficultés de sa fratrie. Comme si les problèmes de ses proches l’empêchaient de vivre, en somme.

Vous avez raison, il y a là quelque chose d’anormal. On peut être en empathie avec les membres de sa famille, mais si cela entrave notre propre épanouissement, cela relève du symptôme. Il a pu se passer quelque chose de traumatisant dans son enfance, qu’elle a peut-être refoulé, donc oublié, mais qui continue d’exercer sur elle une tyrannie silencieuse qui l’empêche de s’épanouir dans sa féminité. S’il y a refoulement, elle pourrait se cacher à elle-même d’abord sa propre problématique derrière les difficultés de ses frères et sœurs.

Elle a la grande chance d’avoir un mari patient – mais il y a des limites, je vous l’accorde –, aimant et attentif, au point de nous écrire pour essayer de remédier à ce problème. Serait-elle prête à consulter un psy pour essayer de comprendre pourquoi elle s’empêche de vivre sa vie de femme au risque de perdre son mari et de s’enfoncer dans le cercle vicieux de l’échec ? Elle se refuse l’accès à la rencontre intense avec son mari, à une forme de confiance et d’abandon parce qu’elle a sans doute subi quelque chose dans son intimité qui lui fait redouter toute autre forme d’intimité avec vous.

Si vous avez tout essayé pour la mettre en confiance, il est important qu’elle accepte d’aller voir au-delà des prétextes qu’elle avance. D’oser revenir à elle, à son histoire, pour comprendre d’où vient sa peur de tout rapprochement avec son mari.

Je vous souhaite sincèrement de la convaincre que son blocage ne vient pas uniquement de ses inquiétudes fraternelles.


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