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Points de vue

Aimez-vous Muhammad ?

Rédigé par Zia | Vendredi 3 Février 2006 à 00:00

           

Ce n'est pas dans mes habitudes de prendre part aux polémiques qui traversent notre société à propos de l'islam, je préfère à cela travailler au quotidien à témoigner de ma foi de musulmane et de l'amour que je porte à mon messager et mon bien-aimé Muhammad. Auprès de sa parole, je cherche réconfort et sagesse. Mais voilà qu'au nom de la liberté de la presse, on s'attaque à lui. Spontanément je voudrais répondre en posant cette question : Aimez-vous Muhammad ?



Aimez-vous Muhammad ? Si l'on pose cette question aux musulmans aujourd'hui, quels que soient leur origine, leur engagement dans leur foi ou dans la pratique de leur religion, la réponse sera majoritairement : oui ! La raison est toute simple, il est facteur unificateur entre eux ; les plus intransigeants comme les plus modérés disent tous suivre son exemple et citent ses paroles pour légitimer ou conforter leur prises de position.

Ainsi, quand les dessinateurs norvégiens, usant de leur liberté d'expression et puisant dans leurs préjugés, présentent le Prophète de l'islam comme un être violent, débauché et terroriste, leurs caricatures choquent toutes catégories de musulmans. En effet, elles ne ciblent pas des personnalités emblématiques de l'intégrisme musulman, dont plusieurs sont caricaturées par des dessinateurs arabo-musulmans aussi. Elles déforment l'image du symbole de l'Islam même ; son messager. Elles renvoient donc aux musulmans une image réductive de leur religion et d'eux-mêmes : vous êtes tous des terroristes comme votre prophète.

Oui, on a beau plaidé la liberté de l'expression, ces caricatures ont bel et bien un message stigmatisant tous les musulmans à travers Muhammad. Certains éditorialistes français essayent de faire comprendre, à nous autres musulmans, qu'accepter ces caricatures ne peut que nous faire du bien : un peu de sens d'autodérision ! Allons ! Sortez de votre bigoterie, réformez-vous, bref, évoluez !

Pour que ces paroles soient audibles par les musulmans, il faut peut-être que leurs auteurs évoluent aussi dans leur regard sur l'islam et les musulmans et arrêtent de les traiter comme les « attardés de l'humanité ». Avant d'essayer d'enlever la paille de la « bigoterie » des yeux des musulmans, qu'ils regardent un peu la poutre de « l' Islamophobie » dans les leurs. Celle-ci les empêche de percevoir les blessures qu'ils provoquent par leurs mots alors qu'ils sont les mieux placés pour savoir que les mots peuvent blesser, et manière profonde !

Donc, oui, nous sommes avec vous pour la liberté de la presse, mais la presse libre doit être aussi responsable. Défendre, au nom de cette liberté, des dessins pleins d'ostracisme envers deux milliards de musulmans risque de discréditer cette liberté à leurs yeux ; eux qui en ont vraiment besoin.

Je suis militante du dialogue religieux et de dialogue tout court, depuis une bonne dizaine d'années. Je suis persuadée que c'est le chemin que nous emprunterons tous, tôt ou tard. Je suis consciente des dégâts des actes de violences commis par des musulmans sur la progression de ce dialogue, c'est pourquoi je ne mâche pas mes mots pour les dénoncer, auprès des jeunes surtout, en ayant recours aux paroles du Prophète Muhammad.

Depuis le débarquement de la polémique des caricatures insultantes à son égard en France, je vis un beau dilemme : que répondre à ces coups de fil que je reçois et qui posent tous la même question : alors, Zia, tu gardes toujours la pêche ? Tu crois toujours aux vertus du dialogue, même quand on insulte celui au nom de qui tu prêches la paix et l'ouverture ?

Au risque d'être traitée de naïve, je continue à croire qu'il faut passer par la parole et l'écoute de l'autre pour sortir de cette polémique. C'est auprès de Muhammad, mon messager bien-aimé, que j'ai puisé cette conviction.

En effet, ses biographes nous rapportent qu'un homme (apparemment non musulman) a fait irruption un jour dans un lieu où le Prophète se réunissait avec ses disciples et l'a agrippé violemment en lui le sommant de lui rembourser sa dette ! Outré par ce manque de respect, l'un des disciples du Prophète se rua sur l'agresseur de toutes ses forces. Muhammad arrêta net son mouvement lui dit : « Tu ferais mieux de lui rappeler de demander son dû de façon convenable et de me rappeler à moi d'honorer mes dettes et ne pas les oublier. » Voilà pourquoi je l'aime, il a su toujours être un homme comme les autres, même face à ses détracteurs. Cela n'enlevait rien à son aura et son statut de guide des humains.

Après avoir interpellé ceux qui pensent devoir critiquer, voire dénigrer, Muhammad, j'aimerais bien interpeller ses fidèles, mes frères et sœurs musulmans : Ne tombez pas dans la démesure en exprimant votre attachement au Prophète, il n'aurait pas aimé cela.

Méditez avec moi cette phrase sage entendue suite à un autre outrage à Muhammad : en février 1988, en visite à Londres, j'ai pris un taxi dont le chauffeur était Soudanais. Comme la circulation était bloquée aux alentours de Queen's Park, j'ai demandé au chauffeur s'il y avait un événement spécial, il me répondit : « Les musulmans manifestent contre la parution d'un livre qui insulte le Prophète (il parlait des "Versets sataniques"). » Je rétorquai : « Je comprends bien leur colère ! » et le chauffeur me répondit, en son beau dialecte soudanais : « Eh bien, pas moi ! Ils se fâchent contre un homme qui se fout pas mal de la religion quand il insulte le Prophète ! Ils auraient mieux fait de se fâcher contre eux-mêmes car ils insultent des centaines de fois par jour le Prophète en se comportant de manière qui n'honore pas son message ! »

Zia, une femme qui aime Muhammad – salut et bénédiction de Dieu sur lui.




Réagissez ! A vous la parole.
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