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Points de vue

À mes amis #MusulmanDiscret

Rédigé par | Mardi 23 Août 2016 à 00:54

           


À mes amis #MusulmanDiscret
Bien sûr, Jean-Pierre Chevènement a blessé dans sa formule à l’emporte-pièce en appelant les musulmans à être discrets. Eh oui, il convient de réagir, car l’écart entre le droit et ce qu’est prêt à accepter le corps social se creuse dangereusement.

Bien sûr, l’architecture légale des droits humains, nos Constitutions libérales d’Europe de l’Ouest, permettent à chacun-e de s’habiller presque comme bon lui semble, et sont censés protéger chacun-e de l’arbitraire.

Bien sûr, on s’est bien marré avec la campagne spontanée du #MusulmanDiscret : qui de son tweet assassin, qui de sa vidéo, qui de son blog… D’aucuns ont un humour génial, d’autres étaient moins inspirés, c’est ainsi.

Après quelques jours, je m’interroge quand même un peu, à la lecture de toutes ces réactions, sur ce qu’elles disent de nous, une fois de plus. Qu’est-ce que ce discours énonce « en creux » ?

Le/la musulman-e doit il/elle être #indiscret, #visible par nécessité ? Celui ou celle qui choisit d’être un-e #Musulmandiscret-e est-il/elle moins musulman-e, trop dilué-e pour être vrai-e, authentique ? Succomberait-il/elle à la pression sociétale, premier pas vers le renoncement à sa religion, à soi, à son identité ? Comme si cette dernière ne pouvait s’exprimer que dans une visibilité plus ou moins ostentatoire ?

(La suite doit s’entendre au féminin également).

Peut-être qu’un #Musulmandiscret choisit de ne pas crier haut et fort qu’il va faire sa prière. Il n’a peut-être pas besoin de dire qu’il va « méditer », mais simplement la faire discrètement sans rien dire à personne, sans exhibitionnisme de la performance, ou bien choisit-il encore de la reporter à plus tard, à son domicile ou sur le chemin du travail ? Sa prière est-elle de moindre qualité ?

Peut-être qu’un #Musulmandiscret choisit de ne pas porter de barbe visible (ou de foulard pour la femme), parce qu’il se dit qu’il n’a pas besoin d’afficher sa différence de cette manière. Sa foi et son amour de Dieu sont-ils moindres ?

Peut-être qu’un #Musulmandiscret choisit de ne pas porter le moindre signe vestimentaire distinctif parce qu’il se dit que, au fond, le Prophète et Ses Compagnon-ne-s portaient exactement les mêmes vêtements que leurs contemporains polythéistes et que cela n’avait dérangé personne à cette époque. La discrétion vestimentaire des premiers musulmans ne fut-elle pas gage du fait que c’est au niveau du Ciel et de l’éthique que les choses changeaient, pas dans les codes vestimentaires, dans leur « vivre-ensemble » ? L’engagement du #Musulmandiscret envers Dieu est-il dès lors de moindre intensité ?

Peut-être qu’un #Musulmandiscret choisit de pas faire savoir à la terre entière qu’il jeûne pendant le Ramadan, tout en ne s’excluant pas des conventions sociales, mais en évitant savamment d’étaler sa pratique pour ne pas attirer le regard et les questions – bienveillantes ou non – que sa pratique ne manque pas de susciter. Son jeûne est-il de moindre qualité, moins réussi, moins « spirituel » ?

Peut-être que ce #Musulmandiscret se dit que la clé d’une recherche spirituelle intense, digne de ce nom, se trouve à l’opposé de la revendication de visibilité, souvent identitaire, et constituant donc un détournement de cette même recherche, car cette visibilité – de plus en plus oppositionnelle aujourd’hui de par la force de cette vaste crispation identitaire saisissant tous les secteurs de nos sociétés – ne peut être maintenue que par un boost de l’égo ainsi que de la volonté d’affirmation de soi et de se visibiliser dans l'espace public. Si cette dernière est parfaitement légitime et constitutionnelle, elle peut s’avérer également, spirituellement, un vrai piège dans lequel il est si facile de tomber.

Je dis juste que, en toute matière, rien n’est simple et que, s’il est nécessaire de rappeler des principes de droit, il est également nécessaire de rappeler leurs implications potentielles en matière de cheminement – car, au fond, c’est pour cela que l’on est musulman, non ? Sinon, à quoi bon ? Il y a d’autres grammaires d’opposition disponibles sur le marché.

****
Michael Privot est directeur du Réseau européen contre le racisme (ENAR).



Michaël Privot
Michaël Privot est islamologue et collaborateur scientifique du Centre d'étude de l'ethnicité et... En savoir plus sur cet auteur


Réagissez ! A vous la parole.

1.Posté par AlainGabon le 24/08/2016 01:20 | Alerter
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Je crois que Michael Privot n'a pas compris le problème. Sauf exceptions, les musulmans « visibles » (puisqu’on en est arrivé à ce point effarant où l’on doit utiliser ce genre de vocabulaire loufoque et en soi ridicule) n’ont pas de problèmes avec les musulmans discrets ou invisibles, et ils seraient sans doute pleinement d’accord avec ce qu’il explique. Le problème est l’obligation pour tous de se faire discret, invisible ou au minimum de raser les murs.

Lorsque la discrétion en religion est choisie pour les raisons expliquées, il n’y a pas de problème, mais c’est une autre affaire lorsque cette discrétion est imposée au mépris à la fois du droit (comme rappelé dans l’article) et des valeurs françaises, dont la liberté religieuse, vestimentaire, d'expression, de conscience et plus.

D'ailleurs, tente-ton d'imposer cette incongrue et inacceptable obligation de discretion aux catholiques ou aux juifs?

2.Posté par chabri le 03/09/2016 14:17 | Alerter
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Monsieur Privot mélange racisme et islamophobie .
Cela n'a rien à voir . Serais-je raciste envers mes compatriotes " français de souche depuis de longues générations " -- et non souchiens comme je l'entends parfois dan certains quartiers ...= sous chien -- qui se sont convertis à l'islam sans problème et sans fatwas prononcées quand ce sont des musulmans qui quittent l'Islam pour se convertir à une autre religion ?

3.Posté par Melen le 05/10/2016 16:43 | Alerter
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Comme si tous les musulmans étaient barbus, en foulards, et faisaient le ramadan avec une pancarte.
Les musulmans ne sont pas tous mal élevés avec un foulard ou une barbe.
Si etre discret ça signifie ne pas avoir de particularité, c'est à tout le monde qu'il faudrait demander d'etre discret si on va par là. L'uniformité n'existe pas que l'on sache. En démocratie en tout cas.
A Noel j'ai eu ma voisine qui a mis Ave Maria à fond à minuit, je travaillais le lendemain. J'avais tapé avec le balai et elle a stoppé. Et hop, catholique discrète.
Je n'ai jamais compris pourquoi dans nos médias on choisit toujours des photos de musulmanes en foulard ou des musulmans entrain de prier pour illustrer les articles.
Et le choix des photos toujours le meme. A quatre pattes, les fesses en l'air et de dos.
Un musulman quand il rentre dans une mosquée, il se jette parterre, se met à quatre patte et reste toujours dans cette position, c'est à croire.
Pourquoi dans les reportages quand des catholiques sont interviewés, ils sont interrogés sur leurs lieux de travail, pendant leurs loisirs, dans un restaurant jamais dans une église et les musulmans toujours à la mosquée entrain de prier.
Ca dit, un catholique ça à une vie sociale, ça fait plein d'autres choses que de prier, un musulman par contre ça prie et ça ne fait que cela. Un musulman c'est à la mosquée et nulle part ailleurs. Il est musulman et n'est pas autre chose que cela.

4.Posté par Melen le 05/10/2016 16:50 | Alerter
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Monsieur Privot, on n'est pas à Raqqa.
Les signes extérieurs de foi n'ont pas à etre interdits par des individus que ça dérange.
Je me trompe peut etre mais il semble que c'est ce que vous voulez dire de façon sournoise. Musulman discret.

5.Posté par Melen le 05/10/2016 16:59 | Alerter
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Chabri. Débaptiser ou décirconcire ça n'existe pas.
Aucun culte n'accepte ça. Quand on n'a choisi une religion officiellement c'est pour toujours donc.
Je suis athée, je connais moyennement les religions, je ne les connais que par ma propre curiosité, en fouinant, j'en connais du juste et du moins juste, je peux me tromper donc, mais enfin il me semble.


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