« Une seconde femme », ode féminine par-delà la polygamie

Cela commence comme un conte de fée avant de virer à la farce cruelle. Une jeune femme, Ayse, quitte son village turc pour partir à Vienne vivre en compagnie du beau jeune homme qu’elle vient d’épouser. Mais, en fait, la jeune fem­me n’est pas destinée au jeune homme mais à son père, Mustafa, un sexagénaire moustachu.

Elle a été choisie par Fatma, son épou­se aux forces déclinantes, pour être sa seconde femme et prendre sa relève. À savoir, torcher les enfants, préparer la cuisine, et partager la couche de son époux. La jeune femme n’aura guère le choix. Le mari et ses enfants, tous un brin déboussolés, non plus. L’arrivée de la nouvelle venue va perturber les équilibres au sein de la famille et faire tomber les masques.

Le réalisateur Umut Dag a su tirer de cette tragédie, filmée en huis clos, un subtil portrait d’une famille où chacun vit replié sur ses secrets et dissimule ses drames intimes pour préserver les apparences. Le poids des traditions y brise des vies sans qu’on cesse de sourire.

Deux beaux portraits de femmes se dégagent de l’ensemble, nouées l’une à l’autre par une relation complexe.

Fatma, la mère, pétrie de convictions et de traditions, préparant sa succession, est à l’origine de ce terrible chaos qu’elle fait mine d’ignorer, se rendant compte trop tard des dégâts. Et Ayse, sorte d’agneau sacrificiel, jeune femme naïve qui cherche peu à peu à s’émanciper, à avoir les mêmes droits que tous, y compris celui de l’amour alors qu’on lui dénie toute envie propre, se contentant de lui demander d’accomplir les souhaits des autres.

Leurs regards n’ont pas fini de vous poursuivre à la fin du film.


Une seconde femme, d'Umut Dag, en salles le 6 juin.

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