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Sur le vif

Turquie : Moïse caricaturé, le journal satirique Girgir contraint de disparaître

Rédigé par | Lundi 20 Février 2017 à 13:20

           


Une des couvertures du journal satirique Girgir.
Une des couvertures du journal satirique Girgir.
L’un des quatre derniers journaux satiriques de Turquie a été contraint à la fermeture suite à une polémique déclenchée par une caricature de Moïse. La vignette incriminée présente le prophète guidant les juifs hors d’Egypte tandis que les personnes qui le suivent se plaignent qu’il ne cesse de se vanter d’avoir ouvert la mer Rouge.

Jugé offensant pour les juifs et les musulmans, le dessin a provoqué de nombreuses réactions indignées, et des appels au meurtre ont essaimé sur les réseaux sociaux. Les propriétaires de Girgir ont été assignés par la justice pour blasphème vendredi 17 février. « La décision a été prise de fermer le magazine et de renvoyer tout le personnel à cause d'une caricature de mauvais goût », ont annoncé, dans la foulée, les éditeurs du journal. Ils ajoutent que « la caricature a gêné la société et nous a gênés en tant qu'entreprise de publication ».

Selon le site ActuaBD, Girgir est « le premier grand journal satirique de la période moderne créé en 1972 par l’éditeur Haldun Simavi mêlant esprit underground, érotisme, humour et politique ». Ce Charlie Hebdo version turque « a dû son immense notoriété à sa sourde opposition aux pouvoir militaires en place. Toute la génération des dessinateurs et des éditeurs des grands journaux satiriques actuels sont issus de ce journal fondateur ». Arrêté en 1993, Girgir a été racheté en 2015 par le groupe de presse Sözcü, d’orientation nationaliste, laïc et en opposition au président Recep Tayyip Erdogan.

Avant la décision de fermeture, Girgir s'était excusé, affirmant que la caricature avait échappé à l'attention des relecteurs « du fait de la fatigue et de l'insomnie ». Les propriétaires estiment que la caricature de Moïse est une tentative de « mettre l’entreprise dans une position délicate ». Ils annoncent qu’ils transmettront au procureur les noms des responsables.

Selon Ibrahim Kalin, porte-parole de la présidence, le dessin incriminé « n'a rien à voir avec l'humour et la liberté d'expression, c'est immoral et un crime de haine ». Ivo Molinas, rédacteur en chef de l’hebdomadaire turc juif Shalom, a déclaré que « la caricature a franchi les limites de la liberté d’expression. Les juifs sont exposés tous les jours à la discrimination et aux discours de haine de la part des médias », tout en jugeant cependant que « la disparition de la revue est très triste, ce n’est pas une décision appropriée ».

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