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Le voile ou le job : des françaises musulmanes refusent de faire le choix

Rédigé par Assmaâ Rakho Mom | Lundi 19 Mars 2007 à 10:30

           

Trouver un emploi par les temps qui courent n’est déjà pas chose aisée. Alors quand s’ajoute à la conjoncture économique le fait d’être une femme musulmane et voilée de surcroît, la recherche d’emploi relève d’une mission impossible. Et c’est pour tenter de remédier à cet état de fait que dans l’Essonne, et plus précisément à Evry, le Comité interculturel des femmes de l’Essonne (CIFE) a décidé de s’attaquer à cette douloureuse réalité.



Travailler au sein d’une entreprise française, avoir un bureau, des collègues, être rompu au traditionnel « métro, boulot, dodo » : c’est le rêve de centaines de jeunes françaises musulmanes portant le voile. Un rêve qui peine à devenir réalité. Pourtant, ce ne sont pas les talents qui manquent. Avocates, spécialistes en droit international, infirmières, médecins, etc., les femmes musulmanes voilées sont « riches en compétences », comme le souligne Horia Demiati, trésorière du CIFE et elle-même spécialisée dans l’audit financier.

Télémarketing, garde d’enfants, engagements associatifs divers ou autres cours particuliers, telles sont les occupations sur lesquelles se rabattent le plus souvent des femmes diplômées ou ayant un très haut niveau d’études. Leur faute ? Celle de prendre librement la décision de se voiler.

« L’apparence physique reste le problème essentiel. Si elles veulent travailler, les femmes musulmanes voilées se voient obligées de retirer leur voile, or beaucoup de femmes restent attachées à leur pratique, qu’elles considèrent d’ailleurs comme une liberté » précise Horia Demiati. « Les entreprises ne nous acceptent pas avec le voile, donc on n’ose plus aller aux entretiens avec le voile car nous sommes dénigrées » ajoute-t-elle, évoquant l’exemple de cette avocate qui désormais, précise systématiquement dans son curriculum vitae qu’elle porte le voile, « pour ne pas perdre de temps et ne pas en faire perdre aux entreprises ». C’est cette situation que ne supportent plus les femmes du Comité interculturel des femmes de l’Essonne. Et comme l’union fait la force, ces femmes ont décidé d’unir leurs forces afin de mettre en place un « projet commun » visant à faire changer les choses, « car dans d’autres pays européens ou aux Etats-Unis, les difficultés rencontrées en France n’existent pas ».

Tout est parti d’une initiative d’une ex-journaliste au magazine Marie-Claire, qui avait choisi de s’intéresser aux difficultés rencontrées par les femmes voilées sur le marché du travail. Mise en relation avec le CIFE par la sociologue Dounia Bouzar, celle-ci a organisé avec le comité un appel à témoignage. Et c’est dans cette dynamique que l’association s’est rendue compte de l’ampleur du phénomène et surtout de la sourde colère de musulmanes voilées ayant atteint des hauts niveaux de compétence et qui se voient régresser sans pouvoir agir.

« Pour le moment rien de concret n’a été fait » précise Horia Demiati. Le CIFE a organisé, samedi 10 mars, une réunion ouverte à tous sur la question, à la mosquée d’Evry. Cela aura été l’occasion de réfléchir à la problématique, d’écouter différents témoignages de femmes, notamment de françaises expatriées témoignant du fait qu’elles étaient jugées « sur leur capacité et leurs compétences et non sur leur physique, que ce soit aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne », mais aussi de commencer à mettre en place un « réseau de femmes », chacune d’entre elles faisant profiter aux autres de son carnet d’adresses. Par exemple, il existe « des entreprises américaines dans la région parisienne susceptibles d’embaucher des femmes voilées » ajoute la trésorière du comité. Le CIFE se réunira samedi 24 mars 2007 en petit comité afin de réfléchir à la mise en place d'un projet visant à améliorer les conditions de la femme voilée sur le marché du travail et à faire changer les mentalités. Plus tard devraient être organisées des réunions ouvertes à tous.





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