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Ramadan

Dounia Bouzar : les jeunes se sont « réapproprié » le sens du ramadan

Rédigé par Fouad Bahri | Samedi 4 Août 2012 à 15:00

           


Dounia Bouzar : les jeunes se sont « réapproprié » le sens du ramadan
Pratique très suivie dans la communauté musulmane, le jeûne du ramadan l’est tout particulièrement chez les plus jeunes, dont les motivations diffèrent souvent des raisons strictement religieuses. Pour l’anthropologue Dounia Bouzar, le Ramadan constitue pour ces jeunes un « rite de passage à l’âge adulte » alternatif, à la fois plus noble et plus accessible que le fait de gagner de l’argent.

Quelles sont les motivations qui définissent le rapport des musulmans de France à la pratique du jeûne du ramadan ?

Dounia Bouzar : La pratique du Ramadan en France touche aussi des jeunes qui ne sont pas pratiquants et n’ont pas une relation à la religion très forte. On observe même des jeunes qui ne sont pas du tout musulmans et qui vont avoir envie de faire le Ramadan, y compris des non-croyants.
Cela soulève une interrogation : pourquoi le ramadan fait sens auprès de cette jeunesse ? Ce sens semble avoir dépassé la transmission des valeurs de l’islam et les questions purement spirituelles. Pendant très longtemps, pour passer de l’enfance à l’âge adulte on avait recours à des rites initiatiques. Le jeune homme devait faire la preuve qu’il n’était plus un enfant et montrer de quoi il était capable. Cela demandait de l’effort sur soi-même. Chaque société organisait selon ses croyances ce rite de passage à l’âge adulte.

Cette dimension de rite initiatique est-elle présente avec le Ramadan ?

D. .B. : En fait, ce qu’on remarque dans les sociétés modernes, c’est que l’individualisme a du bon mais que l’envers est l’absence de ce rite initiatique. Dans la symbolique moderne, ce rite est beaucoup plus difficile. Être un homme, c’est avoir de l’argent, ce qui s’avère problématique pour ceux qui sont au chômage ou qui font de très longues études.
Avec le Ramadan justement, beaucoup de jeunes veulent se confronter à eux-mêmes pour savoir ce dont ils sont capables, aller au-delà de leurs limites et apprendre la frustation, celle-ci ayant deux sens : celle qui est liée effectivement au rite initiatique mais aussi celle qui est un pied-de-nez à la société de consommation.

Vous voulez dire que les jeunes musulmans adoptent volontairement une attitude de défi face à la société ou à eux-même à travers le Ramadan ?

D. .B. : Ce n’est pas forcément le résultat d’une prise de conscience, mais cela tient beaucoup de l’inconscient.
Au niveau anthropologique et sociologique, on sent que pour le jeune, le Ramadan est une manière d’être maître de lui-même et de devenir un homme sans posséder de l’argent. Plus qu’un interdit normatif, ils se sont réapproprié un sens plus philosophique du Ramadan qui n’est pas « je vais en Enfer si je mange » mais plutôt « Je me mets à la place d’un pauvre et je me rappelle qu’il y a des gens qui n’ont rien ».
Ce sens de la solidarité et de la fraternité est important et compte à une époque caractérisée par l’effondrement des syndicats et le manque de confiance en la politique. Ils se prouvent à eux-mêmes qu’ils peuvent se maîtriser dans des conditions parfois très difficiles comme en été et loin du stigmate d’êtres violents qui ne se contrôlent pas véhiculé par la société.

Le Ramadan devient donc le moyen, pour eux, de retrouver une certaine estime de soi ?

D. .B. : Oui, c’est une situation de renarcissisation dans un contexte où ils sont diabolisés. Cette renarcissisation est d’ailleurs reconnue lorsque les gens expriment leur admiration en se disant : « Ils arrivent à ne pas boire et à ne pas manger. »
Il faut souligner que les musulmans de France le pratiquent en France car ils ont besoin d’être chez eux. Ils ont du mal à le faire au bled, où règne parfois une culture clanique et où le clan se mêle de la relation de l’individu à Dieu, ce que les jeunes socialisés en France qui ont appris à dire « je » ont du mal à supporter.

Le jeûne est-il vécu comme une pratique communautaire ou individuelle ?

D. .B. : Pour les jeunes qui vont bien, c’est un ressourcement individuel. Mais certains groupuscules essaient de construire des solidarités fondées sur le vrai et le faux, qui amènent dans certains quartiers des pressions normatives obligatoires pour tout le monde. Ils essaient d’amener les jeunes à s’auto-exclure des autres.
Alors que le mot religion veut dire relier, ils vont construire des barrières infranchissables entre les jeunes et le reste du monde. Le Ramadan devient pour eux l’un des outils de création d’une exaltation de groupe et d’une ambiance communautaire quasi obsessionnelle. Un Ramadan extrêmement rigidifié et caractérisé par sa visibilité alors qu’il s’agit d’une pratique par nature invisible.

Est-ce qu’il y a plus de gens qui font le Ramadan ou est-ce devenu plus visible ?

D. .B. : La différence est qu’à présent les musulmans veulent le mettre en avant, car ils en ont marre d’être diabolisés et veulent casser ces préjugés négatifs qui ne les définissent pas.
De plus en plus d’individus veulent montrer qu’ils peuvent à la fois raisonner et jeûner.






Réagissez ! A vous la parole.

1.Posté par Orlando le 05/08/2012 16:08 | Alerter
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J'apprécie l'opinion de l'auteur. Le Ramadan est en effet une occasion de se ressourcer, mais il n'est pas un moyen de se séparer de ceux qui pensent autrement. J'apprécie le fait que des non-musulmans aient envie de participer au Ramadan, c'est un signe d'ouverture d'esprit et de désir de vivre ensemble. Ceci doit être réciproque.

2.Posté par Assia le 05/08/2012 21:12 (depuis mobile) | Alerter
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Le jeûne est u acte essentiellement et avant tout religieu. Ce que Mme Bouzar decrit sont les consequences positives de cette action et rien de plus. Sans ça, et les personnes aisées, ou sans souci niveau financier elles jeûnent pourquoi dans ce cas?

3.Posté par ysé le 06/08/2012 12:34 (depuis mobile) | Alerter
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orlando
les musulmanes à qui j'ai proposé de suivre le carême avec moi ont été offusquées et m'ont reproché de ne pas les respecter. Dans ce cas, pourquoi des non musulmans devraient ils s'astreindre au ramadan ?...

4.Posté par Orlando le 07/08/2012 14:52 | Alerter
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Yse , je disais que ce devait être réciproque. Mais je n'y crois pas beaucoup...

5.Posté par sunny le 08/08/2012 15:11 | Alerter
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Moi j'essaierai volontiers le carême si on me le proposait. Histoire de comparer nos expériences. Mais pas de catholiques pratiquants en vue autour de moi... A part la messe de temps en temps, ils ne font pas grand chose de plus, c'est dommage. Mon collègue m'a donnée le joli nom de "nonne" lorsque je lui ai dit que j'allais à la mosquée entre midi et deux :)

6.Posté par sunny le 08/08/2012 15:12 | Alerter
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mon collègue fait partie de ces catholiques pratiquants qui vont seulement à la messe de temps en temps, je précise.

7.Posté par Orlando le 08/08/2012 20:08 | Alerter
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Sunny, essayez le carême si vous voulez, mais je ne connais personne que ça intéresse encore. Toutes ces coutumes religieuses qui consistent à frustrer pour ensuite récompenser sont un truc éprouve dans les religions. Les croyants en besoin ne comprendraient jamais qu'une religion ne leur impose pas des sacrifices et de la mortification. Ça ne fait pas sérieux. Ils se sentiraient floues...

8.Posté par sunny le 09/08/2012 16:48 | Alerter
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Sacrifices et mortifications... Venez donc voir nos tables une fois que le gong a sonné :D
Le jeûne est un exercice pour apprendre à se maitriser. La maitrise des instincts est à la base de toute civilisation "civilisée". Pour apprendre à laisser de côté un moment le "matériel" pour laisser place à d'autres aspects de notre personne. Une fois par an pour se le rappeler et progresser.

9.Posté par sunny le 09/08/2012 16:50 | Alerter
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Ce que j'aime décidément dans l'islam c'est cette régularité sur différents niveaux du temps. Les prières aux différents moments du jour, la prière du vendredi toutes les semaines, le jeûne et la zakat une fois par an, le pèlerinage une fois dans la vie, et tout ça à tout moment grace au calendrier lunaire. C'ets l'harmonie totale avec la nature, je trouve ça très beau. Un peu comme les épis de blé qui s'inclinent tous ensemble quand une brise passe. Ou les tournesols qui se tournent ensemble vers le soleil. On fait partie de ce mouvement là. Et on l'oublie trop souvent.

10.Posté par sunny le 09/08/2012 16:55 | Alerter
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Plutot que des "sacrifices", moi je vois un exercice qui travaille la volonté et le courage. Bien nécessaires dans la vie pour être debout.
Toutes les traditions font appel un moment ou a un autre à des exercices qui demande de la rigueur.
Méditer demande de la concentration et de la rigueur par exemple.

11.Posté par BEKER le 18/08/2012 13:16 | Alerter
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le jeune c est bien pour les grosses sous le hijab..ca fait maigrir, ca transpire moins et ca pue moins, un peu moins...


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