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Société

Des femmes pour le dialogue et la paix

Rédigé par | Jeudi 6 Mars 2008 à 04:00

           

La Journée de la Femme du 8 mars, officialisée par les Nations unies en 1977, est devenue l’occasion de faire le point sur la situation des femmes et de revendiquer, encore et toujours, l’égalité des droits. Or c’est non pas durant une journée, mais durant toute l’année que le Forum européen des femmes musulmanes (European Forum of Muslim Women – EFOMW) fait entendre la voix des femmes musulmanes. Interview avec sa présidente, Noura Jaballah.



Saphirnews : Le Forum européen des femmes musulmanes (EFOMW) a été créé il y a maintenant un an. Pouvez-vous nous rappeler quelles ont été les raisons de sa création ?
 
Noura Jaballah : Le Forum européen des femmes musulmanes est avant tout une plateforme de réflexion, de travail et d'échanges liés à la question de la femme et représentant près d'une quinzaine d'associations basées en Europe.
L'initiative est plutôt venue de la France, à la suite de la loi sur la laïcité de mars 2004. Les débats houleux qui ont précédé la promulgation de cette loi ont montré une forte stigmatisation de la femme musulmane, et ont révélé, au fond, une réelle islamophobie qui a surgi en France. Aussi avons-nous voulu voir ce qui se passait ailleurs en Europe. Quelle était la situation en Grande-Bretagne ? en Suède ?... Nous avons donc établi un état de lieux européen de la situation de la femme musulmane ; et c'est ainsi que, à ses débuts, cinq associations ont créé le Forum, provenant de cinq pays : la Suisse, l'Italie, l'Allemagne, la Grande-Bretagne et la France.

Quel était cet état des lieux ?
 
Après le 11-septembre, il s'est trouvé que même s'il existait auparavant des gens non hostiles à notre religion, les événements les ont fait pencher vers une critique catégorique de l'islam. La violence, le terrorisme et l'oppression des femmes n'ont-ils pas été justifiés haut et fort au nom de l'islam ?
Par ailleurs, un nombre certain de musulmans considèrent la femme comme une mineure, commettent des injustices au sein de leurs familles, estiment que la femme n'a aucun rôle à jouer dans la société. Or les textes islamiques viennent contredire ces comportements à l'encontre des femmes. La femme a été créée avec l'homme comme khalifâ sur Terre, pour servir le Bien.
 
Et le vécu des femmes ?
 
On a senti une grande déprime chez les femmes musulmanes. Soit la femme est stigmatisée, du fait de sa pratique religieuse ; soit elle se libère de tout pour pouvoir exister socialement. D'autre part, nombre de femmes elles-mêmes ont assimilé l'idée que la femme est là seulement pour servir le mari, alors que l'Histoire de l'islam a montré qu'il en est autrement.
Le déclin de l'islam est lié au déclin de la femme. La femme a perdu sa personnalité de femme croyante, de femme de foi au sens plein du terme, car elle semble limitée à sa condition de femme-épouse et de femme-mère. Or il faut aussi être épanouie dans sa fonction sociale et sa fonction intellectuelle. Si la femme est méprisée, comment peut-elle éduquer, transmettre, servir, agir ?
L'EFOMW entend encourager la femme musulmane, lui redonner confiance : il ne faut pas baisser les bras !





Vous avez donc plusieurs défis internes à la communauté à relever ! L'EFOMW serait-il féministe ?
 
Le Forum n'est pas une association féministe au sens d'une coupure entre les hommes et les femmes ; c'est une association féminine qui défend la reconnaissance de la femme en tant qu'égale de l'homme. Nous ne concevons pas les relations hommes-femmes dans un rapport de force. Nous sommes donc féministes au sens où l'on considère que tous les êtres humains, hommes et femmes, sont épris de justice. Dans la conception islamique, l'homme et la femme sont deux êtres égaux… égaux et complémentaires, ce qui signifie que l'homme a besoin de la femme, et la femme a besoin de l'homme.
 
Oui, mais concrètement ?
 
Un proverbe arabe dit : « Derrière chaque homme, il y a une femme. » Il faut terminer la phrase ! et dire : « Derrière chaque femme, il y a un homme. » Que cela veut-il dire ? L'homme, qu'il soit le frère, le père ou le mari, qui a compris le rôle de la femme, doit l'aider et la soutenir à assurer sa responsabilité. Elle a non seulement un rôle de transmission des valeurs au sein de la famille mais aussi un rôle de témoignage et de participation active au sein de la société.
L'homme doit l'aider à acquérir la science et l'encourager à ce qu'elle mette en pratique ses compétences.
Les hommes ne doivent pas avoir peur : que les femmes prennent leur place dans la société ne signifie pas qu'elles ne les respectent pas ou qu'elles entrent en conflit avec eux !
Le but ? Servir le Bien et agir dans cette Voie dans le cadre de relations paisibles entre hommes et femmes, dans un rapport de fraternité, d'entraide, de soutien et de justice. Le Coran ne nous dit-il pas : « Les croyantes et les croyants sont des alliés les uns envers les autres » ?


Vous avez certainement aussi des défis que l'on pourrait qualifier d'« externes » à relever : avec les médias, la société civile, les autres confessions religieuses ?
 
Effectivement. En mai 2007, l'EFOMW a organisé un séminaire au Parlement européen sur l'image de la femme musulmane dans les médias, qui a réuni des femmes musulmanes, des journalistes et des hommes et femmes politiques européens. Les Actes sont d'ailleurs mis à la disposition du public et mille DVD de cette rencontre ont été diffusés auprès des médias et des responsables politiques.
Au début de cette année 2008, nous avons été reçues par la Commission des relations interreligieuses du Vatican. Certes, chaque religion a sa spécificité. Dans le cadre du dialogue interreligieux, nous n'entrons pas dans les questions de dogme. Il s'avère cependant que nous pouvons agir ensemble dans nombre de domaines : il s'agit de rétablir le sens de la fraternité humaine, d'œuvrer pour la paix.
 
Le rôle de la femme dans la paix et dans le dialogue interculturel, telle est d'ailleurs la thématique de votre année 2008. Et vos activités s'étendent de la Grèce à la Suède, en passant notamment par la Suisse et la Bosnie. Quel programme !
 
Ce n'est pas moins de 14 manifestations que nous organisons dans toute l'Europe. Celles-ci s'inscrivent dans le cadre de l'année 2008 décrétée par l'Europe « Année européenne du dialogue interculturel ». Le congrès annuel de l'EFOMW se déroulera le 4 avril prochain à Stockholm (Suède) où nous attendons 500 personnes.
Les associations membres de l'EFOMW sont, pour leur part, très actives dans leur pays respectif. Milan, Athènes, Genève, Zurich, Bruxelles ou encore Sarajevo sont autant de villes où les femmes musulmanes feront entendre leurs voix : concours de dessins, conférences, festival culturel, présence à des salons du livre…
En Bosnie, par exemple, l'association Nahla  – qui dispense un enseignement religieux, mais aussi des cours de sport et de formation professionnelle à ses adhérents qui se comptent en plusieurs mille – organisera 3 jours d'affilée intitulés « Un seul peuple, une seule culture mais différentes religions » pour dire : « Plus jamais la guerre ».
Le colloque de Bruxelles « Des générations pour la paix », prévu pour novembre 2008, sera l'occasion d'échanges entre jeunes et moins jeunes, et sera suivie d'une visite au Parlement européen.
 
Vous êtes éminemment Européennes. Quelle est votre langue de travail au sein de l'EFOMW ?
 
Nous parlons trois langues : le français, l'anglais et l'arabe. Etonnamment, lors de nos contacts avec les personnalités politiques et les membres de la société civile, en Italie par exemple ou en Suède, nous sentons véritablement la fraternité humaine au niveau européen, mais pas en France… Cela nous montre que nous sommes encore au début du chemin…
 
Et la rencontre culturelle que vous organisez à Paris, le 8 mars prochain, à l'occasion de la Journée internationale de la femme, n'est-elle réservée qu'à la gent féminine ?
 
Certainement pas ! Chacun et chacune est convié-e à mettre à bas les clichés et à dialoguer ensemble. La Journée est déclinée selon trois axes : l'identité musulmane, le rôle des femmes dans la promotion du dialogue interculturel et les valeurs communes qui peuvent exister au sein de cette même diversité. Elle se clôt par des chants et une pièce de théâtre à la fois grave et ironique, que nous recommandons à tous et à toutes.


Journée internationale de la femme
« Quelles valeurs communes dans une diversité culturelle ? »
 
Samedi 8 mars 2008, de 14 h à 21 h
Théâtre Adyar : 4, square Rapp – Paris 7e
Au programme : trois conférences, une table ronde, un concours, une exposition de peintures, une pièce de théâtre et des chants.
Avec la participation de : Ahmed Eleuch, Jean Baubérot, Magalie Saneba, Malika Dif, Mehrezia Labidi-Maiza, Michel Jondot, Noura Jaballah ; le chanteur Moussa Mustapha ;
la compagnie de théâtre Le miroir des signes.
Entrée : 8 €.
 
Pour contacter l'EFOMW : http://www.efomw.eu/

 


Le Forum européen des femmes musulmanes – European Forum of Muslim Women (EFOMW) est partenaire de l'Année 2008 Hamidullah, qui célèbre le centenaire du Pr. Muhammad Hamidullah (1908-2002).
 
 


Journaliste à Saphirnews.com ; rédactrice en chef de Salamnews En savoir plus sur cet auteur


Réagissez ! A vous la parole.

1.Posté par Mr khalfaoui khalid de montfermeil 93 le 10/03/2008 10:13 | Alerter
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salam aliekoume

2.Posté par chayR abou riyaD le 12/03/2008 21:33 | Alerter
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Après cet excellent article sur le mouvement très courageux et positifs des femmes de l'EFOMW,
pourquoi ne pas envisager à terme des femmes imam ou aumonières des armées ?

Inovation ? Rappelons que les critères de l'imamat sont, par défaut :
1° - Celui/celle qui craint le plus le Dieu Unique.
2° - Le/a plus instruit(e) dans la Loi du Dieu.
3° - Le/ plus âgé(e) de la communauté.

En vertu de ses qualités intellectuelles et de coeur, le Prophète Mouhammad (pbsl) nomma :
o°umm waraquah bint 'abdallah bint Ha°riç comme i°mam de la mosquée de son quartier, où elle dirigeait les offices de prières, même celle des hommes.
chayr abou riyaD.

3.Posté par oumar tiessougue le 15/03/2008 23:27 | Alerter
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je remercier tre bien je suis a vous pour cette activite je demande tous les que passerai chez vous et le consey merci

4.Posté par teggar aek gerant de l entreprise de la paix tamanrasset su le 17/05/2008 21:07 | Alerter
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nous demondant acolibration pour fait en manifestation de la paix au monde sur tous le role de femme musulmans dons la paix

5.Posté par Salma le 10/04/2009 22:06 | Alerter
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Dans le magazine Lyon Capitale, lisez donc cet écrit c'est effrayant!!

Philippe Delpy, chargé de mission au Fonds d’action sociale Rhône-Alpes et spécialiste de la diversité culturelle et réciproque (je cite) "Le français comme on l’aime” correspond aux envies des publics en socialisation c'est à dire celles des femmes arabes et/ ou musulmanes

Lyon capitale : Comment expliquez-vous que "Le français comme on l’aime” rencontre un large écho auprès des exclus de la culture, plutôt qu’auprès des traditionnels héritiers ?

Philippe Delpy : Je crois que cette proposition des dix mots, relativement simple, est tout simplement en adéquation avec les envies des publics en socialisation. Pour eux, l’enjeu est d’être reconnu dans la société. En plus, il s’agit d’une opération qui a le label “culture”. Or les gens revendiquent de plus en plus d’être considérés non comme des problèmes sociaux, mais des êtres de culture à part entière. On a trop travaillé sur les handicaps des publics, on a trop renvoyé ces images, alors qu’eux cherchaient à s’en sortir. La proposition des dix mots est intéressante car elle fait appel aux notions de plaisir, de dynamique, de jeu…

La maîtrise de la langue est-elle une condition sine qua non d’intégration ?

On ne peut pas s’intégrer dans la société si on ne maîtrise pas la langue. La volonté de la maîtrise de la langue, c’est le signe d’être en amour avec la société dans laquelle on est. Mais plus qu’un problème d’intégration, c’est un problème de discriminatio...  


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