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Société

Caricatures : Charlie Hebdo surfe sur la vague de la provoc islamophobe

Rédigé par | Mercredi 19 Septembre 2012 à 04:40

           

« Charlie Hebdo » verse de l’huile sur le feu. Alors que la polémique autour de la vidéo islamophobe est loin de s'apaiser, la publication satirique a décidé de publier, mercredi 19 septembre, des caricatures du Prophète Muhammad. Tandis que le gouvernement s’inquiète d’éventuels troubles que peut constituer la provocation de « Charlie Hebdo », les organisations musulmanes s’indignent et appellent les musulmans à ne pas jouer le jeu des trouble-fêtes islamophobes.



Charlie Hebdo publie à nouveau des caricatures du Prophète Muhammad.
Charlie Hebdo publie à nouveau des caricatures du Prophète Muhammad.
Charlie Hebdo a fait de la provocation à l'encontre des musulmans une marque de fabrique. L’hebdomadaire satirique a publié, mercredi 19 septembre, des caricatures représentant le Prophète Muhammad. Des dessins que le directeur de la publication, Charb, assume complètement à l’heure où le film anti-islam continue de faire des remous au sein de la communauté musulmane.

Ce n'est pas la une, qui présente une parodie d'une scène du film Intouchables, qui est incriminée. Elle met en scène un rabbin poussant un imam en fauteuil roulant qui disent tous deux « Faut pas se moquer ». En revanche, il suffit de tourner les quelques pages du journal jusqu'à arriver à la dernière où figurent deux images censées représenter le Prophète... totalement dénudé.

Pour Charlie Hebdo, ce numéro est sa réponse formulée aux manifestations qui se sont tenues ces derniers jours dans le monde mais également en France contre le film « L’Innocence des musulmans », produit par Nakoula Basseley Nakoula, un Américain de confession copte qui n'a pas hésité, aux dernières nouvelles, à mentir aux acteurs sur son projet pour réaliser sa vidéo bas de gamme. Ces dessins « choqueraient ceux qui vont vouloir être choqués en lisant un journal qu'ils ne lisent jamais », a déclaré Charb.

Le gouvernement désapprouve, la droite le soutient

Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a exprimé « sa désapprobation face à tout excès » dans le « contexte actuel » et en appelle à « la responsabilité de chacun ». En visite officielle en Egypte, le ministre des Affaires étrangères, Laurent Fabius, s'est déclaré « contre toute provocation » et a fait savoir que le gouvernement « n’encourage pas » l’initiative de Charlie Hebdo, tout en respectant la liberté d’expression.

Mais la publication peut déjà se targuer d’être soutenue par François Fillon, qui ne va pas tarder à être rejoint par d'autres figures de la droite. « Je défends "Charlie Hebdo", je défends la liberté d'expression et je pense qu'on ne doit pas céder un pouce de terrain dans ces domaines-là », a affirmé l’ex-Premier ministre sur Canal+.

A la veille de la publication de ce numéro, un dispositif de sécurité a été mis en place autour des locaux du journal à Paris, selon la préfecture de police de Paris. Les locaux de la rédaction avaient été incendiés après la parution de son numéro spécial en novembre 2011 nommé « Charia Hebdo ».

Indignés, les musulmans appelés à rester calme

Le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohammed Moussaoui, a appris « avec une profonde consternation » la publication de « dessins insultants à l'égard du Prophète de l’islam » et condamne « avec la plus grande vigueur ce nouvel acte islamophobe qui vise à offenser délibérément les sentiments des musulmans ».

Et même s’il est « profondément attaché à la liberté d’expression », « rien ne peut justifier l’insulte et l’incitation à la haine ». Le CFCM exprime « sa profonde inquiétude face à cet acte irresponsable qui, dans un contexte très tendu, risque d’exacerber les tensions et de provoquer des réactions préjudiciables » et appelle les musulmans à « ne pas céder à la provocation » et les « exhorte à exprimer leur indignation dans la sérénité avec des moyens légaux ».

Le recteur de la Grande Mosquée de Paris, Dalil Boubakeur, a lancé un appel mardi soir au calme face à « une publication qui risque d’exacerber l’indignation générale du monde musulman ». « Je regrette que l’incitation à la haine religieuse ne soit pas réprimée par la loi comme l’est l’incitation à la haine raciale. Nous avions fait appel au Tribunal d’instance de Paris, après les caricatures qu’avait publiées "Charlie Hebdo" en 2006, mais notre plainte n’avait pas été retenue », indique-t-il.

En 2007, une plainte avait été déposée par la Grande Mosquée de Paris et l'Union des organisations islamiques de France (UOIF) contre l’hebdomadaire pour « injures » afin de dénoncer les caricatures du Prophète Muhammad et les faire interdire. Sans succès puisque Charlie Hebdo a obtenu gain de cause. M. Boubakeur estime qu’un verdict contraire « pouvait donner un coup de frein à l’exacerbation que risque de provoquer la publication de nouvelles caricatures, après la diffusion de la vidéo » anti-islam.

Charlie Hebdo, « aveuglé par ses intérêts pécuniaires »

« Encore une fois, un hebdomadaire insignifiant profite de la liberté d’expression et d’une actualité dramatique pour se faire une notoriété », s’insurge l’UOIF dans son communiqué. Réaffirmant « son attachement à la liberté d’expression », elle rappelle que « l’usage de la liberté exige aussi un sens de la responsabilité qui exclut l’amalgame, le dénigrement et la diffamation ».

« Aveuglé par ses intérêts pécuniaires, "Charlie Hebdo" est malheureusement opaque à ce discours et n’a montré jusqu’à présent que son goût prononcé pour la provocation et son aversion pour les religions en général et pour l’islam en particulier », déclare l’UOIF dans son communiqué. Elle appelle toutefois les musulmans « à faire preuve de retenue, à respecter les lois républicaines et à rester patients et sereins en toutes circonstances ».




Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur


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