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Cancer du poumon : l’Angleterre à prendre comme exemple

Rédigé par De presse Revue | Lundi 10 Février 2003 à 00:00

           

La mortalité masculine par cancer du poumon décroît de façon ininterrompue depuis plus de vingt ans au Royaume-Uni. En France, elle suit l'évolution inverse. Les données britanniques les plus récentes démontrent pourtant que le fait d'arrêter de fumer à tout âge diminue le risque : 15% de risque d'avoir un cancer du poumon pour un fumeur, 6% s'il arrête à 50 ans et 2% s'il stoppe à 30 ans. Ces travaux ont été présentés dans le cadre d'une conférence organisée par la Ligue nationale contre le cancer lors du 14e congrès sur les traitements anticancéreux qui se tient cette semaine au Palais des congrès à Paris.



La mortalité masculine par cancer du poumon décroît de façon ininterrompue depuis plus de vingt ans au Royaume-Uni. En France, elle suit l'évolution inverse. Les données britanniques les plus récentes démontrent pourtant que le fait d'arrêter de fumer à tout âge diminue le risque : 15% de risque d'avoir un cancer du poumon pour un fumeur, 6% s'il arrête à 50 ans et 2% s'il stoppe à 30 ans. Ces travaux ont été présentés dans le cadre d'une conférence organisée par la Ligue nationale contre le cancer lors du 14e congrès sur les traitements anticancéreux qui se tient cette semaine au Palais des congrès à Paris.

 

«Si Jacques Chirac ne fait rien contre le tabac dans le plan cancer qu'il prépare, alors il n'y aura pas de politique de prévention contre le cancer», a déclaré sir Richard Peto, professeur en épidémiologie à Oxford, en Angleterre, spécialiste mondial des relations entre tabagisme et santé. Cet expert éminent sait de quoi il parle. Dans le cadre de ses travaux sur le tabagisme dans le monde, il a notamment comparé la mortalité par cancer lié au tabac de part et d'autre de la Manche et a montré à cette occasion que le tabac pèse massivement dans la mortalité prématurée en France puisqu'il est à lui tout seul responsable de la moitié des décès prématurés (entre 35 et 69 ans) par cancer. Il surveille par ailleurs année par année, avec Richard Doll, l'évolution de la consommation de tabac outre-Manche et celle de la mortalité prématurée liée au tabac et en extrait des données utilisées désormais partout dans le monde.

Au Royaume-Uni, après une augmentation massive, la mortalité par cancers liés au tabac a atteint son apogée dans les années 60 avec un taux de pratiquement 250 décès pour 100 000 hommes âgés de 35 à 69 ans. Les chiffres ont ensuite nettement baissé pour atteindre aujourd'hui un peu plus de 100 décès liés au tabac pour 100 000 hommes de la même tranche d'âge. Pour les femmes, l'entrée dans le tabagisme a été plus tardive, avec apparition des cancers dus au tabac plus tard et amorce récente d'une petite décroissance du nombre de cas. Actuellement, en Grande-Bretagne, 28% des hommes et 26% des femmes fument. Richard Peto tire trois principaux messages de tous ces chiffres et statistiques : la moitié des fumeurs seront tués (cancers et maladies cardio-vasculaires) par le tabac, un quart d'entre eux avant 70 ans ; le fait d'arrêter de fumer réduit les risques, à tout âge. Il ne s'agit pas de prôner la vie éternelle, mais d'éviter par l'arrêt du tabac la mortalité précoce.

Comment les Britanniques s'y sont-ils pris pour réduire le tabagisme et la mortalité qui y est liée ? «On ne sait pas très bien, répond Richard Peto. La plus grande étude sur le tabagisme et la santé a été menée pendant plus de quarante ans, sur 36 000 médecins britanniques. Quand les résultats de l'étude les concernant ont mis en évidence pour eux une surmortalité massive due au tabac, ils ont été considérablement sensibilisés et ont sensibilisé leurs patients. Le rôle des journalistes aussi a été important...». A peine 6% des médecins anglais fument contre plus de 30% des médecins français.

La comparaison des chiffres entre la France et le Royaume-Uni illustre notre inaptitude à faire face au fléau sanitaire représenté par le tabac. Nous devançons désormais les Britanniques, tant en terme de pourcentage de fumeurs que de morts liés au tabac. Que se passe-t-il en France ? Les chiffres de consommation montrent que les Français, en 1925, fumaient en moyenne une cigarette par adulte et par jour, en 1950, trois cigarettes par adulte et par jour, en 1975, six cigarettes et, en 2000, cinq cigarettes. Pour ce qui est du cancer du poumon, l'épidémie, croissante en France depuis les années 50 chez l'homme, a connu un pic au début des années 90 et amorce des légers signes de fléchissement à partir de 1995. Chez la femme, la courbe est croissante depuis les années 85. Des différences entre sexes qui s'expliquent par l'évolution des consommations de tabac. Chez les 20-34 ans en 1953, 75% des hommes fument et seulement 24% des femmes (et en moindre quantité) ; en 1990, pour la même tranche d'âge, 51% des hommes fument et 39% des femmes. «Sur les presque 400 décès par cancer pour 100 000 habitants observés chez l'homme entre 35-69 ans en France, 200 sont dûs au tabac», explique Richard Peto. S'il n'y avait pas de tabac, on pourrait diviser par deux le taux de décès par cancer entre 35 et 69 ans.

Pour le seul cancer du poumon, «neuf cas sur dix sont dûs au tabac et la durée du tabagisme augmente considérablement le risque par rapport à la quantité fumée, précise le professeur Albert Hirsch (chef du service de pneumologie à l'hôpital Saint-Louis, Paris). Il faut noter que les cancers du poumon observés dans une population sont liés à l'usage du tabac dans cette population avec un décalage de vingt ans au minimum. Ce décalage dans le temps est essentiel. Néanmoins, l'arrêt à tout moment influence la courbe épidémique du cancer. Il y a trois erreurs à ne pas commettre pour les fumeurs : se dire c'est trop tard, je fume depuis trop longtemps ; se dire je fume trop peu (il n'y a pas de seuil, même deux cigarettes par jour augmentent le risque) ; et se dire enfin dans vingt ans, c'est trop loin...».

Ces données épidémiologiques sont de la plus haute importance pour mettre en place les campagnes de prévention. Ainsi, pour réduire à court terme la mortalité par cancers liés au tabac, il faut inciter à arrêter de fumer le plus grand nombre de fumeurs dès aujourd'hui. Et, pour réduire à long terme ces décès, il faut tenter de convaincre les adolescents et jeunes adultes de ne pas se mettre à fumer.





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