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Sur le vif

Birmanie : l’archevêque de Rangoun ne veut pas que le pape utilise le mot « Rohingya »

Rédigé par | Jeudi 23 Novembre 2017 à 13:12

           


Le pape François va se rendre en Birmanie lundi 27 novembre. Un événement historique car il est le premier des papes à s’aventurer dans cette contrée d’Asie du Sud-Est. La visite est aussi attendue que redoutée de la part des autorités birmanes à cause de la crise des Rohingyas.

Fin août, une vague de répression orchestrée par l’armée à l’encontre des membres de cette minorité a choqué l’opinion internationale. Mgr Charles Maung Bo, archevêque de Rangoun s’est dit « très heureux et très chanceux » d’accueillir le souverain pontife. « Nous voulons porter un message d’amour et la paix. Il y a différentes religions dans ce pays, différents groupes ethniques. Il doit y avoir une unité et une dignité. Nous devons réussir à trouver la paix dans tous les États, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. La paix est essentielle. Le pape montrera que c’est possible », a-t-il déclaré à La Vie.

L’archevêque s’est cependant montré inquiet à l’idée que le pape puisse envenimer le conflit en employant le mot « Rohingya » pour désigner la minorité opprimée par le pouvoir en place. « Il ne devra pas utiliser ce mot, cela choquerait les Birmans, le gouvernement et les militaires. Cela voudrait dire qu’ils sont une ethnie birmane, qu’ils appartiennent à ce pays, ce qui n’est pas le cas », affirme-t-il.

Les Rohingyas n’ont aujourd’hui pas accès à la citoyenneté birmane et sont donc juridiquement apatrides. Mgr Charles Maung Bo a annoncé qu’il conseillera au pape d’utiliser le mot « musulman » à la place.

Il reconnaît des discriminations et des persécutions en Birmanie mais pas de « nettoyage ethnique » comme dénoncé par Emmanuel Macron : « Il y a beaucoup d’atrocités mais pour beaucoup de raisons. Historiquement, les musulmans sont partis du Bangladesh et y sont revenus. Il y a aussi beaucoup d’islamophobie, beaucoup de terrorisme avec Daech notamment. Les Birmans ont peur de l’islamisation du pays. Et il y a eu des insurgés du côté des Rohingyas. Donc tout cela reste compliqué », explique l’archevêque, oubliant que les actions des insurgés sont une des conséquences de l’oppression vécue par la minorité rohingya.

Le dignitaire catholique a réaffirmé son soutien à la porte-parole du gouvernement, Aung San Suu Kyi, dénonçant la dureté des critiques des médias internationaux à son encontre. Selon lui, la réalité constitutionnelle de la Birmanie ne laisse pas libre champs à la ministre d’agir : « Elle n’a pas de pouvoir. Ici, il y a deux gouvernements, le gouvernement civil et celui de l’armée. Les militaires ont 25 % des sièges au Parlement et les trois plus gros ministères. Elle ne peut pas faire grand chose. »

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